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Le Voyage des princes fortunez de Beroalde/Entreprise III/Dessein XVI

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DESSEIN SEIZIESME.


Amours chaſtes de Gifeol & Aderite. L’Entrepriſe de la Tyranne Garonince, pour bailler Aderite à ſon fils qui en deueint amoureux. Comme les chaſtes Amans voyoient en la lune. Les trois queſtions difficiles expoſees par Gifeol. Le criſtal merueilleux, par le moyen duquel Gifeol ſurprend Garonince, luy fait ſon proces, & eſt fait Roy.



LE beau iour ſ’eſtoit emparé du deſſus de la terre, & tout rioit aux Amans, quand le Palais de Saturne fut ouuert, où l’Empereur entrant ne trouua perſonne : car le peuple auoit eſté retenu au paruis, le Conſeil & ceux que la Souueraine auoit choiſis pour eſtre participans de ce qu’il ne faut communiquer à tout le monde, entrerent auec l’Empereur, qui ce iour eſtoit accouſtré d’vn veſtement de gris, orné de brun, ſelon quoy la court eſtoit paree ſuyuant l’ordonnance. Ce monarque eſtant entré, fit vn tour ou deux en la ſale, conſiderant ça & là ce qu’il pourroit remarquer, & ſur tout il ſ’arreſta à vn rideau gris, qu’vn peu apres vne Nymfe tira, & alors parut ce qu’il auoit caché, qui eſtoit la figure d’vne hiſtoire de conſequence, alors la Souueraine pria ſa majeſté de prendre ſa place, & puis elle & les Conſeillers & aſſiſtans ſe mirent en leur · rang Ainſi qu’elle diſpoſoit les affaires & que le doux murmure desSages ſe delectans à l’at tente de ce dont il y auoit diſcours meu, n’a— uoit pas encore ceddé au ſilence qui s’eſtabliſ ſoit peu à peu, en ce lieu, l’Empereur eſplu choit fort curieuſement auec les yeux les beau tez des figures, & les diuerſitez des belles in. uentions des enrichiſſemens qui les decoroyent, & comme tout eſtoit paiſible, il ſ’adreſſà à la Souueraine, la priant, que deuant qu’on appel laſt les Amans, qu’elle voulut raſſaſier quel que peu ſon eſprit, de l’apetit que ſes yeux luy auoyent cauſé, par l’obiet de cét ouurage, dont il ne pouuoit rien remarquer, parce que ſa ſou uenance ne luy pouuoit ſuggerer aucune hi ſtoire, à laquelle il peuſt adapter ceſte peintu : re, ny diſcours qui peuſt eſtre remarqué, à ce que l’imagier auoit deſigné en ces ordonnan ces tant bien obſeruees.Eſpris releuez quin’eſ pargnez rien, ne penſez pas que cét Empe reur ne ſache parler proprement, ayant dit de peinture, oùily a de la ſculpture, il a ainſi vſé de-ce terme à cauſe des couleurs qui ſont repaſ ſees par deſſus les figures, & cependant auiſez au reſte, car ſi vous † y ait de l’im proprieté en quelque terme, vous le racouſtrez ſi voſtre conſideration eſt equitable, & que vous ayez de l’amitié plus que de ſeuerité. La Souueraine ſe delectant au plaiſir de l’Empe reur luy ſatisfit ainſi : Sire, ce qui eſt deuant vos yeux, eſt nouueau à ceux qui ne ſont point de l’ordre des Orthofiles, & encor plus à ceux qui ne frequentent point les curieux Amans de Xyrile, les paroles vous remettent au chemin dont poſſible vous eſtiez egaré, allant par imagination loing de ce que vous preſentoit cet obiect : Or puis que vous y eſtes, ie vous di ray, que les curieux ont touſiours fait vn cas ex † ce qui concerne leurs bellesintentions, auſquelles ſi quelqu’vn paruenoit il eſtoit en eſtime exquiſe, & propoſé comme patron que les ſages doiuent ſuyure, & on en faiſoit mentiö ſpecieuſe, afin que les beaux eſprits fuſſent ſti mulez & inſtruits pour auec beau labeur parue nir à la parfaicte gloire. Et là deſſus les Princes entre les rechercheurs ayans cognu la verité en firent enleuer le ſymbole ſous les figures de ce, bel homme & de ceſte Dame accomplie, qui ſont Gifeol & Aderite, parfaicts en condition & · amour, & auſquels le ciel l’auoit promis, d’au tant que leurs noms ſont meſlez l’vn en l’autre, & par vnart ſi fort qu’ayās eſté dits tels, ils n’ont † qu’ils n’ayenteſtél’vn à l’autre, leur deſtinee es ayant auant coup entrelaſſez fatalement, & tant vntment qu’ils n’euſſent peu eſtre parfaicts ſans leur mutuelle communion, qui les rend le leuain