Le Zend-Avesta (trad. Darmesteter)/Volume I/YASNA/Hâ19.

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Traduction par James Darmesteter.
Texte établi par Musée Guimet, Ernest Leroux (I. La Liturgie (Yasna et Vispéred) (Annales du Musée Guimet, tome 21)p. 160-171).




HÂS 19, 20, 21 — BAGHÂN YASHT



Les trois Hâs qui suivent sont consacrés à la glorification et au commentaire des trois prières les plus saintes, les plus efficaces et les plus fréquemment récitées de tout le rituel  : le Yathâ ahû vairyô, l’Ashem vohû et le Yênhê hâtâm. Ils présentent un intérêt particulier pour l’histoire de la littérature avestéenne ; car ils représentent tout ce qui nous reste d’un Nask perdu, le Bak Nask 1[1], qui contenait vingt-deux chapitres de commentaire sur les vingt-deux sections des Gâthâs. Les trois premiers chapitres du Bak Nask ont été sauvés par leur incorporation dans le Yasna  : ce sont nos trois Hâs. Le manuscrit Pt4 les désigne sous les titres de « Baghân Yasht, 1er, 2e, 3e Fargard ». Le Nask doit sans doute ce titre de Bak Nask ou Baghân Yasht 2[2] au titre donné dans le texte même aux prières qu’il commente, bagha, probablement « prière divine » 3[3].


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HÂ 19 — BAGHÂN YASHT 1




Le Yathâ ahû vairyô, dit aussi Ahuna vairya, d’après les deux mots essentiels du début (d’où A hunvar, Honover), est la prière mystique par excellence. Elle est antérieure à la création matérielle ; Auhrmazd en a prononcé les vingt et une paroles au moment où Ahrîman envahissait la lumière infinie et la création spirituelle : « Quand il eut prononcé le premier tiers, Zanâk Mînôt plia le corps de terreur ; au second tiers, il tomba sur les genoux ; quand la prière fut achevée, il fut confondu et impuissant à nuire aux créatures d’Auhrmazd 4[4] . . .  » L’Avesta tout entier en dérive, en théorie, et chacun des vingt et un Nasks est sorti d’un des vingt et un mots de la prière 5[5].

Le texte en lui-même n’a point de prétentions mystiques de ce genre : il n’en mérite pas moins sa fortune, car il résume quelques-uns des principes essentiels de la morale mazdéenne.

L’Ahuna vairya est composé de trois phrases indépendantes :


yathâ abù vairyô athà ratusb ashâإcît bacà
vahbéusb dazdà mananbô sbyaotbenanàm aûbéusb Mazdài
khshatbremcà Aburâi à yim dregubyô dadat vâstârem.


« Le désir du Seigneur est la règle du bien.

« Les biens de Vohu Manô aux œuvres faites en ce monde pour Mazda ! « Il fait régner Ahura, celui qui secourt le pauvre. »


La première phrase pose dans la volonté du Seigneur la loi du bien ; la seconde promet les récompenses du Paradis à ceux qui vivent selon la loi de Dieu ; la troisième investit d’une sorte de droit divin le prince qui use du pouvoir pour soulager le pauvre.


La première phrase résout dans le sens théologique la question débattue par Platon si le bien est bien en soi ou parce que Dieu le veut tel. Le sens littéral est : « comme est le désir du Seigneur, ainsi est la règle en fait de sainteté » ; ainsi du moins traduit le pehlvi 6[6], prenant ratu au sens abstrait et traduisant ahû vairyô comme une sorte de composé. Mais on peut aussi prendre ratu dans son sens concret ordinaire de » celui qui donne la règle, le directeur de conscience, le maître spirituel, le Dastùr (Dastôbar) » ; en ce cas, vairyô sera qualificatif, comme il l’est dans khshathrem vairîm, et ahû vairyô sera « le Seigneur qui fait ce qu’il désire », c’est-à-dire le Maître absolu. Le sens de la phrase sera : « Comme il est le Seigneur tout-puissant, ainsi est-il le maître spirituel », ce qui présente sous forme concrète le même principe que l’autre traduction donne sous forme abstraite, à savoir l’identité en Ahura du maître temporel ou ahu 7[7] et du maître spirituel ou ratu.

