Les méthodes nouvelles de la mécanique céleste/Chap.04

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Gauthier-Villars et Fils (1p. 162-232).

CHAPITRE IV.

EXPOSANTS CARACTÉRISTIQUES.


Équations aux variations.

53.Il y a peu de chances pour que, dans aucune application, les conditions initiales du mouvement soient exactement celles qui correspondent à une solution périodique ; mais il peut arriver qu’elles en diffèrent fort peu. Si alors on considère les coordonnées des trois corps dans leur mouvement véritable, et, d’autre part, les coordonnées qu’auraient ces trois mêmes corps dans la solution périodique, la différence reste très petite au moins pendant un certain temps et l’on peut, dans une première approximation, négliger le carré de cette différence.

Soit

(1)

un système d’équations différentielles où les sont des fonctions données de

Soit

(1 bis)

une solution quelconque de ces équations que nous appellerons solution génératrice.

Soit

(1 ter)

une solution peu différente de la première.

Si l’on néglige les carrés des on pourra écrire

(2)

Les équations (2) seront ce que nous appellerons les équations aux variations des équations (1). On conçoit qu’on puisse dans une première approximation se servir de ces équations aux variations pour déterminer les

Ce qui précède suffit pour faire comprendre l’importance de ces équations aux variations. Nous allons donc en faire une étude détaillée, en insistant surtout sur les équations aux variations des équations de la Dynamique.

54.Reprenons les équations (1) du numéro précédent et les équations (2) qui en sont les équations aux variations.

Quand on connaît une solution des équations (1) contenant un certain nombre de constantes arbitraires, on peut en déduire des solutions particulières des équations (2).

Supposons, en effet, que les équations (1) soient satisfaites quand on y fait

(3)

Je suppose que la solution génératrice s’obtienne en faisant dans ces équations (3)

sont constantes arbitraires.

Il est clair que les équations (2) admettront les solutions particulières

Il faut, bien entendu, que dans ces dérivées on fasse après la différentiation

Supposons maintenant que l’on connaisse une intégrale des équations (1), et soit

cette intégrale.

On aura, pour la solution (1 bis),

et, pour la solution (1 ter),

et étant deux constantes numériques.

Si nous supposons que les soient très petits, il en sera de même de et, si l’on néglige les carrés de ces quantités, il vient

(4)

Dans les dérivées partielles il faut, bien entendu, faire après la différentiation

L’équation (4) nous donne alors une intégrale des équations (2) ; il importe d’observer que cette intégrale contiendra en général le temps explicitement.

Ainsi, si l’on connaît une intégrale des équations (1), on peut en déduire une intégrale des équations (2).

Application à la théorie de la Lune.

55.J’ai parlé plus haut, au no 53, des applications possibles des équations aux variations et de leur utilité pour l’Astronomie. Un exemple frappant nous en est fourni par l’admirable théorie de la Lune, de M. Hill.

J’ai dit au no 41 comment ce savant astronome, après avoir formé les équations du mouvement de la Lune, étudie en détail une solution particulière de ces équations qui diffère assez peu de la solution correspondant aux véritables conditions initiales du mouvement. Cette solution est périodique et de celles que j’ai désignées dans le Chapitre précédent sous le nom de solutions de la première sorte.

S’en tenir à cette solution, cela revient à négliger à la fois non seulement la parallaxe et l’excentricité du Soleil, mais les inclinaisons des orbites et l’excentricité de la Lune.

Néanmoins cette première approximation nous fait connaître assez exactement, ainsi que je l’ai dit au no 49, le coefficient de l’une des plus importantes inégalités de la Lune connue sous le nom de variation.

Soient maintenant

les coordonnées de la Lune dans cette solution particulière périodique.

Soient

les véritables coordonnées de la Lune.

Dans une deuxième approximation, M. Hill néglige les carrés des et il arrive ainsi à un système d’équations différentielles linéaires. En d’autres termes, il forme les équations aux variations en prenant pour solution génératrice la solution périodique qu’il avait d’abord étudiée.

Néanmoins cette seconde approximation lui donne quelques-uns des éléments les plus importants du mouvement de la Lune, à savoir le mouvement du périgée, celui du nœud et le coefficient de l’évection.

À la vérité, les résultats ne sont publiés qu’en ce qui concerne le mouvement du périgée (Cambridge U. S. A., 1877, et Acta mathematica, t. VIII), mais le chiffre obtenu est extrêmement satisfaisant.

Équations aux variations de la Dynamique.

56.Soit une fonction d’une double série de variables

et du temps

Supposons que l’on ait les équations différentielles

(1)

Considérons deux solutions infiniment voisines de ces équations :

qui servira de solution génératrice et

les et les étant assez petits pour qu’on puisse négliger leurs carrés.

Les et les satisferont alors aux équations différentielles linéaires

(2)

qui sont les équations aux variations des équations (1).

Soit une autre solution de ces équations linéaires, de sorte que

(2′)

Multiplions les équations (2) et (2′) respectivement par et faisons la somme de toutes ces équations, il viendra

ou
ou enfin
(3)

Voilà une relation qui lie entre elles deux solutions quelconques des équations linéaires (2).

Il est aisé de trouver d’autres relations analogues.

Considérons quatre solutions des équations (2)

Considérons ensuite la somme des déterminants

où les indices et varient depuis 1 jusqu’à On vérifierait sans peine que cette somme est encore une constante.

Plus généralement, si l’on forme à l’aide de solutions des équations (2) la somme de déterminants

cette somme sera une constante.

En particulier, le déterminant formé par les valeurs des quantités et dans solutions des équations (2) sera une constante.

Ces considérations permettent de trouver une solution des équations (2) quand on en connaît une intégrale et réciproquement.

Supposons, en effet, que

soit une solution particulière des équations (2) et désignons par et une solution quelconque de ces mêmes équations. On devra avoir

ce qui sera une intégrale des équations (2).

Réciproquement, soit

une intégrale des équations (2), on devra avoir

d’où en identifiant
ce qui montre que

est une solution particulière des équations (2).

Si maintenant

est une intégrale des équations (1),

sera une intégrale des équations (2), et par conséquent

sera une solution particulière de ces équations.

Si sont deux intégrales des équations (1), on aura

C’est le théorème de Poisson.

Considérons le cas particulier où les désignent les coordonnées rectangulaires de points dans l’espace ; nous les désignerons par la notation à double indice


le premier indice se rapportant aux trois axes rectangulaires de coordonnées et le second indice aux points matériels. Soit la masse du ième point matériel. On aura alors


étant la fonction des forces.

On aura alors pour l’équation des forces vives

Posons ensuite

d’où
(3)
et
(1′)

Soit

(4)


une solution de ces équations (1′), une autre solution sera


étant une constante quelconque.

En regardant comme infiniment petit, on obtiendra une solution des équations (2′) qui correspondent à (1′) comme les équations (2) correspondent à (1)

désignant un facteur constant très petit que l’on peut supprimer quand on ne considère que les équations linéaires (2′).

Connaissant une solution

de ces équations, on peut déduire une intégrale

Mais cette même intégrale s’obtient très aisément en différentiant l’équation des forces vives (3).