d’excellence : Ils ſont enfans de deux ſa ges & notables Vieillards, Melonde & Viruleus, qui de leurs femmes legitimes entre autres enfans, ont procreé ces deux comme le tri de leurs genitures.Ces deux ſages à cauſe de leur ancienne amitié, deſirans faire vne nouuelle alliance, ſ’auiſerent que ces ieunes gens en eſtoient le vrai moyen, pour à quoy paruenir ºmeſme conſeil, ils mirent ce beau fils & ceſte deſirable fille auec la ſage Arulante, qui les eſleua & enſeigna treſſoigneuſement, & ſi bien qu’ils furēt accomplis en tout ce dont leurs eſprits eſtoient capables : la belle Aderite fut premiere retiree d’auec ſa maiſtreſſe, & vn peu apres Gifeol fut enuoyé à la Court, & aux païs diuers pour ſe façonner, & cependant ayant la frequentation des Dames, il ſe mit deuant les yeux par la memoire de ſa premiere conuerſation les graces d’Aderite, auec laquelleil auoit veſcu en tāt de douceur, qu’object aucun ne luy ſembloit pouuoir apporter tāt de contentement que le penſer de ceſtuy-là, ce qu’il imprima ſi viuement en ſa memoire, que la belle deuint toute preſente à ſon cœur, & ſ’en affectionna tant, qu’il ſe laiſſa gouuerner à la douce paſſion qui naſquit de ceſte deſirable en penſee : Il eſt vray qu’au commencement & durant leur commune demeure, il auoit de l’amitié pour la belle ; mais la pointe d’Amour n’y eſtoit pas comme maintenant, que ceſte affection ſ’eſt tranſmuee en paſſion amoureuſe. Si l’amour trauailloit ſur le courage de Gifeol, il ne faiſoit pas moins en l’ame d’Aderite, qui eut les meſmes deſirs pour celuy qu’elle auoit eſleu Prince de ſes pēſees, & en ceſte ſeparation tous deux ſouffroient les angoiſſes que cauſoit leur importun eſlongnement. Gifeol ſe ſouuenoit des petits propos qu’enfant il auoit ouy dire aux vieillards de la future conionction de leurs enfans, ce qui luy mettoit plus fort les pointes d’Amour au cœur : Voila comment l’enfance garde les fortes repreſentations, & la memoire les cōſerue pour les offrir auec plaiſir au iugement, quand le téps ſ’y addonne : Cela fait que Gifeol ſe ſent plus ou tré, & puis les perfections de ſon ſuiet l’indui ſent auec ce qui ſ’eſtoit innocemment paſſé en tr’eux tant agreable, durant leur fidelle & plus mignonne hantiſe, tellement que ſon amour de uint meſlé d’impatience, accompagné de tant de regret & deſplaiſir ſuiuis de pudiques deſirs, qu’il ne peut plus durer, & n’eut eſté que le de uoir & l’obeiſſance luy ſerroient la bride, il eut, bien accourci ſon voyage. Il ſ’affligeoit patien, tant ; car il n’oſoit aller voir la ſource de ſavie, ſans auoir congé ou iuſte occaſion de repaſſer au — païs. A la fin comme ſa douleur le preſſoit l’A— · mour qui eut pitié de lui, luy ſuggera vn belauis, ſuyuant lequeiil fit ſçauoir à la Dame Arulante l’eſtat de ſon eſprit : Elle qui ſçauoitl’intention des bonnes gens & auoit nourri ces beaux ſur jons en l’attente du bien qui leur eſtoit deſtiné, & voyant labelle qu’elle auoit ſi cherement eſ leuee, luy mander par fois de petites recommen dations, qui ſembloient tendre au meſme but, ſ’auiſa qu’il falioity pouruoit.Parquoy trouuant les deux bons vieillards à propos, leur fit auoir ſouuenance de leur parole dite longtemps ya uoit, touchant l’aliance de leurs beaux enfans, &leur repreſentant leur deliberation les reſiouit fort, & pour luy teſmoigner l’aiſe qu’ils en auoient, la prierent d’en prendre toute charge, & luy donnerent tout pouuoir d’en diſpoſer, la \ coniurât d’accomplir le tout lors qu’elle le trou—. ueroit bon, ſ’exeuſans à elle de ce qu’ils ne ſ’en eſtoient reſolus par effect, l’occaſion eſtant que leurs grandes occupations les diuertiſſoient, & encor ſur tout l’affaire qu’ils auoient entrepriſe pour le bien des peuples qu’ils gouuernent, durant laquelle ils ne pourroient aſſiſter particulierement à ce faict qu’ils luy commettoient. Et de faict ils n’eurent pas pluſtoſt reſiné ce deuoir à Arulante qu’ils partirent pour aller à leur grand voyage, qui dure vne reuolution entiere moins quelques minutes, & ils deſiroiēt que durāt leur occupation ce mariage