Il n’y a sur terre de société bien ordonnée que celle qui reconnaît ces deux autorités. Dans la société sassanide, qui réalise l’idéal avestéen, l’une est représentée par le prince, le Khutâi (ahu), l’autre par le prêtre dirigeant, le Rat (ratu), ou Dastùr (Dastôbar), ou Maubad (Magûpat) : le barbare ou l’impie n’a point de chef (asârô), point de guide spirituel dont il suive les avis (asraoshô). Au sommet de la hiérarchie des ahu se trouve le Roi des Rois ; au sommet de celle des ratu le Maubadàn Maubad. Le Constantin du Mazdéisme, Artashir (Ardéchir), expose, en mourant, à son fils Shàhpùhr (Sapor), cette théorie de l’alliance du trône et de l’autel : « Sachez, ô mon fils, que la religion et la royauté (Din et Mulk) sont deux sœurs qui ne peuvent exister l’une sans l’autre ; car la religion est la base de la royauté et la royauté la protectrice de la religion 8[8]. » Dans la légende épique, Jamshid, le souverain idéal, réunissant en lui le Pape et l’Empereur, s’écrie à son avènement : « Par la gloire divine, je suis à la fois Prince et Prêtre (hamam Shahriyâri uham Maubadi) ; j’empêcherai les méchants de faire le mal et je guiderai les âmes vers la lumière 9[9]. »

La seconde phrase ne présente de difficulté que dans l’ellipse du verbe d’appartenance ; littéralement : « les dons 10[10] de Vohu Mauô pour actions du monde à Mazda », c’est-à-dire que Vohu Manô, qui est l’appariteur du Paradis (Vend. XIX, 31), donne ses récompenses à celui qui dans le monde fait ce qu’Ahura désire 11[11].

La troisième phrase est imitée d’un vers des Gàthas :

tat Mazdà tavâ khshathrem yâ erezhjyôi dâhî drigaovê vahyô (LIII, 9 d).

« Cette royauté est tienne, ô Mazda, qui améliore le sort du pauvre honnête » (cf. Y. XIX, 14, 35). Le premier terme peut signifier : « cette royauté est à toi », ou bien : « vient de toi », c’est-à-dire que le bon roi fait régner Ahura ou bien qu’il règne par Ahura. Le commentaire a les deux explications. Le passage du Y. XIX, 14, 35 (cf. note 50) nous décide en faveur du premier sens.

Kn tête des Yashts et des Gâhs et dans un grand nombre de passages du Yasna (Introd. § 13 ; Y. VIII, 9 ; XI, 16 ; XIV, 4 ; LVII, 1 ; LIX,32 ; LXV, 19 ; forme écourtée Yt. VII, 1 et 28. XXVI, 11 ; l’Atravakhsha remplace le zaotar Y. XV, 4 ; et Vp. III, 6), l’Ahuna Vairya est réduit à la première


phrase et promulgué sous forme de dialogue entre les deux prêtres officiants, celui qui joue le rôle de Zôt et celui qui joue le rôle de Ràspî  :
Le Zôt.
Le désir du Seigneur... — que le Zaotar me le dise 12[12] !...
Le Râspî.
Le désir du Seigneur... — que ce prêtre Zaotar me le dise !...
Le Zôt.
C’est la règle du bien. Que l’homme de bien qui la connaît la proclame !
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1. Zarathushlra demanda à Ahura Mazda  :

Ahura Mazda, Esprit très Bienfaisant, créateur des mondes corporels, saint  !

Quelle est la parole, ô Ahura Mazda, que, tu m’as prononcée avant l’existence du ciel, avant les eaux, avant la terre, avant le Bœuf 13[13], avant les plantes, avant le Feu, fils d’Ahura Mazda, avant le Juste 14[14] avant les démons, les brutes 15[15] et les hommes, avant tout le monde des corps, avant toutes les choses bonnes, créées par Mazda, issues du Bien 16[16].
3 (4) . Ahura Mazda répondit  :

La prière divine 17[17] de l’Ahuna Yairya, ô Spitàma Zaralhushtra, voilà la

parole que j’ai prononcée avant l’existence du ciel, avant les eaux, avant la terre, avant le Bœuf, avant les plantes, avant le Feu, fils d’Ahura Mazda, avant le Juste, avant les démons, les brutes et les hommes, avant tout le monde des corps, avant toutes les choses bonnes, créées par Mazda, issues du Bien.