Si les points matériels sont soustraits à toute action extérieure, on peut déduire de la solution (4) une autre solution

et étant des constantes quelconques. En regardant ces constantes comme infiniment petites, on obtient deux solutions des équations (2′)

On obtient ainsi deux intégrales de (2′)

On peut obtenir ces intégrales en différentiant les équations du mouvement du centre de gravité

Si l’on fait tourner la solution (4) d’un angle autour de l’axe des on obtient une autre solution

En regardant comme infiniment petit, on trouve comme solution de (2′)

d’où l’intégrale de (2′)

que l’on pouvait obtenir aussi en différentiant l’intégrale des aires de (1′)

Supposons maintenant que la fonction soit homogène et de degré par rapport aux ce qui est le cas de la nature.

Les équations (1′) ne changeront pas quand on multipliera par les par et les par étant une constante quelconque. De la solution (4) on déduira donc la solution suivante :

Si l’on regarde comme très voisin de l’unité, on obtiendra comme solution des équations (2′)

ou
(5)

d’où l’intégrale suivante des équations (2′), laquelle, à la différence de celles que nous avons envisagées jusqu’ici, ne peut être obtenue en différentiant une intégrale connue des équations (1′)

Application de la théorie des substitutions linéaires.

57.Avant d’aller plus loin, je suis obligé de rappeler quelques-unes des propriétés des transformations linéaires qui nous seront utiles dans la suite.

Soit

(1)

une substitution linéaire qui lie les variables aux variables Le déterminant de cette substitution est

et l’équation
(2)

est ce qu’on appelle l’équation en de la substitution (1). Si l’on fait subir aux et aux une même substitution linéaire, c’est-à-dire si l’on pose

les étant des constantes ; les et les seront liés entre eux par des relations linéaires de même forme que (1), et l’on aura

(3)

La substitution linéaire (3) s’appellera alors la transformée de la substitution (1).

La théorie des substitutions linéaires nous apprend :

1o Que la nouvelle équation en

ne diffère pas de l’ancienne équation en (2)' ;

2o Que si le déterminant est nul ainsi que tous ses mineurs jusqu’aux mineurs de l’ordre inclusivement, il en sera de même du déterminant

Les mineurs d’ordre de sont, en effet, des combinaisons linéaires des mineurs d’ordre de

3o Que l’on peut choisir les de façon à ramener la substitution (2) à une forme aussi simple que possible, dite forme canonique. Voici en quoi consiste cette forme :

Si l’équation en a toutes ses racines simples, on peut annuler à la fois

Si l’équation en a une racine double, on peut annuler à la fois on a alors

Si l’équation en a une racine triple, on peut s’annuler à la fois et on a alors

Dans tous les cas, on peut toujours supposer que les ont été choisis, de telle sorte que

Si l’équation en a une racine nulle, est nul et réciproquement.

Supposons maintenant que ait tous ses mineurs du premier ordre nuls ; alors il en sera de même de Mais comme

il y a trois des mineurs de qui se réduisent à

ils ne peuvent s’annuler que si deux des trois quantités et sont nulles.

Mais ces trois quantités sont les trois racines de l’équation en Donc, si les mineurs de sont tous nuls, l’équation en a deux racines nulles.

La réciproque n’est pas vraie.

En effet, l’équation en

a deux racines nulles et tous ses mineurs ne sont pas nuls.

Nous avons supposé, pour fixer les idées, que nous avions affaire à une substitution linéaire portant sur trois variables seulement : mais le même raisonnement s’applique, quel que soit le nombre des variables.

Si le déterminant d’une substitution linéaire est nul, ainsi que tous ses mineurs du premier, du second, etc., du ième ordre ; l’'équation en aura racines nulles.

58.Soient, comme dans le Chapitre précédent,

un système d’équations différentielles. Soit

une solution périodique de ces équations de période

Soit, dans une solution voisine de cette solution périodique, la valeur de pour et la valeur de pour

Envisageons le déterminant fonctionnel des par rapport aux

On peut le regarder comme le tableau des coefficients d’une substitution linéaire

Si l’on fait subir aux un changement linéaire de variables, les et les subiront ce même changement linéaire, et la substitution linéaire se changera dans la substitution transformée au sens du numéro précédent.

Nous pourrons donc choisir le changement linéaire de variables subi par les les et les de façon à simplifier autant que possible le tableau des coefficients de ainsi qu’il a été expliqué plus haut. Nous pouvons donc toujours supposer que l’on a fait un changement linéaire de variables tel que

(1)

toutes les fois que

Dans ce cas les racines de l’équation en relative à la substitution sont

On peut d’ailleurs choisir le changement de variables que subissent les les et les de façon que ces racines de l’équation en se présentent dans tel ordre que l’on veut. Si, par exemple, l’équation en a deux racines nulles, on peut choisir ce changement de variables de telle façon que,

Si l’équation en n’a qu’une racine égale a on pourra encore choisir le changement de variables, de telle sorte que l’on ait en outre

(2)

Supposons donc que l’équation en ait une racine nulle et une seule ; nous pourrons d’après ce qui précède supposer que cette racine nulle est de sorte que

et choisir en même temps le changement de variables, de façon à satisfaire aux conditions (1) et (2).

Si donc l’équation en a une racine nulle et une seule, il est toujours permis de supposer que

Définition des exposants caractéristiques.

59.Soit

(1)

un système d’équations différentielles où seront des fonctions données de Nous pourrons supposer, ou bien que le temps n’entre pas explicitement dans ces fonctions ou au contraire que ces fonctions dépendent non seulement de mais encore du temps mais dans ce dernier cas les devront être des fonctions périodiques de

Imaginons que ces équations (1) admettent une solution périodique

Prenons cette solution comme solution génératrice et formons les équations aux variations (voir no 53) des équations (1), en posant

et négligeant les carrés des

Ces équations aux variations s’écriront

(2)

Ces équations sont linéaires par rapport aux et leurs coefficients [quand on y a remplacé par ] sont des fonctions périodiques de Nous avons donc à intégrer des équations linéaires à coefficients périodiques.

On a vu au no 29 quelle est en général la forme des intégrales de ces équations ; on obtient intégrales particulières de la forme suivante

(3)

les étant des constantes et les des fonctions périodiques de de même période que les

Les constantes s’appellent les exposants caractéristiques de la solution périodique.

Si est purement imaginaire de façon que son carré soit négatif, le module de est constant et égal à 1. Si au contraire est réel, ou si est complexe de telle façon que son carré ne soit pas réel, le module tend vers l’infini pour ou pour Si donc tous les ont leurs carrés réels et négatifs, les quantités resteront finies ; je dirai alors que la solution périodique est stable ; dans le cas contraire, je dirai que cette solution est instable.

Un cas particulier intéressant est celui où deux ou plusieurs des exposants caractéristiques sont égaux entre eux. Dans ce cas les intégrales des équations (2) ne peuvent plus se mettre sous la forme (3). Si, par exemple,

les équations (2) admettraient deux intégrales particulières qui s’écriraient

et

les et les étant des fonctions périodiques de (voir no 29).

Si trois des exposants caractéristiques étaient égaux entre eux, on verrait apparaître, non seulement mais encore en dehors des signes trigonométriques et exponentiels.

Équation qui définit ces exposants.