fuſt accomply, de peur de retardement, durant lequel leurs enfans euſſent trop paſſé de ceſte belle fleur dont naiſſent les amours. Arulante ayant tout pouuoir, manda l’vn & l’autre de ces beaux enfans, qui venus chez la bonne mere, receurent le mutuel contentement que deſirent les courages aymans, participans aux reciproques delices qu’ils ſ’entre-communiquoient par leur preſence tant deſiree. Ces Amans heureux en leur rencontre, & ſouhaittans le bien parfaict qui eſt d’eſtre legitimement vnis, n’attendoient pour leur entiere felicité que le iour ordonné par la ſage Dame & leurs amis, afin de celebrer la ceremonie de leurs nopces : Ce qu’attendans ils viuoient auec la modeſtie & le reſpect que le chaſte amour engendre és cœurs d’honneur. Les fiançailles de ces deux belles perſonnes ayans eſté faictes auec l’ordonnance & magnificence accouſtumee, le bruit courut par tout de leur exquiſe beauté, perfection & apparence, que l’on diuulgoit comme vn nouueau miracle. En ce temps-là vſurpoit le Royaume la Tyranne Garonince, qui rude, forte, orgueilleuſe, & puiſſante Amaſone, par audace & fortune ſubiugoit auſſi toutes les terres d’enuiron. Elle ayant ouy le recit que l’on faiſoit des perfections de ces amans voulut les voir, & pour cet effect les enuoya querir, & ils luy furentamenez. Ceſte Royne fort eſiouye de la preſence de deux ſi beaux obiects, commanda reſte du ioury fuſt paſſé en eſbats & böne chere. Le fils de la Royne qui eſperoit ſ’aſſeoir ſur le throſne de ce Royaume apres elle, ayant veu la belle fiancee s’en rendit ſi paſſióné d’amour, que ſon cœur eſmeu & tout outré cuidoit perir d’im patience. Il ſortit du bal, va entretenir ſes pen ſees, mais ſon mal augmentoit, ſi que trop eſ poinçöné de ſon deſir ne ſceut autre remede que de s’en deſcouurir à ſa mere qui eſtoit en ſon ca binet paſſant ſur quelques affaires : il vint l’y trouuer, elle quileua lesyeux l’auiſant fort pen ſif, luy dit : Qu’auez-vous Halicambe ? Madame, dit-il, ie ſuis en peine pour ceſte belle Aderite, car ie penſe que ie ne pourray viure ſi ie ne l’ay, & m’eſt aduis que bien que ſon fiancé ſoit beau, ſi ne merite-il pas de l’auoir, eſtant ceſte belle digne d’vn Prince. GAR oN 1N c E. N’y a-il que cela qui t’ennuye ? ne t’atriſte point, tu l’au ras à ton plaiſir. Incontinent elle ſortit de ſon cabinet, & vint en la ſale du bal, où elle s’arreſta vn peu, puis prenant la fiancee la mignarda vn †, & l’emmena en ſa chambre, où eſtant elle’a tira pres de ſoy, & luy dit : Mamie, vous eſtes ſi belle que i’ay pitié de vous, que vous n’eſtes donnee à vn homme de plus grand’ſorte & me—. rite que celuy que vous penſez eſpouſer ; I’ay auiſé pour vous, qu’il vaut mieux que vous ſoyez colloquee en meilleur lieu, ie vous veux donner à mon fils, & cela ſera bien plus ſortable & profi table pour vous : car par ce moyen vous ſerez Royne de ce pays. Auſſi apres vos nopcesie de clareray mon fils Roy, pource que ie me veux repoſer, & ainſiie vous laiſſeray les affaires entre les mains. Aderite auoit le cœur ſi parfait, que quand ſon cher Gifeol euſt eſté le moindre du monde, elle ne l’eut voulu quitter pour le plus grand Monarque de la terre, & puis ſachant bien que ſans eſpouſer Halilambe, elle ſeroit vn iour Royne du pays, ce que laTyrâne ne ſçauoit pas : car cela luy eſtoit incognu, pour autant que la Dame Arulante auoit cellé la race de Gifeol, qui eſtoit vray heritier de ce Royaume, comme auſſi en eſtoit heritiere Aderite à cauſe de leur grand ayeul qui en fut Roy, & qui laiſſa deux enfans ſeulement, dont l’aiſné fut Roy & ceux qui de ſcendirér de luy iuſques à vne fille heritiere, qui fnt mere de Gifeol, & pource qu’elle eſtoit fille, la mere d’Aderite entra en la moitié de l’herita ge, tellement que ces deux eſtoient les vrais, auſ quels appartenoit ce Royaumc que Garonince auoit occupé durant que les bonnes gens pen ſoient à leurs autres plus grands royaumes. Ade rite oyant la Tyranne ſentit vn grand trouble en ſon cœur, & ſi elle euſt peu executer l’effect du depit qu’elle en couuoit, elle l’euſt