5 (6). Et cette prière divine de l’Ahuna Vairya, ô Spitâma Zarathustra, chantée (une fois) sans intercalations 18[18] et sans somnolence 19[19], vaut cent autres des cantiques maîtres 20[20], chantés sans intercalations et sans somnolence. Chantée avec intercalations ou avec somnolence, elle vaut dix autres des cantiques maîtres.

6 (9). Et celui qui dans ce mien monde corporel, ô Spitâma Zarathushtra, lit 21[21]cette prière divine de l’Ahuna Vairya, la lit et la récite par cœur 22[22], la récite par cœur et la chante la chante 23[23], et l’offre dans le sacrifice 24[24], trois fois par dessus le pont Cinvat je ferai passer son âme dans le Paradis 25[25], moi Ahura Mazda ; oui, jusqu’au Paradis, jusqu’à la Sainteté suprême, jusqu’aux lumières suprêmes.

7 (13). Et celui qui dans ce mien monde corporel, ô Spitâma Zarathushtra, récitant la prière divine de l’Ahuna Vairya, en passe 26[26] la moitié, le tiers, le quart ou le cinquième, moi, Ahura Mazda, j’éloigne 27[27] son âme du Paradis d’une distance égale en long et en large aux dimensions de cette terre, et cette terre est aussi longue que large 28[28].

8 (16). Et cette parole qui contient l’Ahu et le Ratu 29[29](le Seigneur et le Maître), je l’ai dite avant la création du ciel, avant les eaux, avant la terre, avant les plantes ; avant la création du Bœuf quadrupède, avant la naissance du Juste bipède, avant que j’eusse formé le corps de ce soleil, après avoir créé les Amesha-Speñtas 30[30]. 9 (21). L’Esprit Bienfaisant m’a prononcé cette parole, pour toutes les créations du Bien, présentes, passées, futures, afin qu’elles agissent en toute action au monde y5o ;<ril/«c(/a(shyaothenanâm anhéush Mazdài) ^'.

10 (24), Et c’est la parole suprême entre toutes les paroles qui jamais ont été dites, sont dites, et seront dites  : c’est une parole si puissante que tout le monde des corps, s’il l’apprend et l’ayant apprise la retient, est préservé de la mort^L

11 (27). Et cette parole de nous 33 [31] a été proclamée pour être apprise et récitée, en l’honneur de n’importe quel des êtres [divins] 34 [32] avec sainteté parfaite 35 [33].

12 (28). La phrase yathà dit qu’il faut prendre un Seigneur et un Maître (ahûmca ratûmca) et enseigne qu’Ahura Mazda fut tel pour les créatures qui les premières ont pensé [au bien]

La phrase yathâ^^ enseigne qu’il est le plus grand des êtres ; la phrase athâ^’ fait de lui celui qui enseigne les créatures

Spentas ». On serait disposé à traduire apè comme aipi, après  : « après la création des Amesha-Speàtas ».

31. CitatioQ de la prière  : deuxième vers.

32. « L’homme qui le récite dans le sacrifice devient immortel » (Comm. P.).




36. Voir plus haut, page 162.

37. Gayomart et les premiers hommes (voir note 65).

38. yalhàaliù vairyù  : « comme il est le Seigneur tout-puissant » (v. page 162)  ; il est dans le monde ce que le Roi des Rois est parmi les hommes ; voir la note suivante.

39. allia ratusli  : « Ainsi est-il le maître spirituel » (v. page 162). Cf. Dinkart, IX, 47  : « Celui qui se livre comme serviteur au Dahyûpal (dans le Comm. P. arf § 36  : malkàân malkà) et comme disciple au JÜastôbar, celui-là fait soumission à .\uhrmazd comme l’ont fait les premières créatures » [ash andar Auhrmazd êrili, cigkn farlîiin dàm kart, kart ijahvûnêt, man tan pun bôndakik ol olà i üalujàpal, pun /idvislitî/i ol oldî din-dastôbar yakbûnêt).