60.Reprenons les équations (1) du numéro précédent ; considérons une solution quelconque

Soit la période de la solution périodique génératrice soit la valeur de pour et la valeur de pour

Comme les s’annulent avec les et sont développables suivant les puissances croissantes des nous pouvons écrire, par la formule de Taylor,

Si la solution considérée diffère assez peu de la solution périodique pour qu’on puisse négliger les carrés des on pourra également négliger les carrés des et il restera

Considérons une des solutions particulières des équations aux variations (2), nous aurons pour

et pour

Parmi ces solutions particulières, nous avons vu au no 59 qu’il y en a qui sont d’une forme remarquable : ce sont les solutions (3) ; soit

l’une de ces solutions (3), ou, en supprimant l’indice pour abréger l’écriture,

Les fonctions sont des fonctions périodiques de de période on a donc, pour

et, pour

ou, en remplaçant par sa valeur,

En éliminant entre des équations, il vient

d’où la règle suivante

Pour obtenir les exposants caractéristiques on forme le déterminant fonctionnel des par rapport aux on forme l’équation en correspondante : les racines de cette équation sont égales à

Dans les dérivées partielles il va sans dire qu’il faut, après les différentiations, annuler tous les

Cas où le temps n’entre pas explicitement.

61.Quand le temps n’entre pas explicitement dans les équations (1) du no 59, l’un au moins des exposants caractéristiques est nul. Soit, en effet,

la solution génératrice ; si l’on fait

étant une constante quelconque, on aura encore une solution des équations (1) ; alors, d’après le no 51, on aura une solution des équations aux variations, en faisant

(4)

Mais, étant une fonction périodique de il en sera de même de sa dérivée

La solution (4) est bien de la forme (3) (c’est-à-dire égale à une exponentielle multipliée par une fonction périodique de ). Seulement ici l’exponentielle se réduit à l’unité et l’exposant caractéristique est égal à 0. C.Q.F.D.

D’ailleurs nous avons vu déjà au Chapitre précédent que, dans ce cas, le déterminant fonctionnel des par rapport aux est nul.

Nouvel énoncé du théorème des nos 37 et 38.

62.Nous avons, dans le no 37, envisagé d’abord le cas où les équations (1) dépendent du temps et d’un paramètre et admettent pour une solution périodique et une seule. Nous avons vu que, si le déterminant fonctionnel

les équations admettront encore une solution périodique pour les petites valeurs de

Ce déterminant peut s’écrire

Or les exposants caractéristiques sont donnés par l’équation

Dire que est nul, c’est donc dire que l’un des exposants caractéristiques est nul ; de sorte que nous pouvons énoncer ainsi le premier des théorèmes démontrés au paragraphe précédent :

Si les équations (1) qui dépendent d’un paramètre admettent pour une solution périodique dont aucun des exposants caractéristiques ne soit nul, elles admettront encore une solution périodique pour les petites valeurs de

63.On peut arriver à un résultat analogue quand on suppose, comme au no 38, que le temps n’entre pas explicitement dans les équations différentielles.

Nous avons vu au no 38 que la condition suffisante pour qu’il y ait encore des solutions périodiques pour les petites valeurs de c’est que pour tous les déterminants contenus dans la matrice

ne soient pas nuls à la fois.

Cela posé, considérons l’équations en

Ses racines sont, comme nous l’avons vu au no 60, égales à étant la période et un exposant caractéristique. Le temps n’entrant pas explicitement dans les équations, un de ces exposants doit être nul d’après ce que nous avons vu au no 61.

L’équation en a donc au moins une racine nulle ; je dis que si elle n’en a qu’une, il y aura encore des solutions périodiques pour les petites valeurs de

En effet, d’après ce que nous avons vu au no 58, il est toujours permis de supposer que

Le premier membre de l’équation en s’écrit

Si donc l’équation en n’a qu’une racine nulle, le déterminant fonctionnel de par rapport à ne sera pas nul.

Alors le déterminant obtenu en supprimant dans la matrice la première colonne se réduit à

Je dis qu’il n’est pas nul ; en effet, ne peut s’annuler pour la raison suivante :

On ne peut pas avoir à la fois

S’il en était ainsi, cela voudrait dire que, si l’on considère la solution périodique

qui correspond à et qui nous sert de point de départ, on a pour (et par conséquent encore pour toutes les valeurs de )

de sorte que seraient des constantes, ce que nous ne supposerons pas.

D’autre part, je dis que

Nous avons, en effet, comme on l’a vu plus haut, page 91

Or nous avons donc une série d’équations linéaires

et, comme le déterminant de ces équations (c’est-à-dire ) n’est pas nul, il vient

Comme nous avons exclu le cas où sont des constantes, cas qui sera examiné à part, au no 68, nous en concluons que

C.Q.F.D.

Ainsi, si les équations différentielles ne contiennent pas le temps explicitement, si elles admettent une solution périodique pour l’un des exposants caractéristiques de cette solution sera toujours nul ; si, de plus, aucun autre de ces exposants n’est nul, il y aura encore une solution périodique pour les petites valeurs de

Cas où les équations admettent des intégrales uniformes.

64.Supposons que les équations

(1)

où les sont des fonctions uniformes de et de périodiques de période par rapport à admettent une solution périodique de période

de telle sorte que est une intégrale indépendante du temps

uniforme par rapport à Je dis qu’un des exposants caractéristiques est nul, sauf dans un cas exceptionnel dont je parlerai plus loin.

Définissons, en effet, les quantités et comme au no 37, et envisageons le déterminant fonctionnel des par rapport aux Je dis que ce déterminant est nul.

En effet, on a identiquement

en écrivant, pour abréger, au lieu de

En différentiant cette identité par rapport à on trouve

(2)

Il faut, dans remplacer par

Nous pouvons faire dans les équations (2) nous avons donc équations linéaires par rapport aux quantités

Alors de deux choses l’une : ou bien le déterminant de ces équations (2), c’est-à-dire le déterminant fonctionnel des par rapport aux sera nul, et alors, d’après ce que nous avons vu au no 62, l’un des exposants caractéristiques sera nul.

Ou bien on aura à la fois

(3)

Ces équations devront être satisfaites pour

ou, ce qui revient au même, pour

Mais l’origine du temps est restée entièrement arbitraire ; nous devons donc conclure que les équations (3) seront satisfaites, quel que soit pour

On peut d’ailleurs s’en rendre compte de la manière suivante :

Supposons que les équations (3) soient satisfaites pour un système de valeurs de je dis qu’elles le seront encore pour un système infiniment voisin pourvu que l’on ait, conformément aux équations différentielles,

En d’autres termes, je dis que les équations (3) entraînent les suivantes,

En effet, on a identiquement (puisque est une intégrale des équations différentielles)

En différentiant cette identité par rapport à il vient

ou, en vertu des équations (3),


C.Q.F.D.

Ainsi, si les équations différentielles admettent une intégrale uniforme, l’un des exposants caractéristiques d’une solution périodique quelconque sera nul, à moins que toutes les dérivées partielles de l’intégrale ne s’annulent en tous les points de cette solution périodique. Cette dernière circonstance ne pourra se présenter qu’exceptionnellement.

65.Supposons encore que les équations différentielles (1) contiennent le temps explicitement et soient, par rapport à cette variable, des fonctions périodiques de période

Je dis que si les équations différentielles admettent deux intégrales uniformes, et deux des exposants caractéristiques seront nuls.

On trouvera, en effet, comme dans le numéro précédent,

(2)

Nous pouvons en conclure que, non seulement le déterminant fonctionnel des par rapport aux est nul, mais qu’il en est de même de tous ses mineurs du premier ordre, à moins que l’on n’ait à la fois

(3)

Mais, d’après le no 57, cela ne peut avoir lieu que si l’équation en formée à l’aide du déterminant fonctionnel des a deux racines nulles, c’est-à-dire (puisque ces racines sont égales à ) s’il y a deux exposants caractéristiques nuls.