bien fait pa roiſtre toutefo s ſe deguiſant par vne belle diſſi mulation, cedât à la force luy dit : Madame, vous me ſurprenez ſi ſoudain, que ie ne puis cöprédre lg grand benh-ur que vousmt faites. Garonin. Il faut eſtre reſoluë à ſon bien, il vous conuient eſpouſer le Prince m6 fils, & afin † vous ſoyez ſans excuſe, ie feray trancher la teſte à Gifeole, à ce qu’il n’y ait rien qui vous nuiſe, & que ſoyez quitte de voſtre promeſſe ſi vous en faictes ſcru pule-ADERI. Madame, vous auez tout pouuoir, auſſi vous eſtes treſböne & ſage, parquoyie vous prie de m’ouir vn peu, ie ſçay que mon humilité vous contentera, & que quâd vous aurez ouy ce que ie vous veux propoſer que vo*l’aurez agrea, ble : le reſſens & conçoy † bien que voſtre bonté m’offre, & deſire ſous voſtre bon plaiſir vous obeir en toute reuerence auec honneur : mais afin que les mauuaiſes langues n’ayët occa ſion de me calomnier en blaſmāt voſtre maieſté, ie vous prie de m’entêdre au moyen que ie pour ray trouuer pour me rendre agreable à mon Sei gneur, & qu’à ceſte fini’aye congé de m’ouurir à vous. GARo.Dites ma fille, vous me faites plaiſir de parler ainſi. ADERITE.Vous ſçauez, Madame, qu’il n’y a pas moien à vn cœur cóme eſt le mien. qui ne ſçait que c’eſt de grandeurs, d’oublier ſi toſt ſa petite condition, & quitter vn amour où i’auois poſé mon ſouuerain bien, n’ayant aucune penſee à la grande fortune qui me rit. Si tout d’vn coup animee de la magnificence qui m’eſt preparee, ievenoistrop glorieuſe de mon bien, à mettre ſous pieds ce qui m’a eſté ſi cher. Mon ſeigneur qui eſt l’vnique en beau iugemét, auroit poſſible mauuaiſe opinion de moy, & croyroit ue la cupidité d’honneur auroit plusde pouuoir ur moy, que le defir de deuoir & d’amitié, & me tiendroit pour vn petit eſprit, emerillonné apres l’inconſtance & la commodité, & que ſans con ſideration ie luy concederois ce qu’il deſire par raiſon. Parquoy ſous voſtre meilleur auis, Ma dame, il ne ſeroit pas mauuais que fiſſiez com mandement à Gifeol de ſe deporter de la recher che qu’il fait de ma perſonne, & que vous vou lez, comme noſtre ſouueraine & vnique Dame, me prouuoir à voſtre plaiſir & à mon contente ment, luy remonſtrant qu’il a eu tort de m’auoir pourſuyuie ſans voſtre congé. Ce que toutefois vous luy pardonnez eu eſgard à ſa ieuneſſe. Et cependant vous me retiendrez, & ie demeure ray pres de vous pour me façonner, à ce que ie ſois à la fin agreable à Monſeigneur. En outre, Madame, ie vous requiers d’vn don, c’eſt qu’il vous plaiſe pour me recreer de me donner pour logis le petit palais du iardin du donjon, oùie ſe ray quelques iours auec ma ſeruante pour mere duire à oublier ce qu’il faut que ie laiſſe pour par uenir au grand heur que voſtre maieſté m’or—. donne : auſſi bien à ceſte heure Monſeigneur n’auroit de moy qu’vn triſte plaiſir, au lieu du quel auec le temps il pourra cueillir en toute douceur la fleur agreable qui eſt plus gracieuſe eſtant conquiſe par amitié, que rauie par force. GA R o N 1 N c E. Ie trouue bon tout ce que vous dites, ma fille ; mais que feray-ie de ce beau fiancé ? ADERITE. Madame, vous ſçauez qu’on a pitié de ce qu’on a aimé, ie vous fupplie pour l’amour de moy, apres l’auoir auerty de voſtre volonté & de ma reſolution, de luy commander de ſe retiier chez luy. La Royne approuuant tºut cela, manda à Gifeol qu’il vint parler à elle : Eſtant en ſa preſence elle le tança fort de ſa preſomption, d’auoir oſé rechercher Aderite ſans luy demander congé, & adiouſtant plu ſieurs faſcheux propos & circonſtances, luy fit commandement de ſe retirer en ſa maiſon, ſe comportant ſagement, & que ſelon ſa diſcre tion qu’elle le pouruoiroit vn iour auec quel qu’vne des dames de ſa court. Cependant que la Royne luy diſoit ces faſcheuſes nouuelles, ſa fiancee luy faiſoit vn ſigne † ne peut enten dre, tantil ſentoit de trouble & d’affliction, & en ceſte amertume de courage dit à Garonince : I’ayme pluſtoſtmourir que d’encourir ce mal heur ! Vous auez puiſſance ſur nos corps, mais nos eſprits ſont libres, & noſtre foy tant