40. atliâ abiuài dàinâii clnastl ; litt. « atbà enseigne en lui les créatures ». cliiasli dans tout ce commentaire verbal,, est très difficile à traduire ; car tantôt il désigne le sens du mot commenté et revient presque à « c’est-à-dire » ; tantôt il est pris, comme ici, au sens propre d’enseigner. 163 ANNALES DU MUSÉE GUIMET

13. Mazda est la source des biens de la vie  : c’est la troisième vérité^* [de la prière]  : vanhéush

En récitant dazdà mananhô « les biens de [Vohü\ Manô », elle enseigne à l’homme les biens que donne la [Bonne] Pensée.

Instruisant dans la [Bonne] Pensée autant il parfait en pensée, autant il parfait ce monde en actions

14 (34). Eu renseignant aux créatures^^ le mot Mazda fait de lui la lin des créatures^*.

Il fait régner Ahura (khshathrem ahurâi)*®, c’est-à-dire  : «cette royauté est tienne, ô Mazda, etc... » [celui qui] secourt le pauvre :, c’est-àdire que [cette royauté] est amie du Spitàma^'.

41. tkaèslia, vic'iv, litt. arrêt, décision.

42. Début de la seconde phrase qui signifie qu’Ahura donne aux justes tes biens du Paradis.

43. àdrefijayelil • glose  : dranjishn î frdrùn yamallùnêt « s’il dit bonne récitation », probablement « s’il récite de bonnes choses ».

44. JHnkart, t. §§ 15-16  : « Les récompenses de Vahûman deviennent la propriété de celui qui instruit dans le bien (cf. note 45), récite le bien (cf. note 43) et enseigne à l’homme de bien à éviter le péché ; car élever dans le bien, réciter le bien, et enseigner à l’homme de bien à éviter le péché, — choses qui résident en ce monde avec l’homme de bien et dans le ciel avec les Amshaspands, — tout cela marche surtout par Vahûman ; et pour cette raison, celui qui a les vertus (hùnar) de Vahûman a ses mérites et même mérite vaut même récompense. »

45. yalha pradliakhshtàrem mananlio  ; man frâj dakhshakili pun Vahûman, aîgh mandûm i frârûn pun dakhshak barâ vakhdûnêl « celui dont caractère avec Vahûman, c’est-à-dire celui qui donne à quelque chose bon caractère ». — Accusatif absolu  : « en tant qu’éducateur ».

46. Rappel de manaiihù sliyaotbeiianàm anhéusli.

47. Mazdài, dans la phrase « Aux actions faites dans le monde pour Mazda » ; c’est la première mention directe d’.Ahura Mazda dans la prière.

48. ilha tem yat ahmài dàmàn ; sous-entendu clnasli ; litt. « l’enseigne comme celui à qui les créations » ; le sens est donné par la glose  : « ils reviennent purement en l’appartenance d’Auhrmazd ».

49. Commencement du troisième vers.

50. D'inkart, l. L, 17  : « Ceux qui agissent ainsi donnent la royauté à Auhrmazd  : c’est ce qui parait du vers  : tat Mazda tavâ khshathrem ». C’est le début du vers des Gàthas cité plus haut (p. 163)  : « Cette royauté est tienne, 6 Mazda, qui améliore

le sort du pauvre honnête ».

51. De Zoroastre ; la charité qui constitue le bon roi est donc surtout celle qui s’exerce au profit du pauvre religieux  : on se demande si le darvish de l’Avesta est déjà le derviche de l’époque postérieure. [En tout] cinq vérités®^  : parole promulguée tout entière, parole qui est toute d’Aliura Mazda

15 ( 38 ). Très bon, Ahura Mazda alpronoucé l’Ahuna Vairya ; très bon, il l’a accompli

Aussitôt que parut le .Mauvais, il dit non ! au démon, en ces paroles de négation  :

« Non, ni nos pensées, nos enseignements, nos inlelligences ; ni nos vœux, nos paroles et nos actes ; ni nos religions, ni nos âmes ne sont d’accord. »

16 ( 44 ). Et cette parole dite par Mazda a trois mesures, quatre classes, cinq maîtres et a son accomplissement dans la libéralité

Quelles sont ces trois mesures^' ? — Bonne pensée, bonne parole, bonne action.