Si donc il y a deux intégrales uniformes, il y aura deux exposants caractéristiques nuls, à moins que les équations (3) ne soient satisfaites en tous les points de la solution périodique, ce qui évidemment ne peut arriver qu’exceptionnellement.

On démontrerait de même que s’il y a intégrales uniformes, des exposants caractéristiques seront nuls à moins que tous les déterminants contenus dans la matrice

ne s’annulent en tous les points de la solution périodique considérée.

66.Imaginons maintenant que le temps n’entre pas explicitement dans nos équations différentielles et, de plus, que ces équations admettent une intégrale uniforme

indépendante du temps

Je dis que deux exposants caractéristiques seront nuls.

Nous avons vu d’abord qu’un de ces exposants est toujours nul quand le temps n’entre pas explicitement. Si de plus il y a une intégrale on aura, comme au no 64,

et, en différentiant cette relation par rapport à et à il viendra

On en conclura ou bien que l’on a à la fois

pour tous les points de la solution périodique, ou bien que tous les déterminants contenus dans la matrice

sont nuls à la fois.

Or nous avons vu, au no 63, que cela ne peut avoir lieu que si deux exposants caractéristiques s’annulent.

67.Je me propose maintenant d’établir ce qui suit :

Supposons encore que le temps n’entre pas explicitement dans nos équations différentielles ; supposons que ces équations admettent intégrales analytiques et uniformes et où le temps n’entre pas non plus explicitement. Soient ces intégrales.

Alors, ou bien exposants caractéristiques seront nuls, ou bien tous les déterminants contenus dans la matrice

seront nuls pour tous les points de la solution périodique génératrice.

Supposons, en effet, pour fixer les idées,

Nous aurons alors les équations suivantes

De ces équations il est permis de conclure :

Ou bien que tous les déterminants contenus dans la matrice

sont nuls à la fois ; ou bien que tous les déterminants contenus dans la matrice

(1)

sont nuls à la fois, ainsi que leurs mineurs du premier ordre.

D’après ce que nous avons vu au no 58, nous pouvons toujours supposer que

pour

D’autre part, tous les mineurs du déterminant obtenu en supprimant la dernière colonne de la matrice (1) devant être nuls, l’équation en correspondante aura deux racines nulles : je puis donc supposer

Je me propose de démontrer que l’équation en a une troisième racine nulle et, par conséquent, que l’on a

ou

En effet, d’après la définition même des on a si l’on fait

étant une constante quelconque ; d’où en différentiant par rapport à et faisant ensuite

Mais
donc on a
(2)

En faisant il vient

d’où
ou

Dans le premier cas, le théorème est démontré ; dans le second cas, écrivons l’équation (2) en faisant il vient

d’où
ou

Dans le premier cas, le théorème est démontré ; dans le second cas, on a

d’où l’on peut conclure (puisque nous excluons le cas où tous les sont nuls à la fois) que et ne sont pas nuls tous deux. Formons les mineurs que l’on obtient en supprimant dans la matrice (1) les troisième et quatrième colonnes et la troisième ligne (ou bien les troisième et quatrième colonnes et la quatrième ligne). Ces deux mineurs devront être nuls, ce qui donne

d’où cette conclusion (puisque et ne sont pas nuis tous deux) que l’on a

ou

C.Q.F.D.

68.Nous avons exclu dans les numéros précédents le cas où

sont des constantes, c’est-à-dire le cas où l’on a à la fois

Si l’on suppose toujours que le temps n’entre pas explicitement dans les équations différentielles, on a encore les équations

Mais ces équations n’entraînent plus, comme conséquence, que le déterminant fonctionnel des par rapport au est nul, ni que l’un des exposants caractéristiques est toujours nul.

Si les équations différentielles admettent intégrales, on pourra donc seulement en conclure qu’il y a au moins exposants caractéristiques nuls (et non plus ) comme dans le cas où le temps entre explicitement dans les équations.

Cas des équations de la Dynamique.

69.Passons maintenant aux équations de la Dynamique

(1)

où je suppose que le temps n’entre pas explicitement. Elles admettront l’intégrale des forces vives

Supposons que les équations (1) admettent une solution périodique de période

et formons les équations aux variations en posant

Nous avons vu au no 56 que si et sont deux solutions particulières quelconques des équations aux variations, on a

Je dis qu’il en résulte que les exposants caractéristiques sont deux à deux égaux et de signe contraire.

Soient en effet et les valeurs initiales de et de pour dans une des solutions des équations aux variations ; soient et les valeurs correspondantes de et de pour Il est clair que les et les seront des fonctions linéaires des et des de telle sorte que la substitution qui change et en et sera une substitution linéaire.

Soit

le tableau des coefficients de cette substitution linéaire.

Fermons l’équation en

Les racines de cette équation seront ce qu’on appelle les multiplicateurs de la substitution linéaire Mais cette substitution linéaire ne peut pas être quelconque : il faut qu’elle n’altère pas la forme bilinéaire

Pour cela, l’équation en doit être réciproque. En effet, la théorie des substitutions linéaires nous apprend que, si une substitution linéaire n’altère pas une forme quadratique, son équation en doit être réciproque. Si donc on pose

les quantités devront être deux à deux égales et de signe contraire. C.Q.F.D.

Nous reviendrons sur ce point au no 70.

70.Les équations (1) du numéro précédent admettent toujours l’intégrale dite des forces vives

Je suppose qu’elles admettent, en outre, intégrales uniformes

Je suppose, de plus, que les crochets deux à deux de ces intégrales soient nuls, c’est-à-dire que

On sait d’ailleurs que, pour une intégrale quelconque on a

Je me propose de démontrer que, dans ce cas, ou bien tous les déterminants fonctionnels de par rapport à quelconques des variables et sont nuls à la fois en tous les points de la solution périodique ; ou bien exposants caractéristiques sont nuls.

En effet, reprenons les équations (2) du no 56, c’est-à-dire les équations aux variations des équations (1). Soit

une solution particulière de ces équations (2) ; appelons cette solution ; soit une autre solution de ces mêmes équations ; appelons cette solution.

Nous savons qu’on a

J’appellerai le premier membre de cette relation.

Parmi les solutions des équations proposées, nous avons vu au no 59 qu’il y en a dont la forme est remarquable. Pour les unes, chacune des quantités et est égale à une exponentielle multipliée par une fonction périodique de Je les appellerai solutions de première espèce.

Pour d’autres, chacune des quantités et est égale à une exponentielle multipliée par un polynôme entier en dont les coefficients sont des fonctions périodiques de Je les appellerai solutions de deuxième espèce.

Les équations (2) ne peuvent admettre que solutions linéairement indépendantes. Une solution quelconque pourra donc toujours être regardée comme une combinaison linéaire de solutions que l’on peut appeler fondamentales.

Si, sur exposants caractéristiques, sont distincts, on pourra choisir comme solutions fondamentales solutions de première espèce et solutions de seconde espèce.

Soient

solutions particulières des équations (2) linéairement indépendantes et désignons par une solution quelconque.

Il ne peut y avoir plus de solutions linéairement indépendantes qui satisfassent aux conditions

(3)

En effet, soit

la solution conservons les lettres et pour désigner la solution alors les relations (3) nous donnent relations linéaires entre les et les ces relations sont distinctes si les solutions particulières sont linéairement indépendantes. Elles pourront donc servir à abaisser de unités l’ordre des équations différentielles linéaires (2). Après cet abaissement, ces équations ne conserveront plus que solutions linéairement indépendantes. C.Q.F.D.

