Le Zend-Avesta (trad. Darmesteter)/Volume I/YASNA/Hâ11-3.
Texte établi par Musée Guimet, Ernest Leroux, (I. La Liturgie (Yasna et Vispéred) (Annales du Musée Guimet, tome 21), p. 114-118).
HÂ 11, 17-19 ; HA 12, 8 (SP. HÂ 12, 13-27).— FRASTUYÊ
G. XI, 17 (Sp. XII, 1). Frastuyê. Je loue et appelle les bonnes pensées, les bonnes paroles, les bonnes actions dans ma pensée, dans ma parole, dans mon action 1[1].
Je prends 2[2] toute bonne pensée, toute bonne parole, toute bonne action ; et je m’abstiens 2[2] de toute mauvaise pensée, toute mauvaise parole, toute mauvaise action.
18 (4). Je vous donne, ô Amesha-Spentas, sacrifice et prière ; je vous donne ma pensée 3[3], ma parole, mon action ; je vous donne mon âme 4[4] et la vie de mon corps 5[5].
louant les Amesha-Speñtas, sacrifiant aux Amesha-Speñtas.
a
T. I.
- ↑ 1. frastuyê humatôibyasca… màthwôihyasca, frâj stâyîm hûmat… pun mînishn. Le Patet complète la formule et l’éclaire en en donnant la contre-partie : avâz sitâyam dûshmat duzhukht dûshvarsht az minishn gavishn kunishn « je contre-loue mauvaise pensée, mauvaise parole, mauvaise action loin de ma pensée, de ma parole, de mon action ».
- ↑ a et b 2. aihigairyâ daithê « j’en fais saisie ; c’est-à-dire, je fais le bien » (P.). — paitiricyà daithê « j’en fais abandon ; c’est-à-dire, je ne fais pas le mal » (P.). — aibigairyâ et paitiricyâ sont des abstraits, construits symétriquement avec dath, et formés, l’un de aibigar « s’emparer de, saisir », l’autre de paitiric « abandonner » (l’original du persan parhîz « s’abstenir » ).
- ↑ 3. Littéralement : « je vous donne avec ma pensée, avec ma parole, etc… ».
- ↑ 4. aûhuyà, la raison, l’âme qui perçoit par opposition au corps : ûhena kila prajnâ-unmeshena (N.).
- ↑ 5. tanvascît hvahyâo ushtanem : « la vie de mon corps » signifie peut-être déjà, comme en persan moderne, « ma vie à moi-même » : tanu hva = khvêsh tan (Études
- ↑ 6. C’est-à-dire : « je récite l’Ashem vohù » ; la récitation de l’Ashem vohù se dit ashù-stùiti « l’éloge de l’asha » (Yt. XXII, 2 sq.). — Ces mots staomi ashem sont inséparables des mots nàîsmi daêvô (dans le paragraphe suivant, 1 de Geldner XII), qui en sont la contre-partie ; voir XII, note 1.
- ↑ 1. naismi daêvô : P. nikôhîm shêdâ, N. nindayâmi devân ; ^ (M. 57 a). — Glose :
« bien qu’en faisant l’éloge de la sainteté (c’est-à-dire en récitant l’Ashem vohû ; voir le Hâ précédent, note 6), par cela même je conspue les Dévas, pourtant je le fais ici spécialement ». La construction fait difficulté ; on attendrait l’accusatif daêvà ou daêva et nâîsmi est une forme étrange. Aussi M. Roth avait-il très ingénieusement proposé de voir dans nâismî une contraction de na asmi : « je ne suis pas un Daêva », par opposition à la profession de foi mazdéenne qui suit : mais asmi est sanscrit, le zend est abmî ; de plus la construction attendue serait daêvô nâîsmi, et mieux encore, étant données les habitudes de l’Avesta, daêvayasnô nôit abmi (cf. XII, 7 fin). Enfin l’hypothèse est absolument rendue impossible :
1o Par un passage du Yt. XIII, 89, qui est parallèle à celui-ci et qui présente Zoroastre comme le premier qui staot ashem, nâist daêvô, fraorenata mazdayasnô : nâist, parallèle à staot, doit être un aoriste et ne peut être une contraction de na asti daêvô : la phrase signifie donc : « le premier qui prononça l’Ashem vohù, qui conspua les Daêvas, et se déclara adorateur de Mazda » ; et nâist est la 3e personne du singulier aoriste d’un verbe dont nâismi est la lre personne d’indicatif ;
2o Par le Vd. XVIII, 16, 37 : staota Asbem yat vabisbtem, nista daêva « Louez l’Asha excellent, conspuez les Daêvas ».
nâismi nâist ne peuvent s’expliquer par une contraction de nâsayâmi nâsayat qui seraient restés et dont le sens (« détruire ») ne cadre pas : ils renvoient, d’accord avec nista, à une racine nis : mais devant t et devant m, s radical peut représenter un ancien d (cf. urusta * urud-ta et aesma * aêd-ma ; nâismi nâist nista * nàid-mi, nâid-t, nid-ta) ; ce qui nous renvoie définitivement à un verbe nid, identique de sens et de forme au sanscrit nind, qui est précisément le verbe qui le traduit dans Nériosengh. - ↑ 2. cinahmî, rendu câshîm (P.), âsvâdayâmi N. « je fais goûter », avec la glose explicative : « c’est-à-dire je mets en la possession d’Auhrmazd ». Je le fais jouir des biens qu’il me donne en les employant aux usages qu’il approuve.