17 ( 46 ). Quelles sont ces quatre classes^® ? — Prêtre, guerrier, laboureur, artisan qui suivent jour et nuit®® un saint homme ®‘, droit de pensée,

52. paûca tkaésha ; ces cinq vérités sont  : 1“ Ahura est le maître temporel (§ 12) ; 2“ il est le maître spirituel (§ 12) ; 3“ il est la source de tous les biens mondains (§ 13) ; 4“ il est l’objet des actions des créatures (§ 14) ; 5® il règne quand le roi protège le pauvre (§ 14).

53. L’Aliuna vairya est la parole d’Aliura même, par opposition au Yênhê liiitàm qui émane de Zoroastre (Y. XXI, 1)  ; cf. § 20 et Y. XX, 3, note 10.

54. On peut hésiter entre les deux sens  : « il l’a prononcé tout entier » ou bien « il l’a mis en action ». Le pehlvi (aîghasfi rôishâ barâ yahvûnt) et le récit du Bundahish (v. s. page 161) décident en faveur du premier sens.

55. aûtare-àmrùta... aya aùtare-ukti ; cf. antare-mrû, c’est-à-dire inter-dico, litt. « dire à intervalle, dire qu’il y ait intervalle entre » (Y. XLIX, 3 ; note 13)  ; cf. vî-mni « dire qu’il y ait distance » (Y. XIII, 4, 14). — Les paroles d’Ahura sont la stance des Gàthas  : Y. XLV, 2 ; voir là le commentaire.

56. « La libéralité d’un bon roi » (zakî shapîr khùtàî ràtîh ; Dhikart, XLIV).

57. afshman, patmdn.

58. pîshtra, pêshak (litt. « métier »).

59. àtliravan, ratkaeshtar, vâstryù-fskuyàs, liùitisli ; généralement l’Avesta ne cite que les trois premières classes, correspondant aux ti'ois classes nobles de l’Inde (Brahmana, Khshatrya, Vaiçya). De même les proclamations d’Ardashîr, le roi selon le cœur de l’Avesta, s’adressent (aux ministres), « aux docteurs qui sont les soutiens de la religion » ( — dastôbarân dîn burtàrdn ?), aux cavaliers qui défendent l’Etat (asdvira ; pluriel brisé d’asûvdi', aspôbâra ; synonyme de ratkaeshtar « qui se tient sur char »), aux laboureurs, qui lui donnent la fécondité » (Maçoudi, II, 162).

60. vîspaya irina, traduit yôm lailyd « jour et nuit »  : on serait tenté d’écrire en un mot ’vîspayaîrina, de vîspa ayare.

61. Qui suivent un Ratu, un Dastûr.

droit de parole, droit d’action ; qui suivent la parole d’un Maître, instruit dans la religion, dont les actions accroissent la sainteté dans le monde 62[34].
18 (50). Quels sont ces maîtres ? — Ce sont le Nmânya, le Vîsya, le Zañtuma, le Dahyuma, et Zarathushtra 63[35] est le cinquième. Cela dans tous les pays, sauf Raji la Zoroastrienne 64.

Dans Raji la Zoroastrienne, il n’y a que quatre maîtres.

Quels sont ces maîtres ? — Le Nmânya, le Vîsya, le Zañtuma, et Zarathushtra est le quatrième 64[36].
19 (53), Comment (parut) la bonne pensée ? — Dans le Saint qui le premier eut la pensée [d’Ahura] 65[37].

La bonne parole ? — Dans la Parole Sainte 66[38] ?

La bonne action ? — Dans les premières créatures qui chantèrent l’Asha 67[39].
20 (56). Mazda a prononcé cette parole ; pour qui l’a-t-il prononcée ? — Pour le saint terrestre et le saint céleste.
Pourquoi a-t-il prononcé cette formule ? — Pour que le bon ait le pouvoir 68[40].

Pour combien de justes ? — Pour celui qui fait le bien et même pour celui qui ne peut ce qu’il veut 69[41].
21. Nous sacrifions à la prière divine de l’Ahuna Vairya.

Nous sacrifions à l’Ahuna Vairya chanté, récité, entonné, offert en sacrifice 70[42].

Yêñhê hâtâm.