Cela posé, supposons que soit une solution de première ou de deuxième espèce admettant comme exposant caractéristique et que soit une solution de première ou de deuxième espèce admettant comme exposant caractéristique Formons l’expression

Cette expression est de la forme suivante : une exponentielle multipliée par un polynôme entier en dont les coefficients sont des fonctions périodiques de

Mais cette expression doit se réduire à une constante. Il est clair que cela ne peut avoir lieu que de deux manières :

Ou bien si cette constante est nulle ;

Ou bien si

On peut en conclure que, s’il y a exposants caractéristiques égaux à il y en aura égaux à ce qui confirme le résultat obtenu au no 69. Si, en effet, il y a exposants égaux à il y aura solutions de première ou de deuxième espèce linéairement indépendantes et admettant pour exposant

Soient ces solutions.

Il ne pourra pas y avoir plus de solutions indépendantes qui satisferont aux relations

Par conséquent, parmi les solutions fondamentales (qui sont toutes de première ou de deuxième espèce), il y en aura pour lesquelles l’une des constantes au moins ne sera pas nulle, et, par conséquent, pour lesquelles l’exposant sera égal à

71.Supposons maintenant que les équations (1) admettent une intégrale

D’après ce que nous avons vu au no 54, les équations (2) admettront comme solution particulière

Appelons cette solution, les fonctions et (où on devra remplacer et par leurs valeurs correspondant à la solution périodique génératrice) seront des fonctions périodiques de Donc la solution est de première espèce et son exposant caractéristique est nul.

Si est une autre intégrale et que l’on appelle la solution

il viendra

Supposons donc que nos équations (1) admettent intégrales

et soient

les solutions des équations (2) qui correspondent à ces intégrales.

De deux choses l’une :

Ou bien ces solutions seront indépendantes ;

Ou bien tous les déterminants fonctionnels de par rapport à variables choisies parmi les et les seront nuls à la fois en tous les points de la solution périodique.

Supposons qu’il n’en soit pas ainsi et que les solutions soient indépendantes.

Nous aurons dans tous les cas

d’où

Je suppose que l’on ait en outre

On aura également

Je choisirai pour les solutions fondamentales les solutions et autres solutions de première ou de deuxième espèce.

Parmi les solutions fondamentales, il y en aura certainement qui (si je les appelle ) ne satisferont pas à la fois aux relations

et qui, par conséquent, auront un exposant caractéristique nul.

Mais ces solutions ne se confondront pas avec les solutions

Je dis qu’on ne peut avoir, par exemple,

car on a, par hypothèse,

et, d’après la définition même de ne jouit pas de cette propriété.

Il y a donc en tout solutions fondamentales dont l’exposant est nul ; il y a donc au moins exposants caractéristiques qui sont nuls.

C.Q.F.D.

72.Supposons maintenant qu’il existe intégrales (outre ), à savoir

mais que les crochets deux à deux de ces intégrales ne soient pas nuls. Tout ce que nous pourrons affirmer alors, c’est que exposants caractéristiques seront nuls. Mais nous saurons que solutions fondamentales au moins (qui sont celles que nous avons appelées ) seront de première espèce avec un exposant nul.

Si donc on venait à établir que les équations (2) n’admettent que solutions linéairement indépendantes qui soient de première espèce avec un exposant nul, on serait certain que les équations (1) ne comportent pas intégrales (en y comprenant ), ou du moins que, si ces intégrales existent, tous leurs déterminants fonctionnels par rapport à des variables et sont nuls à la fois en tous les points de la solution périodique.

Changements de variables.

73.Voyons ce qui arrive des exposants caractéristiques quand on change de variables.

Soient

nos équations différentielles où je supposerai que le temps n’entre pas explicitement. Soit

une solution périodique de période Soit

d’où les équations aux variations

Soit

une solution de ces équations aux variations, étant périodique en

Changeons de variables en remplaçant le temps par une nouvelle variable définie par la relation

étant une fonction donnée de d’où les équations différentielles

(1 bis)

et les équations aux variations

(2 bis)

Les équations (1 bis) admettent une solution périodique

correspondant à

et dont la période est égale à

On doit remplacer dans avant l’intégration, par

Pour résoudre les équations (2 bis), nous tiendrons compte de la valeur de et nous les écrirons

Posons ensuite
il vient

ce qui montre qu’on peut satisfaire aux équations (2 ter) en prenant

On peut tirer de là

et

et les étant périodiques en Il faudra ensuite remplacer par sa valeur tirée de l’équation

On trouve ainsi

étant une fonction périodique de on a donc

ce qui montre qu’après le changement de variables les nouveaux exposants caractéristiques sont égaux aux anciens multipliés par

Développement des exposants. — Calcul des premiers termes.

74.Reprenons les équations

(1).

du no 13 avec les hypothèses de ce numéro.

Posons

Pour les sont des constantes et on a, d’autre part,

les étant des constantes.

Soient des valeurs de telles que les quantités soient multiples de Soient des valeurs des telles que

Nous avons vu aux nos 42 et 44 que les équations (1) admettront une solution périodique de période qui sera développable suivant les puissances de et qui pour se réduira à

les étant certaines valeurs particulières des constantes Cela posé, envisageons une solution quelconque.

Soit la valeur initiale des et celle de pour Soit l’accroissement que subit et l’accroissement que subit quand passe de la valeur 0 à la valeur

Voici comment on formera l’équation qui donne les exposants caractéristiques. On construira un déterminant dont les éléments seront donnés par le Tableau suivant. Dans ce Tableau, la première colonne indique le numéro de la ligne, la seconde indique le numéro de la colonne, et la troisième fait connaître l’élément correspondant du déterminant.

(2)[1]

En égalant à 0 le déterminant ainsi formé, on a une équation en dont les racines sont

étant un des exposants caractéristiques.

Les et les sont développables suivant les puissances de des et des Il en est de même des quantités

(3)

On doit y remplacer les et les par les valeurs qui correspondent à la solution périodique et qui sont développables suivant les puissances de de sorte qu’après cette substitution les quantités (3) seront développées selon les puissances de

Comme, d’autre part, on a

on voit que notre déterminant est une fonction entière de développable d’autre part suivant les puissances de J’appellerai cette fonction et j’aurai pour déterminer en fonction de l’équation

(4)
Cela posé, faisons

Divisons les premières lignes du déterminant, ainsi que les dernières colonnes par Les éléments du déterminant deviendront, en les écrivant dans le même ordre que dans le Tableau (2),

et l’équation (4) devient

Cherchons ce que devient cette équation pour ou, en d’autres termes, formons le déterminant

Pour est nul, et ne dépend que des Donc et sont divisibles par On a donc

D’autre part

Il vient ensuite (pour )

Dans doit être remplacé par On a donc

Dans on doit après la différentiation faire c’est-à-dire

Nous avons (toujours pour )

Dans on doit remplacer par et par ce qui montre d’abord que

Comme nous nous proposons de différentier par rapport aux mais non par rapport aux nous pouvons tout de suite donner aux leurs valeurs définitives et faire

Alors devient une fonction périodique de période par rapport à et de période par rapport aux Soit

la valeur moyenne de considérée comme fonction périodique de il vient

d’où

Ainsi les éléments du déterminant seront, en les écrivant dans le même ordre que dans le Tableau (2),

Nous avons ainsi une équation algébrique en en général, cette équation aura deux racines nulles et toutes les autres seront distinctes et différentes de 0. En appliquant le théorème du no 30, nous verrons que l’on peut tirer de l’équation

(et par conséquent ) en série ordonnée suivant les puissances de

Nous sommes donc amenés à discuter l’équation

Si nous changeons en cette équation ne change pas.