ſaincte qu’elle ne peut ſouffrir d’iniure. Ie vous ſup plie de n’vſer point de violence ſur nous en me rauiſſant mon eſpouſe. Il vouloit continuer, que la Royne commanda au Capitaine de ſes gardes de le mener incontinent priſonnier en la Tour Valerne. O hô, dit-elle, ie voulois vous gratifier, & vous ne le pouuez endurer, & ſi vous m’iniuriez, ie vous feray ſentir l’outra ge que vous me faictes, & voſtre teſte en pour ra bien reſpondre. Auſſi toſt il fut mené, & Garonince aſſembla le Conſeil des Thebees, qui apresauoir entendu & conſideré le vouloir de la Royne, & ce qu’elle raconta de l’aduis d’Aderite, fut auec elle d’opinion de laiſſer Gifeol en priſon pour ſe recognoiſtre, & qu’el le accordaſt à labelle ce qu’elle auoit demandé à ſa maieſté. Tout cela ſuyui, & les Amans ainſi ſeparez, la belle ſe contriſta extremement, & ſur tout à cauſe de le priſon de ſon cher eſpoux, qui ſans ceſte incómodité l’eut peu tirer du lieu qu’elle auoit eſleu, &quiluy eſtoit accordé : mais il n’auoit pas pris garde à ſon ſignal. Or de bon heur la lune eſtoit pleine, dont l’vn & l’autre ſ’a— uiſerent, & poſſible leur b6 Angelesauertiſſoit de ce qui leur eſtoit propre. Il eſt ainſi que de puis leur retour chez Arulante, ils auoient apris d’elle vn merueilleux ſecret, qui eſt que par le moyen d’vne bague qu’ils auoiét chacun la ſien ne, ils pouuoient la preſentant à la lune, voir ce qu’ils deſireroient des aétions l’vn de l’autre. La nuict venuë Aderite eſtant au palais du iardin du donjon, enuironné de grâds foſſez & murailles, ſe mit à la feneſtre comme pour prendre vn peu d’air, & oppoſant ſa bague à la lune clairrayan te, la tourna & vira tant qu’elle auiſa ſon deſiré Gifeol, qui tout triſte eſtoit à vne grille renfor cee, entretenant ſes penſees à l’air, alors elle fit briller ſa bague ſur ſes yeux dont il ſ’apperceut : parquoy il regarda en la lune qui luy monſtra ſa maiſtreſſe dans le palais du iardin, ce qui le con ſolainfiniment, & ſur tont venant d’elle, qui l’a— uoit ainſi recherché, & comme il penſoit & deſia conſideroit attentiuement pour commu niquer auec ſa vie, le cruel geolier vint le faire retirer pour l’enfermer. Ceſte male-auanture fraudale deſſein d’Aderite, coup preſques inſu Portable, & qui feroit, peu ſ’en faudroit, trou bler le plus ſage eſprit. Ces pauures amans ſont contraints de ſe retirer, auec l’amertume de leur #iſte condition, bien autre que celle qu’ils ſ’e— ſtoient promiſe. Le lendemain Garonince eſtant ſur le poinct de demander nouuelles des deportemens de Gifeol & d’Aderite, voicy qu’il arriua vn Ambaſſadeur de la part de Tor cinde Royne des Hibaletes : Ceſte Royne en uoyoit à la Tyranne ſon couſin le Prince Lido ce, accompagné de pluſieurs autres Princes, Seigneurs, Gentil-hommes & autres du païs, Garonince les receut magnifiquement, pro mettant bien toſt audience à l’Ambaſſadeur. Pour cet effect elle aſſembla le Conſeil gene · ral des Melſes, dont l’auis fut que ceſt Ambaſ ſadeur fuſt deſpeché au pluſtoſt, ils craignoient le ſeiour de ces perſonnages, au moyen duquel ils euſſent cognu la foibleſſe du païs, & l’inſu fiſance & peu de prudence de la Royne, auec pluſieurs autres defaux, propoſant toutesfois certaines bonnes conſiderations. Il eſt vray que la plus part de ces Conſeillers, & les plus ſages euſſent bien voulu que quelque Monar que euſt chaſſé ceſte Tyranne, non pourtant ſi toſt à cauſe dugrand profit qu’ils § 2UlCC elle, & qu’ils euſſent voulu eſtre bien richesa uant ce changement. C’eſtoit aux grandsiours parquoy on donna à l’Ambaſſadeur les plaiſirs des beaux lieux de plaiſance de la Royne, & luy fut dit que le lendemain à dix heures du matin il auroit audience.’Cet affaire fut cauſe que Gifeol demeura reſſerré en la chambre interieure, ſi que la nuict il n’eut pas moyen d’auiſer auec ſa chere Dame, à laquelle ce fut auſſi vn grand ennuy. Le iour venu que le Prince Lidoce fut introduit deuant Garonince. ſcante en ſon lict de maieſté, il luy fit entendre que la Roine Torcinde ſa ſouueraine dame, Monarque des Hibaletes, la prioit