Le Koran (Traduction de Kazimirski)/60

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Traduction par Traduction d’Albin de Kazimirski Biberstein.
Librairie Charpentier (p. 456-458).

CHAPITRE LX.

MISE À L’ÉPREUVE[1].


Donné à Médine. — 13 versets.


Au nom du Dieu clément et miséricordieux


  1. O vous qui croyez ! ne prenez point mes ennemis et les vôtres pour amis. Vous leur témoignez de l’amitié après qu’ils ont témoigne qu’ils ne croyaient pas à la vérité qui vous a été révélée ; ils vous repoussent vous et le prophète de leur sein, parce que vous croyez en Dieu votre Seigneur. Quand vous sortez de vos foyers pour la guerre sainte, pour combattre dans ma voie et pour obtenir ma satisfaction, leur témoignerez-vous de l’amitié ? Mais, moi, je sais le mieux ce que vous cachez et ce que vous produisez au grand jour, et quiconque d’entre vous le fait s’écarte de la vraie route[2].
  2. S’ils vous rencontraient seulement quelque part, ils feraient voir combien ils vous sont hostiles, ils étendraient sur vous leurs bras et leurs langues pour vous nuire ; ils désireraient vous rendre de nouveau infidèles.
  3. Au jour de la résurrection, vos parents ni vos enfants ne vous serviront de rien. Dieu vous séparera les uns des autres ; il voit vos actions.
  4. Vous avez un bel exemple dans Abraham et dans ceux qui le suivaient, lorsqu’ils dirent à leurs concitoyens : Nous n’avons rien de commun avec vous, nous sommes innocents du culte des divinités que vous adorez à côté de Dieu. Nous vous renions, et l’inimitié et la haine s’élèvent entre nous pour toujours, à moins que vous ne croyiez au Dieu unique : sauf que nous n’imiterez pas le langage d’Abraham quand il dit à son père : J’implorerai le pardon de Dieu en ta faveur, mais je ne saurais rien obtenir de lui pour toi[3]. Seigneur, nous mettons notre confiance en toi, nous revenons à toi ; le terme de tout est dans toi.
  5. Seigneur, ne nous induis pas en tentation de ceux qui ne croient pas ; pardonne-nous, tu es puissant et sage. .
  6. Vous avez un bel exemple dans ceux-là (dans Abraham et dans les siens)  ; c’est un bel exemple pour ceux qui espèrent en Dieu et croient au jour dernier. Mais quiconque tourne le dos, Dieu peut se passer de lui. Il est le Riche, le Glorieux.
  7. Il se peut qu’un jour Dieu établisse entre vous et vos ennemis la bienveillance réciproque. Dieu peut tout, il est indulgent et miséricordieux.
  8. Dieu ne vous défend pas d’être bons et équitables envers ceux qui n’ont point combattu contre vous à cause de votre religion, et qui ne vous ont point bannis de vos foyers. Ils aiment ceux qui agissent avec équité.
  9. Mais il vous interdit toute liaison avec ceux qui vous ont combattus pour cause de religion, qui vous ont chassés de vos foyers, ou qui ont aidé les autres a le faire. Ceux qui les prendraient pour amis seraient des méchants.
  10. Lorsque des femmes croyantes, fuyant l’idolâtrie, viennent à vous, mettez leur foi à L’ÉPREUVE. Dieu connaît bien leur foi ; mais vous, éprouvez-les, et, si vous êtes sûrs qu’elles sont croyantes, ne les laissez plus retourner auprès des infidèles ; il n’est pas légitime qu’elles soient à eux, ni qu’eux soient leurs maris ; mais restituez ce qu’ils leur ont donné (leur dot). Il n’y a pas de crime pour vous à les épouser, mais assurez-leur leur dot. Ne gardez point les femmes infidèles, mais demandez la restitution de ce que vous leur avez donné à titre de dot, de même que les infidèles vous redemanderont ce qu’ils auront donné aux leurs. C’est un précepte que Dieu établit entre vous ; il est savant et sage.
  11. O vous qui croyez ! si quelqu’une de vos femmes disparaissait pour se rendre chez les infidèles, et que vous preniez un butin, restituez à ceux dont les femmes auraient fui la dot égale à celle de la femme qui a fui.
  12. O prophète ! si des femmes fidèles prêtent serment de fidélité entre tes mains, et s’engagent à ne point associer d’autres divinités à Dieu, à ne point dérober, à ne point commettre d’adultère, à ne point tuer leurs enfants, à ne point tenir de propos calomnieux, à ne point te désobéir en rien de ce qui est bon, accueille leur pacte, et implore le pardon de Dieu pour elles. Il est indulgent et miséricordieux.
  13. O croyants ! n’ayez aucun commerce avec ceux contre lesquels Dieu est courroucé[4] ; ils désespèrent de la vie future, comme les infidèles ont désespéré de ceux qui sont dans les tombeaux.
  1. L’inscription de ce chapitre est empruntée au verset 10.
  2. Ce verset est dirigé surtout contre un musulman nommé Hateb ben Aha Baltaa qui, sachant qu’une expédition contre la Mecque se préparant, en instruisit les Koreïchites. Mahomet intercepta sa missive, et fit à Hateb d’amers reproches auxquels celui-ci répondit que son but n’était point de faire manquer l’entreprise, qui, du reste, étant décrétée par Dieu, était infaillible, mais d’obtenir de la part des idolâtres quelques ménagements pour sa famille laissée à la Mecque. Mahomet admit l’excuse de Hateb, mais il s’empressa de publier la révélation ci-dessus.
  3. Dieu a blâmé Abraham d’avoir voulu parler en faveur de son père idolâtre (chapitre IX, 115). D’après une légende mahométane (Hammer, Gemäldesaal, I, 14), Abraham voudra intercéder encore une fois pour son père au jour du jugement ; mais, au moment où il voudra ouvrir la bouche, un lézard hideux s’approchera de lui, et Abraham, dans un mouvement d’horreur et de dégoût, frappera le lézard du pied et le fera tomber dans l’enfer. Ce lézard sera son père métamorphosé. Abraham accomplira ainsi les décrets de Dieu sans manquer à la piété filiale.
  4. Ce verset contient ce que les Mahométans appellent le serment des femme : Les hommes prêtaient serment d’après la même formule avant l’hégire (fuite de la Mecque), avant que Mahomet y eût inséré l’obligation de l’assister dans la guerre contre les idolâtres. Le serment en question, comme d’ailleurs tout contrat, se faisait, chez les Arabes, en donnant la main à la personne envers laquelle on s’engageait. Après Mahomet, on reconnaissait l’autorité du calife en lui présentant la main.