En effet, si nous multiplions les premières lignes par ainsi que les dernières colonnes, le déterminant ne changera pas, et tous les éléments du déterminant ne changeront pas non plus, à l’exception des éléments de la diagonale principale qui étaient égaux à et qui deviendraient égaux à

Je dis que l’équation a deux racines nulles. Si en effet nous faisons le déterminant devient égal au produit de deux autres, à savoir :

1o Le hessien de par rapport aux

2o Le hessien de par rapport aux

Ce dernier hessien est nul ; car on a, d’après la définition de

Donc l’équation est satisfaite pour et, comme ses racines sont deux à deux égales et de signe contraire, elle doit avoir deux racines nulles.

Pour qu’il y ait plus de deux racines nulles, il faudrait que le coefficient de dans fût nul. Or ce coefficient peut se calculer comme il suit :

Multiplions la première ligne de par et ajoutons-y la seconde multipliée par la troisième par la ième par Tous les éléments de demeurent inaltérés, à l’exception de ceux de la première ligne, qui deviennent

Multiplions maintenant la ième colonne par et ajoutons-y la ième multipliée par la ième multipliée par la ième par Tous les éléments restent inaltérés sauf ceux de la ième colonne, qui deviennent

Le déterminant par cette double opération, a été multiplié par Divisons-le maintenant par en divisant par la première ligne d’une part et la ième colonne d’autre part.

Faisons ensuite et nous aurons le coefficient cherché.

Le déterminant ainsi obtenu a ses éléments conformes au Tableau suivant :

On voit que ce déterminant est égal au signe près à

et étant les deux déterminants suivants

et étant le hessien de par rapport à

Si j’observe que est égal, au signe près, à je vois que l’on ne change pas en remplaçant dans la première ligne et la dernière colonne par Le déterminant ainsi formé s’appellera le hessien bordé de par rapport à

Ainsi l’équation ne peut avoir plus de deux racines nulles et, par conséquent, il ne peut y avoir plus de deux exposants caractéristiques nuls que si ou s’annulent.

Dans le cas particulier du problème des trois Corps que nous avons traité au no 9, il n’y a que 2 degrés de liberté et l’on a

Il vient alors

donc n’est pas nul ; d’autre part, on vérifie que n’est pas nul non plus.

Donc, dans ce cas particulier du problème des trois Corps, il y a deux exposants caractéristiques nuls et les deux autres sont différents de 0.

75.Le déterminant peut être un peu simplifié par un choix convenable des variables. Je dis qu’on peut toujours supposer

(1)

En effet, si cela n’était pas, on changerait de variables en prenant pour variables nouvelles et et en faisant

les étant des coefficients constants. Après ce changement linéaire de variables, les équations conserveront la forme canonique.

Après ce changement de variables, les quantités qui correspondront à et que nous appellerons seront données par les relations

car

Comme les nombres sont commensurables entre eux, nous pourrons toujours choisir les de telle façon :

1o Que les soient entiers ;

2o Que leur déterminant soit égal à 1. Ces deux conditions sont nécessaires pour que reste périodique par rapport aux comme il l’était par rapport aux  ;

3o Que

Ainsi nous pouvons toujours supposer que les conditions (1) sont remplies et nous en déduisons les équations suivantes

(2)

76.Un cas particulier intéressant est celui où une ou plusieurs des variables n’entrent pas dans Supposons, par exemple, que ne dépende pas de Alors tous les éléments de la ième colonne [et ceux de la ième ligne] sont tous nuls, sauf celui d’entre eux qui appartient à la diagonale principale et qui reste égal à

Je supposerai de plus que les variables aient été choisies de telle sorte que les conditions (1) et (2) du numéro précédent soient remplies. Il en résulte que les éléments de la première ligne [et ceux de la ième colonne] sont tous nuls, à l’exception de celui d’entre eux qui appartient à la diagonale principale et qui reste égal à

Ainsi tous les éléments des lignes et et tous ceux des colonnes et sont divisibles par (j’ajouterai que tout élément qui appartient à la fois à une de ces deux lignes et à une de ces deux colonnes est nul et, par conséquent, divisible par il en résulte que le déterminant est divisible par et, par conséquent, que l’équation a quatre racines nulles.

Dans quel cas peut-elle en avoir plus de quatre ?

Pour nous en rendre compte, divisons les lignes 1 et et les colonnes et par et faisons ensuite Dans quel cas le déterminant ainsi obtenu et qui sera égal à

sera-t-il nul ?

Nous pouvons également diviser le déterminant par en supprimant les lignes 1, et et les colonnes de même numéro. Si l’on fait ensuite on voit que tous les éléments sont nuls, sauf ceux qui appartiennent à l’une des dernières colonnes subsistantes, et à l’une des premières lignes, ou inversement à l’une des premières colonnes et à une des dernières lignes.

Ainsi le déterminant est égal, à une puissance de près, au produit de deux hessiens, à savoir :

1o Le hessien de par rapport à

2o Et le hessien de par rapport à

Si aucun de ces deux hessiens n’est nul, l’équation n’aura pas plus de quatre racines nulles et il n’y aura certainement pas plus de quatre exposants caractéristiques qui soient nuls.

Que devient cette condition quand on suppose que les variables sont quelconques et que les conditions (1) et (2) du numéro précédent ne sont pas remplies ?

Dans ce cas, on fera subir au déterminant la même transformation qu’à la fin du no 74 ; on verra alors, comme à la fin de ce numéro, qu’après cette transformation, les éléments de la première ligne deviennent égaux à

et ceux de la colonne à

Seulement il importe d’observer ici que est nul, puisque

Nous pourrons diviser ce déterminant par en supprimant les lignes et et les colonnes de même numéro, et en divisant par les éléments de la première ligne et de la ième colonne.

Si on fait ensuite on voit que le déterminant se réduit au produit de deux autres, à savoir :

1o Le hessien bordé de par rapport à

2o Le hessien de par rapport à

Pour qu’il y ait plus de quatre exposants caractéristiques nuls, il faut (mais il ne suffit pas) que l’un de ces deux hessiens soit nul.

Supposons maintenant que non seulement ne contienne pas mais encore ne contienne pas non plus en raisonnant de la même manière, on arriverait au résultat suivant :

L’équation a toujours six racines nulles ; pour qu’elle en ait davantage, il faut et il suffit que le hessien bordé de par rapport à soit nul, ou bien que le hessien de par rapport à soit nul. Cette condition est donc nécessaire (mais non suffisante) pour qu’il y ait plus de six exposants caractéristiques nuls.

77.Reprenons les hypothèses faites au début du no 76, à savoir que ne dépend pas de et que les conditions (1) et (2) du no 75 sont remplies.

Nous avons vu que l’équation

admet alors quatre racines nulles et quatre seulement, et nous en avons conclu qu’il ne peut pas y avoir plus de quatre exposants nuls. Il n’est pas, au contraire, permis d’en conclure qu’il y a quatre exposants nuls ; cela prouve seulement que, quand on développe ces exposants suivant les puissances de le premier terme du développement est nul pour quatre d’entre eux.

Il nous reste à voir si les termes suivants du développement sont nuls également.