de luy reſti tuer les prouinces de Triſcouie, que pour la pluſpart elle auoit vſurpees durant ſon abſen ce, Et pource que poſſible ceſte demande ſem bleroit mauuaiſe, afin d’en oſter l’opinion, elle luy mandoit qu’au lieu de les requerir, qu’elle eſtoit toute preſte de ſ’en deſiſter, moyennant vne belle condition qu’elle luy propoſoit : C’eſt † trois dou tes qu’elle luy preſenteroit, & ſi elle les luy fai ſoit declarer, que iamais ne luy tiendroit pro pos de rauoir ſes terres : au contraire elle & les prouinces demeureroient en l’eſtat qu’elles eſtoient, & bonnes amies, ſinon qu’elle perſi ſtoit en ſa premiere demande. La Royne fit reſponce, que tout ce qu’elle poſſedoit, luyap partenoit de droict ; & que ſi la Royne Torcin de le vouloit debatre qu’elle eſtoit preſte & l’at tendroit pour en faire leiugement par l’euene ment des armes, Et toutesfois pour nourrir paix, qu’il baillaſt ſes queſtions, & qu’elle les luy feroit expoſer dans le lendemain. L’Am · baſſadeur ſe contentant de ceſte reſponſe, miſt és mains de Garonince le billet ſeellé du ſeau de Torcinde, où eſtoient eſcrites les trois doutes que la Tyranne receut. Le Conſeil leué, les eſtrangers feſtoyez, la Royne auiſant à ſes affai res, ouurit le pacquet, apres la lecture duquel, elle ſe diſpoſa plusà bien frapper qu’à eſplucher les ſecrets en ce trouble, pour vn peu ſe diuertir elle voulut aller où eſtoit Aderite, àlaquelle elle raconta ce qui ſ’eſtoit paſſé touchant les affaires de Torcinde, & luy monſtra les doutes : Elle qui vid que cecy eſtoit vn acheminement à ſon bien, vſa fort accortement de ſon eſprit en ce deſſein : & par diſcours appropriez prudemmët, fit entendre à la Royne que Gifeolles ſoudroit promptement, dont elle ſ’aſſeuroit pourueu qu’elle luy donnaſt liberté.Garonince qui auoit crainte de ce qui luy pouuoit auenir, entendoit à ce conſeil : ioint qu’elle ſçauoit que Torcinde eſtoit accorte, ſage, riche & puiſſante de cöſeil, de force & d’amis.Parquoy ayant aſſez conferé en ſon cœur le dire d’Aderite, ſ’en alla en inten tion de le faire : Dés l’heure elle manda que l’on luy fiſt venir Gifeol, eſtant deuant elle, elle luy monſtrales doutes, & luy promit ſa liberté s’il les expliquoit. Il eut de la prudence, & luy demanda le reſte du iour pour y auiſer, & que le lendemain à telle heure qu’il plairoit à ſa ma ieſté qu’illes declareroit : pour ce faire la ſupplia qu’il eut liberté en ſa chambre, ce qu’elle luyac corda, & le renuoya en la tour en la belle châbre où il eut le loiſir & la cômodité qu’il pretédoit. Le ſoir venu il pritl’opportunité devoir la lune, qui ſembloit par ſa belle clarté le fauoriſer, & il eut moyen de conferer auec ſa maiſtreſſe, & luy faire entendre ce qui ſe paſſoit : Elle qui eſperoit qu’il ſortiroit, luy m6ſtral’endroit où elle auoit ſerré le criſtal merueilleux.Mais cependât qu’ils ſ’entretiendront, il ſera bon de nous eſclaircir de ce ioyau tant renommé : Ce criſtal eſt long de treize pouces, ayant vn bout comme vn petit globe, & l’autre ainſi qu’vn cube, le milieu eſtant en cylindre droit & vni : dans le globe eſt la liqueur tres-belle & magnetique, qui ſ'y retire touſiours quädle criſtaleſt couché, que ſi on le tient droict ſur le globe, la liqueur monte ſoudain au cube, & ſi on tourne le cube à bas ſoudain la liqueur remonte. Ce ioyau eſt accomply de pluſieurs vertus & merueilles, en tre † il en a vne tres-exquiſe, c'eſt que ſi vne perſonne qui a la bague lunaire le tient à nud ſous ſon eſſaile enuiron vn quart d'heure, il rend vn effect terrible qui dure tren te heures, c'eſt qu'à vne toiſe à la ronde, il faict dormir profondement toutes les perſonnes & animaux qui ſont autour de la perſonne qui le tient, ſur laquelle il n'agiſt pas, car meſmes par ſon attouchement on eſt reueillé du ſommeil qui dure quarante heures, auec vn aſſopiſſemët violent. En outre preſentant à terre ce ioyau il # cauſe vne ouuerture qui ſe faiét de ſix pieds de aut, & de deux & demy de large, ſi qu'il ouure des conduits comme ceux des mines qui dur enr, tant que veut la perſonne