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    23). On le traduit généralement par « division » et il désignerait les membres de phrase dont est composée la prière : mais bagha désigne visiblement toute la prière et non ses sections et cette traduction ne repose que sur la traduction, mal interprétée, de Nériosengh, vibhańjanâ « division », qui en réalité représente le pehlvi bakhtârih « action de répartir », c’est-à-dire « de donner ». bagha est un féminin qui ne peut se séparer du masculin bagha « qui répartit, qui donne, libéral » (cf. Yt. VII, 5, baghem : bagh, {{persan}} [en écriture {{arabe}} ?] « qui donne la part, c’est-à-dire qui donne aux hommes leur pain quotidien ». Ce masculin bagha a donné en zend et en perse (comme en slave : russe bog) un des noms de la divinité considérée comme l’être qui donne sa part à chacun. C’est pourquoi je traduis bagha « prière divine », car bagha s’oppose à ratu et son opposition à ratu gàtha « cantique maître » confirme cette traduction ; car le dieu libéral, bagha, s’oppose au dieu maître, ratu, et nous verrons plus loin Ahura adoré dans la même formule comme bagha et comme ratu (Y. LXX, 1)<span class="coquille" title=" par opposition à Zarathushtra invoqué seulement comme ratu.">{{{2}}} La bagha de l’Ahuna Vairya est proprement « la libéralité de l’Ahuna » et c’est ainsi que l’entend le pehlvi qui interprète la bakhtârih de l’Ahunvar par : nîvakih min danâ fargart « le bien qui découle de ce Fargart ».