Je sais que deux exposants sont nuls puisque le temps n’entre pas explicitement dans les équations différentielles et que est une intégrale. Je me propose de rechercher ce qu’il advient des deux autres et, pour cela, je vais calculer dans leur développement le coefficient de

Je vais poser

je diviserai l’équation

par une puissance convenable de et je ferai ensuite et j’aurai une équation qui me donnera les valeurs de

De ce que ne dépend pas de nous pouvons conclure que les quantités que nous avons appelées et qui sont égales à ne dépendent pas non plus de ni par conséquent de

On aura donc non seulement comme au no 74, quand tous les seront nuls, mais alors même que ne serait pas nul, pourvu que les autres le soient.

Si donc nous supposons

nous aurons encore

Cela nous permet de différentier cette identité par rapport à et d’écrire

Calculons maintenant

Il vient

où, puisque on aura pour

Cette identité a lieu pourvu que

Nous pouvons donc la différentier par rapport à ou à ce qui donne

(3)

En ce qui concerne les quantités

il nous suffira d’observer qu’elles sont divisibles par

Nous avons encore à examiner les éléments de la première ligne de notre déterminant et ceux de la ième colonne.

Les éléments de la première ligne sont égaux à

Ils sont tous divisibles par mais je dis que les derniers éléments, c’est-à-dire

sont divisibles par En effet, nous avons trouvé pour

Or, en vertu de la définition de on a

ou, à cause des relations (1) du no 75,

d’où (en différentiant cette identité)

pour C.Q.F.D.

Les éléments de la ième colonne s’écrivent

Tous ces éléments sont divisibles par mais je dis que les premiers et le dernier sont divisibles par ou, ce qui revient au même, que

En effet, nous avons trouvé

et

d’où, par différentiation,


C.Q.F.D.

Cela posé, dans notre déterminant je divise chaque élément par je divise ensuite :

La 1re ligne par les lignes 2, 3, 4, …, par

La ième colonne par les colonnes par

Le déterminant est finalement divisé par

Je fais ensuite

J’observe que les éléments suivants sont nuls :




Ligne à laquelle
appartient l’élément

Colonne
à laquelle
appartient l’élément
Puissance de µ
par laquelle
l’élément
était divisible
Puissance de µ
par laquelle
l’élément
a été divisé
(4)

et que les éléments suivants sont finis :

(4 bis)

Les seuls éléments qui sont finis appartiennent donc aux lignes 1 et à incl. et aux colonnes 1 à incl. et ou bien aux lignes 1 à incl. et et aux colonnes et à incl.

Notre déterminant devient donc égal au produit de deux autres que j’appellerai et

Le déterminant s’obtiendra en supprimant les lignes

et les colonnes

Le déterminant s’obtiendra en supprimant les lignes

et les colonnes

Voyons comment ces déterminants dépendront de Pour cela je remarquerai que

n’entre que dans les termes de la diagonale principale ; or le déterminant contient deux de ces termes, l’un appartenant à la colonne et à la ligne l’autre à la colonne et à la ligne

Le déterminant contient aussi deux de ces termes, l’un appartenant à la colonne et à la ligne 1, l’autre à la colonne et à la ligne

Il en résulte que et sont des polynômes du deuxième degré en Ainsi notre équation en se décompose en deux équations du deuxième degré,

Examinons d’abord l’équation

Pour former le déterminant on peut appliquer la règle suivante ;

Écrire le hessien de par rapport à

changer les signes de la dernière ligne, celle qui contient les dérivées de ajouter ensuite aux deux éléments qui sont égaux à et à

On obtient la même équation plus simplement (le premier membre étant seulement changé de signe) en prenant le hessien de et ajoutant à l’un des deux éléments qui sont égaux à et à l’autre. Écrivons l’équation en supposant pour fixer les idées :

Sous cette forme on voit immédiatement ce que d’ailleurs on pouvait prévoir : que cette équation en ses deux racines égales et de signe contraire.

Ces deux racines seront finies si le hessien de par rapport à

n’est pas nul.

Elles seront différentes de 0, si le hessien de par rapport à

n’est pas nul.

Quant à l’équation elle aura ses deux racines nulles. En effet, nous savons qu’il y a toujours deux exposants caractéristiques nuls et, par conséquent, que deux des valeurs de sont nulles ; or nous venons de voir que les racines de ne sont pas nulles en général : il faut donc admettre que ce sont les racines de qui sont toujours nulles.

Comment ces résultats seraient-ils modifiés si la condition (1) du no 75 n’était pas remplie d’elle-même ?

Dans ce cas on multiplierait (comme nous l’avons fait au no 74) la première ligne par et on y ajouterait les e, e, ième lignes, multipliées respectivement par (je rappelle d’ailleurs que est nul) ; on multiplierait ensuite la ième colonne par et on y ajouterait les e, e, ième colonnes, multipliées respectivement par Après cette transformation, tous les éléments du déterminant demeureraient les mêmes, sauf ceux de la première ligne et de la ième colonne.

D’ailleurs, chaque élément [aussi bien ceux de la première ligne et de la ième colonne que les autres] est divisible par la puissance de indiquée dans la e colonne des tableaux (4) et (4 bis). Nous diviserons ensuite chaque élément par et par la puissance de indiquée dans la e colonne des mêmes tableaux.

Quand nous ferons ensuite un certain nombre d’éléments seront nuls et d’autres resteront finis, et cela conformément aux tableaux (4) et (4 bis). Notre déterminant se trouvera encore égal au produit de deux autres et qui s’obtiendront comme plus haut.

Tous les éléments de ces deux déterminants auront même expression que dans le cas précédent, sauf ceux de la première ligne et de la ième colonne. Or ne contient aucun élément de cette ligne et de cette colonne.

Donc a la même expression que dans le cas précédent et les mêmes conclusions subsistent.

Les valeurs de sont finies si le hessien de par rapport à n’est pas nul, et elles sont différentes de 0, si le hessien de par rapport à n’est pas nul.

En résumé, si ne dépend pas de si le hessien bordé de par rapport à n’est pas nul, si les hessiens de par rapport à et par rapport à ne sont pas nuls, il n’y aura que deux exposants caractéristiques nuls.

Passons au cas où ne dépend ni de ni de

On verrait en raisonnant de la même manière que :

Si le hessien bordé de par rapport à n’est pas nul, si les hessiens de par rapport à et par rapport à et ne sont pas nuls, il n’y aura que deux exposants nuls.

Application au problème des trois Corps.

78.Appliquons ce qui précède au problème des trois Corps ; nous avons vu aux nos 15 et 16 comment on peut réduire le nombre des degrés de liberté à 3 dans le cas du problème plan et à 4 dans le cas général.

Écrivons donc les équations du mouvement sous la forme que nous leur avons donnée dans ces nos 15 et 16.

Les deux séries de variables conjuguées sont alors

dans le cas du problème plan, et

dans le cas général. On a d’ailleurs

et étant des coefficients constants.

On voit donc que ne dépend pas de dans le cas du problème plan, ni de et de dans le cas général.

En premier lieu, le hessien bordé de par rapport à et est égal à

et étant des coefficients constants. Le hessien bordé n’est donc pas nul.

Les hessiens de ne seront pas non plus nuls en général, ainsi qu’on peut s’en assurer sur des exemples ; nous reviendrons d’ailleurs en détail sur ce point au Chapitre suivant.

Donc les solutions périodiques du problème des trois Corps ont deux exposants caractéristiques nuls, mais elles n’en ont que deux.