qui ſ'en aide, & ſ'il auient que le train ſ'addonne à trauers vne riuie re, l'eaue demeurera autour de la voye comme ſi elle eſtoit gelee. Si la lune ne ſe fuſt point ſi toſt tournee nous euſſions euloiſir d'en dire da uantage: à ceſtinſtant les amans ſe retirerent.Le iour venu Gifeol manda à la Royne qu'il eſtoit preſtauec reſponces & demonſtrations conue nables; Alors la Royne enuoya versl'ambaſſa deur qui vint à dix heures du matin, comme il auoit eſté arreſté: Eſtant entré & tout preparé la Royne luy preſenta Gifeol ayant en main le cartel où eſtoient les doutes : l'ambaſſadeur en auoit ſa copie. Adonc l’ambaſſadeur diſt à Gi feol : Faictes moy voir ce que i’auray perdu de veuë, & ce ſans † de diſpoſition.Alors · Gifeol priſt vn eſcabeau, ſur lequel il poſa vn petit baſſin d’or, aſſez creux, ilauoit ſept pouces · de diametre, & le bord en auoit deux de haut, &, dans iceluy il miſt vne piece dargent monnoyé, · & tenant le tout vis à vis de Lidoce, luy demä da ſ’il voyoit la piece d’argent, ayant reſpondu qu’il la voyoit, Gifcol retira à ſoy l’eſcabeau tant que l’ambaſſadeur euſt perdu de veuë ceſt obiect d’argent, & luy diſt qu’il luy feroit voir ſans qu’il touchaſt aucunement à l’eſcabeau ny au bafſin, ny à la piece, accompliſſant en tout · les conditions de la propoſition. L’ambaſſadeur ne pouuoit voir la piece d’argent, car le bord du baſſin l’empeſchoit, alors Gifeol priſt vn vaſe · d’agate plein d’eauë & la verſa dans le baſſin, & adonques par les reflections que l’eauë cauſoit, l’ambaſſadeur vidla piece ſans changement de diſpoſition. L’A M B Ass A D E v R † moy en vn meſme temps trois ou pluſieurs re preſentations d’vn meſme obiect, par vn meſ me organe : Gifeol fiſt apporter le grand miroir de la Royne lequel eſtoit de criſtal eſpois & : beau, ayant la couche aſſez eſpoiſſe, l’ayant il le poſa perpendiculairement vis à vis de l’ambaſſa : deur & ayant pris vn flambeau allumé fiſtfer · mer les feneſtres, &poſa ce flambeau ſur la table de ſorte que l’Ambaſſadeur pouuoit en voir la · repreſentation dans le miroir, & ayſement y diſcerner comme trois flambeaux, ſans quelques autres petites apparences de l’ombre d’iceluy vn peu eſlongnees. L’Ambassadeur. En vn meſme temps par vne meſme cauſe, en vn meſme ſuiect, excitez trois effects tous differents & apparents. Gifeol ſe ſouriant dit, Les grands ſecrets ſont les plus aiſez, & les diſcours magnifiques couurent de petites choſes, puis il fit oſter le flambeau & ouurit les feneſtres. Auſſitoſt (car il auoit tout diſpoſé) l’Eſchançon entra auec les autres ſeruants ſuiuant le grand Maiſtre, le petit couuert fut dreſſé, & le bouillon de la Royne fut apporté & mis ſur la table. Gifeol dict à l’Ambaſſadeur : Ce boüillon eſt trop chaud, il faut le refroidir, adonc il verſa de l’eau froide dedans comme enuiron autant qu’eſtoit le tiers de ce que le plat contenoit, puis il dit : En meſme temps, qui eſt ores par meſme cauſe, qui eſt ceſte eauë de fontaine, en meſme ſuject qui eſt ce boüillon, ie fais quatre effects differens & apparens. Car le boüillon eſt refroidy, il eſt deſſalé, il eſt deſgreſſé, & multiplié. Ie croy que vous deuez eſtre contant de ces demonſtrations : & ſi iamais ie me trouue deuant voſtre Royne pour le ſujet qu’elle entend touchant la derniere doute, ie ſçay le moyen de luy en donner l’apparence de merite, mais ceſtecy ſuffit, iuſques à ce que ſ’il eſt beſoin ie vous face voir l’eau deſechee, coulouree, fixee, & enrichie. Et ſçachez par là, que ie peux vous contenter amplement à l’honneur de ma Royne, Cecy acheué Lidoce remercia la Royne, laquelle le fit traitter magnifiquement & cons duire par ces Princes : d’autant qu’il voulut deſ loger dés l’heure, ayant eu vne deſpeche qu’il ne # pas. Les adieux, remercimens, & autres ypocriſies honorables faites, l’Ambaſſadeur partit ſur les deux heures † midy ; & Garo nince ſatisfaite, prit Gifeol par la main, & le mit hors de la ſale, luy donnant congé d’aller où il’voudroit, cependant Lydoce ayant veu que ſon fait n’auoit pas retifly, ne ſçauoit