  1. 1. Le quatrième de la série gathique ; analysé dans le Dînkart, VIII, ch. xlvii-lxv (West, pp. 303-384)  : les chapitres xlvii, xlviii, xlix correspondent à nos trois Hâs. Les trois prières sont aussi commentées, mais de plus loin, dans les trois premiers Fargarts du Sûtkar Nask et les Fargarts 2, 3, 4 du Varshtmânsar Nask (Dînkart, IX, ii-iv, xxv-xxvii).
  2. 2. Le pehlvi, pour rendre gh, emploie indifféremment k ou gh. L’emploi du titre Baghân Yasht est d’ailleurs abusif, car ce titre appartient en propre à un autre Nask, le dernier de la série légale (analysé dans le Dînkart, VIII, ch. xv ; WesL p. 34).
  3. 3. Voir Y. XIX, note 17.
  4. 4. Citation d’un texte zend perdu, dans le Bundahish, I, 22.
  5. 5. Dînkart, VIII, 19.
  6. 6. « Comms est le désir de l’Ahù, — c’est à-dire comme est le désir d’Auhrmazd —, ainsi régulièrement (ratihâ) —, c’est-à-dire conformément au bien — en fait de vertu — en fait de bonnes œuvres ».
  7. 7. Le nom même d’Ahura est un dérivé de ahu « seigneur ».
  8. 8. Maçoudi, II, 162.
  9. 9. {{persan}}[en écriture {{arabe}} ?]
    {{persan}}[en écriture {{arabe}} ?]
    Shâh Nàma, éd. Vullers, p. 23.
  10. 10. dazdà, traduit duhishn, c’est-à-dire » dons » ; car il est glosé mizd upâtdahîshn : « salaire et récompense ».
  11. 11. aigh zak obdûr and Auhrmazd apâyat.
  12. 12. Il ne faut pas s’étonner que le Zôt s’adresse au Zôt, les qualités de Zôt et de Râspî n’étant pas inhérentes à ceux qui en exercent les fonctions. D’une façon générale, c’est au Zaotar à parler, et Zôt signifie ici « celui qui dans le cas présent remplit le rôle de Zôt » ou comme dit le Ràspî, yo zaotà « qui Zaotar (nunc est) ». — mrùtè, litt. « dit », c’est-à-dire « la dira ». D’après le Varshtmânsar (Dînkart IX, 24, 4), la question du Râspi fut prononcée par Zoroastre naissant et la réponse du Zôt par Ahura.
  13. 13. Avant le « Taureau unique » {{t|Gaush aèvôdàta|90]] (Yasna, I, n. 11) ; c’est-à-dire avant la création des animaux.
  14. 14. Le premier homme, Gayô Maretan ; cf. p. 128. L’énumération des créations répond assez exactement à celle des six Gàhànbàrs (v. page 37), sauf que dans l’ordre classique les animaux viennent après les plantes et que le feu ne paraît pas.
  15. 15. khrafstràish ; ou peut-être  : « avant les démons brutes et les hommes »  : sur khrafstra, voir Y. XXVIII, 5, note 19.
  16. 16. asha-cîthra, issues de l’Asha, du Bon principe.
  17. 17. bagha, titre donné à l’Ahuna vairya (ici et § 6 — Sp. 9) ; à l’Ashem vohù (Y. XX, 5 et Yt. 111, 14) ; au Yèńhè hâtàm (Y. XXI, 5) ; aux Staota yèsnya (Y. LV, 7 Sp. LV,
  18. 18. an-aipyukbdha, pun a-barâ gavishn ; glose : « c’est-à-dire qu’on ne dit pas au milieu un autre Avesta (texte sacré) ».
  19. 19. an-aipishùta (pour an-aipisùta) ; a-barâ sûtakih « sans repos, sans indolence ou somnolence » (cf. p. â-sûdan « reposer » ; glose : aighash barâ là khalmùnit « c’est-à-dire qu’il ne s’endort pas au milieu » ; le Minokhard compte l’indolence au nombre des défauts du prêtre (LIX, 7). Cf. Y. XXVIII, 10, note 38.
  20. 20. rathwàm gàthanǎm ; probablement les Galbas qui sont dites ratu-khshathra « seigneur des Ratus, des maîtres » (v. Y. LIV fin). — Sur l’opposition de bagha à ratu, voir note 17.
  21. 21. marât, ôshmûrit aigh safarùnit (P.), adhyeti kïla poshayati (lire pustakayati) ; désigne la lecture pour l’étude ; première opération de l’étudiant prêtre.
  22. 22. Ayant lu, il faut répéter par cœur : drenjayàt ; P. narm barâ obdûnât : N. gunayati.
  23. 23. Quand l’on sait réciter par cœur, il faut connaître les intonations, savoir chanter comme il faut : sràvayàإ.
  24. 24. Toutes ces conditions remplies, la prière peut être offerte dans l’office, et devient partie intégrante du sacrifice : yazàitè.
  25. 25. « Trois fois le jour où il offre le Yasht nàbar, je transporte son âme au Paradis et lui fais goûter la béatitude » (Comm. P.).
  26. 26. aparaodhayaiti, pariharati ; le Yasna persan traduit farâmôsk kunad « oublie ».
  27. 27. tanva, tanavam, expliqué dans Pt4 : dur kunam « j’éloigne ».
  28. 28. « Il est écrit dans les Livres saints que Dieu dit : Quiconque oublie l’Avesta, j’éloignerai son âme du Paradis de toute la largeur de la terre » Litt. « profonde » ou « épaisse ». (Saddar, XXVIII). L’auteur ajoute : « Et il est rapporté dans le Zand (la traduction) que dans le temps ancien un homme qui avait appris l’Avesta et l’avait oublié, on lui donnait la nourriture qu’on donne aux chiens jusqu’à ce qu’il le connût de nouveau par cœur. Et ailleurs j’ai lu qu’on lui donnait sa nourriture au bout d’une pique » Il ne s’agit naturellement dans tout ceci que du prêtre qui doit officier.