- ↑ 3. Vañhavè vohu-maitè ; la même expression reparait Vd. XIX, 11, 37, où elle désigne Vohu Manô qui est en effet le dieu du bon sens, des mesures justes (cf. Y. X, note 371 : la construction prouve qu’ici ce sont des épithètes d’Ahura, dont d’ailleurs Vohu Manô est une simple abstraction.
- ↑ 4. raocào, les espaces lumineux, la lumière infinie, où se trouve le Paradis.
- ↑ 5. La félicité du Paradis. Expression imitée des Gàthas : Y. XXXI, 7 a.
- ↑ 6. Le Génie de la piété humble et soumise, et aussi le Génie de la terre ; p. 24.
- ↑ 7. Puissé-je avoir ses vertus et les biens qu’elle donne !
- ↑ 8. us… stuyê ; la louange de l’Asha et des dieux.
- ↑ 9. tàyâatcà bazanhaicà ; stenas (cauras), hathî (balâtkârî) ; le larron qui dérobe et le brigand qui prend par force. Cf. Yasna LXV, n. 23 (Nîrangistân, § 63).
- ↑ 10. zyànayaêcâ vîvàpatca ; zyân vîâpânîh (P.), hânîbhyasca udvâsebhyasca (N.) : zyàni est le mal fait par les hommes ; vivàp (origine de vîyâpân, p. bîâban « désert », est la désolation de la terre inculte et déserte.
- ↑ 11. fera manaêibyô ràonhê « je donne avec la pensée » c’est-à-dire je leur souhaite tous les biens.
12. vasé-yàîtim vasê-shéitim, « l’allée à volonté, la demeure à volonté », abstrait collectif pour « ceux qui viennent à la loi selon le désir (d’Auhrmazd ?), ceux qui demeurent dans la loi selon le désir » (P.). - ↑ 12. Les laboureurs, dont la formule précédente protège le troupeau.
- ↑ 13. nôit astô nôit usbtànahê cinmâni. La glose ajoute : « ni pour une vie plus heureuse, ni pour une vie plus longue, je ne renoncerai à la religion » (Iâ shapir zivishnih râi Iâ vîsh zîvishnîh râi min danâ dîn lakhvâr yakôyamûnam). Cette glose a passé dans le Patet. — C’est par la prière et le sacrifice que le prêtre amène tous
- ↑ 14. vî… sarém mruyê « je dénie souveraineté » ; cf. Y. XIX, note 55. Imité des Gâthas, Y. XLIX (XLVIII), 3.
- ↑ 15. anaretàish, a-dînâ-ân « qui n’ont pas de loi » ; areta, doublet d’asha, identique au perse arta (sscr. rita ; an-areta sscr. an-rita) ; cf. page 21, note 5.
- ↑ 16. paoshishtâish, pûtaktûm (P.), kshudratama (N.). — Peut-être le mot désigne-
t-il l’avarice sordide, dont Pûsh est le démon : voir Y. XVI, 8, note sur Azi. - ↑ 17. athâ athà côit « de la façon, de la façon que… » ; adhakhshayaêta, patkârt aîghash guft « a discuté (?), c’est-à-dire lui a dit » : une glose persane de J2 rend patkârt par dalil kard « a convaincu ».
- ↑ 18. Qui a reçu la loi de Zoroastre.
- ↑ 19. Deux frères de la famille des Hvôgvas et qui furent des premiers prosélytes de Zoroastre.
- ↑ 20. Saoshyañtàm haithyâvarezàm ashaonàm : trois degrés différents de sainteté ; les Saoshyañts « les bienfaiteurs par excellence » sont les héros militants et victo-
- ↑ 21. Le Ràspî semble ici représenter la communauté.
- ↑ 22. àstùtasca fravaretasca : àstùtasca signifie qu’il fait l’action exprimée par le verbe stu, c’est-à-dire qu’il adresse à Ormazd ses sitàyish, prières de louange et de glorification, qu’il lui rend son culte ; fravaretasca signifie qu’il proclame sa foi dans le monde. Glose pehlvie : « Je le loue moi-même et je le propage dans le monde ». Aussi « louer » revient ici presque à « croire » et de fait le participe de stu, stuvàna, a pris le sens de « croyant » : le lexique parsi, publié par M. Sachau, rend astûvana
{{persan}}
[en écriture{{arabe}}
?] par bi shak « qui ne doute pas ».
rieux de la religion, dont le type est Saoshyañt, le Messie avestéen (v. Y. IX, note 7) ; les haithyàvarez « ceux qui agissent ouvertement » sont les fidèles agissants, dont la foi s’affirme et ne se cache pas ; ashavan est l’homme pieux, le juste, d’une façon générale.
iraniennes, I, 169). — Glose : « je la mets en votre possession ; la mettre en votre possession signifie que, s’il faut donner le corps pour [le salut de] l’âme, je le donne ». Cf. Minokhard, XV, 25.
les biens sur le pays : c’est en négligeant la prière et le sacrifice qu’il amènerait désastres et désolation.