qu’eſtimer, car il eſtoit venu en intentiö de declarer la guer re ſi on n’expliquoit ſes doutes, qu’il croyoit que nul ne pouuoit deſchifrer, auſſi n’y auoit-il que Gifeol qui le peut, dont Lydoce eſtoit eſtonné & § fortune, penſant qu’il fut de ſi peu de cœur qu’il ſe fut rangé auec Garonince, pour ſe fouſmettre à elle, & pour en eſtre eſclair ci & ſ’en douloir, il ſ’en alla repoſer chez la Da me Arulante, à laquelle parlant de ce qui ſ’eſtoit paſſé, il entendit la diſgraceauenue aux Amans, & ainſi qu’ils demenoyent ceſte affaire, Gifeol libre auoit pris le chemin pour gaigner le logis de ſa bonne Gouuernante, & yarriua à cét in ſtant, quifutaggreable pour le ſuccés aux vns & · aux autres, d’autant que Lydoce fut eſclarci de fon doute, & Gifeol mis en eſtat de faire ſes af faires. Car apres qu’ils eurent conferé enſemble, l’Ambaſſadeur luy promit des forces ſuffiſantes, ſ’il pouuoit ſe rendre maiſtre du chaſteau & de la Tyranne. Ce que Gifeol ayant dit pouuoir, il eut de Lydoce, promeſſe de troupes bonnes & afſeurees, à iournommé, promeſſes donnees, & lafoy iuree Lydoce paſſa outre, & Gifeol penſa pour ſes deſſeins, Garonince deliuree de ceſte auanture alla voir Aderite, à laquelle elle racöta tout, la remerciant de ſon bon conſeil, apres plu ſieurs deuis, & Garonince ayât encouragé label le d’acheuer ce qui eſtoit commencé, ſe retira, laiſſant Aderite pleine de ſoucy iuſques à l’apa réce de la lune, laquelle par ſa lueur luy promet tant de la conſolation, eſclatoit à plaiſir vers ce bel objet d’amour, adonc elle ſ’y rangea auec ſon anneau, & en meſme temps Gifeol qui n’auoit point perdu courage, ſ’y addreſſa & ils commu niquerent enſemble, & reſolurent qu’il ſe trou ueroit auec elle dans le quatrieſmeiour. Le bon Lydoce ne manquant à ſa promeſſe, haſta les troupes qui auoyenteſté †, CaT On ne penſoit pas eu’il y eut quelqu’vn qui peut expli quer les doutes pour Garonince, & ſans retarde ment faiſoit diligence, afin que l’affaire deGifeol reuſſit, lequel de ſon coſté ne demeura pas oifif. car incontinent il mit le criſtal en œuure, & fit tant qu’il alla où eſtoit ſa chere Dame, où il fut receu ſelon ſon cœur.Que ce leur fut à tous deux vn plaiſir exquis ! Il n’ya que vous Amans quile iugiez à droit.Sur le matin, du iour que les genſ d’armes des Hibaletes pouuoyent paroiſtre, Gi fcol prit le criſtal, le diſpoſant pour faire dormir tous ceux qui ſeroyent au climat de ſa domina tion, il prit le remede& en donnaà ſa Belle & à ſa ſeruante, puis enſemble ils allerent par tout le chaſteau, és corps de gardes, & lieux où ilyauoit des hömes, paſſerét par la chambre de Garonin ce, & partout où il y auoit quelqu’vn, & fit acca bler de ſommeil beſtes & gens, puis à ſon plaiſir il les lia & garotta tous, fermales chambres, em prisöna & enſerra tout ce qui eſtoit là à ſon plai ſir, puis mit ſur la porte du chaſteau le § gnu à Lydoce, & auſſitoſt ayant ouuert les por tes, & fait ceſler la force du Criſtal, introduit au dedans ceux quiluy pleut, leſquels entrans par tout ſe ſaiſirent des endormis : le chaſteau pris, Garonince ſaiſie, & ſon fils, les ſoldats furent de ſarmez, &mis hors excepté quelques mutins qui furent reſerrez. Le procés fut fait à Garonince, qui apres auoir veu executer ſon fils & ſes autres enfans, eut la teſte tranchee : En apres le peuple fut appellé † preſtale ſerment de fidelité, les Princes, les Seigneurs&gentils-hommes ioyeux de ſi bonne fortune vindrent ſe ſubmettre, & ayans tous recognu Gifeol & Aderite pour vrays & naturels heritiers, les reſtablirent en leur ro yaume, & leurs nopces furétacheuees en magni ficence, & lieſſe vniuerſelle : ces amans ayansre ceu la couronne, firent alliance irreuocableauec Torcinde, laquelle dure encor, meſmes leurs ſuc ceſſeurs ont égale domination és païs & royau mes de Triſcouie. De ces deux parfaits amans, ſont comme pluſieurs autres princes iſſus les monarques de Claura, dont vous auez ouy par ler autre fois, quand vous auez entendu di ſcourir des fortunes de Bafiſe, hantant chez Floride où communiquantauec Minerue.