  29. 29. Le Yathâ ahù vairyô athâ ratush, qui fonde l’institution du ahu et du ratu.
  30. 30. Traduction conjecturale dans le détail. Litt. « avant la formation du corps de ce soleil, ayant obtenu création des Amesha-Speñtas ». — « du soleil » : le nom du soleil se présente en zend sous trois formes : hvare, gén. hùrô, qui répond au sanscrit svar « ciel, lumière du ciel » ; hvéñg pour ’hvaňg (v. Yasna, XLV, note 36), répondant au sanscrit * svas ; إ ù qui semble répondre à une forme su, d’où sv-ar et sv-as, à moins qu’il ne soit dû à une fausse lecture d’une transcription pehlvie, où le signe normal pour r était remplacé par son substitut polyphone n-v ; — thwarshtòkehrpya, locatif dépendant de para (au lieu du génitif) ; — dàhim, accusatif dépendant de apè : « dans l’obtention (pun barâ ayâpakih) de création des Amesha-
  31. 33. Glose  : « La Religion » (c’est-à-dire l’ensemble des paroles divines) ; selon Miyàn-dât, ce Fargard « (c’est-à-dire l’Ahuna Vairya). C’est Miyàn dàt qui est dans le vrai, puisque tout le chapitre est consacré à la glorification de l’Ahuna Vairya.
  32. 34. Dans le sacrifice  : « c’est quand on le récite dans le sacrifice que l’âme devient immortelle ».
  33. 35. ashàt haca yaṭ vahishtàt ; rappelle ashàṭeit hacâ du premier vers.
  34. 62. Imité des Gâthâs ; Y. XLIII, 6.
  35. 63. La hiérarchie des cinq dignités ecclésiastiques (v. pages 30-21) : Zarathushtra, le chef suprême de la religion, est représenté à travers les âges par la Zarathushtrùtema, le Maubadân Maubad.
  36. 64. Raji ou Ragha, la Ῥαγαί des Grecs, le Rai des modernes, est la patrie de Zoroastre et le centre du Magisme. Tandis donc que dans les autres dahyus, le Dahyuma, qui est à la tête de la province, a au-dessus de lui le Zarathushtrôtema de tout l’empire, à Rai, Dahyuma et Zarathushtrôtema se confondent (voir l’Introduction au vol. II). — Cf. pour tout ce développement le remaniement du Shikan Gûmânî, I, 11-23. Le Shikan Gùmàni, ainsi que le Dînkart (l. l., 21), considère nmânya, vîsya, etc., comme synonymes de nmànopaiti, vîspaiti, etc.
  37. 65. Littéralement : « Comment ? — Le Saint premier de pensée (ashavanem manas-paoirim) ». Il s’agit de Gayô-Maratan, le premier homme et le premier juste, « qui le premier prêta l’oreille à la pensée et à l’enseignement d’Ahura Mazda » (yô paoiryô manasca gushta sàsnâosca ; Yt. XIII, 87 ; manas-paoirîm résume toute cette proposition ; cf. § 12 et note 37). — Dans cette interrogation et les deux suivantes, humatem bùkhtem hvarshtem désignent les trois degrés de la religion, correspondant à trois paradis superposés qui portent le même nom (Yt. XXII, 15). Le pehlvi traduit : « Comment la religion se tint-elle à la sphère de la bonne pensée ? »
  38. 66. Le Màthra Speñta, c’est-à-dire la parole de l’Avesta, la bonne parole entre toutes.
  39. 67. Les premières créatures qui récitèrent l’Ashem vohù ; autrement dit qui accomplirent le sacrifice, l’œuvre sainte entre toutes. Staotâish asha-paoiryâish : cf. yô paoiryô staoإ ashem (en parlant de Zoroastre, Yt. XIII, 88).
  40. 68. vahishtô khshayamnô ; litt. « le très bon ayant le pouvoir » c’est-à-dire « pour que celui qui fait le bien soit maître, ait le pouvoir à son désir » (le pouvoir absolu : od zak vakhshînîtâr shalîtaih yahvûnât obî î kâmak khûtâi). — vahishtô, superlatif de vohu, est traduit ici, comme souvent, vakhshînîtàr « qui fait grandir » (c’est-à-dire que le mot est pris au sens actif « qui fait du bien » ).
  41. 69. vahishtemca avasôkhshathremca : avasôkhshathra est le juste impuissant. Cependant le pehlvi semble le prendre pour le « mauvais prince » (peut-être par induction de Y. VIII, où on souhaite à Ahriman et aux siens d’être avasékhshathra) : « pour que la Gloire des Kayanides (cf. Y. I, note 54), comme elle est avec les bons rois, soit aussi avec les mauvais : avec les bons, à cette fin qu’ils fassent plus de bien ; avec les mauvais, à cette fin qu’ils fassent moins de mal ».
  42. 70. Frasraothrem framarethrem fragâthrem frayashtim ; litt. « au chanter, au réciter, à l’entonner, à l’offrir en sacrifice de l’Ahuna Vairya ». Frasraothrem est proprement l’action de prononcer en chantant ; framarethrem semble être la prononciation distincte du texte mot par mot, et fragâthrem l’intonation sur l’air propre à chaque hymne.