Calcul complet des exposants caractéristiques.

79.Reprenons les équations (1) du no 74 en faisant pour fixer les idées :

(1)

Supposons qu’on ait trouvé une solution périodique de ces équations

et proposons-nous de déterminer les exposants caractéristiques de cette solution.

Pour cela, nous poserons

puis nous formerons les équations aux variations des équations (1), que nous écrirons

(2)

et nous chercherons à intégrer ces équations en faisant

(3)

et étant des fonctions périodiques de Nous savons qu’il existe en général six solutions particulières de cette forme [les équations linéaires (2) étant du sixième ordre]. Mais il importe d’observer que, dans le cas particulier qui nous occupe, il n’y a plus que quatre solutions particulières qui conservent cette forme, parce que deux des exposants caractéristiques sont nuls, et qu’il y a par conséquent deux solutions particulières d’une forme dégénérescente.

Cela posé, supposons d’abord alors se réduit à et ne dépend plus que de

Alors les équations (2) se réduisent à

(2′)

Les coefficients de dans la seconde équation (2′) sont des constantes.

Nous prendrons comme solutions des équations (2′)

étant trois constantes d’intégration.

Cette solution n’est pas la plus générale, puisqu’elle ne contient que trois constantes arbitraires, mais c’est la plus générale parmi celles que l’on peut ramener à la forme (3). Nous voyons ainsi que, pour les six exposants caractéristiques sont nuls.

Ne supposons plus maintenant que soit nul. Nous allons maintenant chercher à développer et non pas suivant les puissances croissantes de mais suivant les puissances de en écrivant

Je me propose d’abord d’établir que ce développement est possible.

Nous avons vu d’abord au no 74 que les exposants caractéristiques peuvent se développer selon les puissances croissantes de

Démontrons maintenant que et peuvent aussi se développer suivant les puissances de

et nous sont donnés en effet par les équations suivantes :

(2″)

Soit la valeur initiale de et celle de les valeurs de et de pour une valeur quelconque de pourront, d’après le no 27, se développer suivant les puissances de de des et des De plus, à cause de la forme linéaire des équations, ces valeurs seront des fonctions linéaires et homogènes des et des

Soit, pour employer des notations analogues à celles du no 37, la valeur de et celle de pour La condition pour que la solution soit périodique, c’est que l’on ait

Les et les sont des fonctions linéaires des et des ces équations sont donc linéaires par rapport à ces quantités. En général, ces équations n’admettent d’autre solution que

de sorte que les équations (2′′) n’ont d’autre solution périodique que

Mais nous savons que, si l’on choisit de façon à satisfaire à les équations (2′′) admettent des solutions périodiques autres que Par conséquent, le déterminant des équations linéaires est nul. Nous pourrons donc tirer de ces équations les rapports

et

sous la forme de séries développées suivant les puissances de et de

Comme reste arbitraire, nous conviendrons de prendre de telle sorte que la valeur initiale de soit égale à 1. Les et les sont alors développés suivant les puissances de et de mais les et les sont, comme nous l’avons vu, développantes suivant les puissances de de des et des et, d’autre part, est développable suivant les puissances de

Donc les et les seront développantes suivant les puissances de C.Q.F.D.

On aura en particulier

Comme, d’après notre hypothèse, qui est la valeur initiale de doit être égale à 1, quel que soir on aura pour

Ayant ainsi démontré l’existence de nos séries, nous allons chercher à en déterminer les coefficients.

Nous avons

et
(4)

Nous développerons d’autre part les dérivées secondes de qui entrent comme coefficients dans les équations (2) en écrivant

(5)

Ces développements ne contiennent que des puissances entières de et ne possèdent pas, comme les développements (4), des termes dépendants de

On observera que

(6)

Nous substituons dans les équations (2) les valeurs (4) et (5) à la place des des de leurs dérivées et des dérivées secondes de Dans les expressions (4) je suppose que soit développé suivant les puissances de sauf lorsque cette quantité entre dans un facteur exponentiel

Nous identifierons ensuite en égalant les puissances semblables de et nous obtiendrons ainsi une série d’équations qui permettent de déterminer successivement

Je n’écrirai que les premières de ces équations obtenues en égalant successivement les termes tout connus, les termes en les termes en Je fais d’ailleurs disparaître le facteur qui se trouve partout.

Égalons d’abord les termes en il vient

(7)

Égalons les termes en il vient

(8)

outre trois équations analogues donnant les

Si l’on tient compte maintenant des relations (6), les équations (7) deviennent

La première de ces équations montre que et sont des constantes. Quant à la seconde, elle montre que est une constante ; mais comme doit être une fonction périodique, cette constante doit être nulle, de sorte qu’on a

(9)

ce qui établit trois relations entre les trois constantes les trois constantes et la quantité inconnue

De son côté, l’équation (8) s’écrira

Les sont des fonctions périodiques de développons-les d’après la formule de Fourier et soit le terme tout connu de Il viendra

ou, en tenant compte des équations (9),

(10)

En faisant dans cette équation (10) et nous aurons trois relations linéaires et homogènes entre les trois constantes En éliminant ces trois constantes, nous aurons alors une équation du troisième degré qui déterminera

Si nous posons, pour abréger,

l’équation due à cette élimination s’écrira

(11)

Elle peut encore s’écrire

La détermination de est la seule partie du calcul qui présente quelque difficulté.

Les équations analogues à (7) et à (8), formées en égalant dans les équations (2) les coefficients des puissances semblables de permettent ensuite de déterminer sans peine les les et les Nous pouvons donc énoncer le résultat suivant :

Les exposants caractéristiques sont développables suivant les puissances croissantes de

Concentrant donc toute notre attention sur la détermination de nous allons étudier spécialement l’équation (11). Nous devons chercher d’abord à déterminer les quantités et

On a évidemment

et
ou
et

La sommation représentée par le signe s’étend à tous les termes, quelles que soient les valeurs entières attribuées à et La sommation représentée par le signe s’étend seulement aux termes tels que

Sous le signe nous avons par conséquent

Cela nous permet d’écrire

Si un ou deux des indices et sont égaux à 1, sera défini par la relation

Nous allons, à l’aide de cette dernière relation, transformer l’équation (11) de façon à mettre en évidence l’existence de deux racines nulles et à réduire l’équation au quatrième degré.

Je trouve en effet, par une simple transformation de déterminant et en divisant par

Dans le cas particulier où l’on n’a plus que 2 degrés de liberté, cette équation s’écrit

ou

L’expression ne dépend que de et ou, si l’on veut, de et de Quand nous nous serons donné les deux nombres et dont le rapport doit être commensurable, nous pourrons regarder comme une constante donnée. Alors le signe de dépend seulement de celui de

Quand on s’est donné et on forme l’équation

(12)

Nous avons vu au no 42 qu’à chaque racine de cette équation correspond une solution périodique.

Considérons le cas général où l’équation (12) n’a que des racines simples ; chacune de ces racines correspond alors à un maximum ou à un minimum de Mais la fonction étant périodique, présente dans chaque période au moins un maximum et un minimum et précisément autant de maxima que de minima.

Or pour les valeurs de correspondant a un minimum, est positif ; pour les valeurs correspondant à un maximum, cette dérivée est négative.

Donc l’équation (12) aura précisément autant de racines pour lesquelles cette dérivée sera positive que de racines pour lesquelles cette dérivée sera négative, et par conséquent autant de racines pour lesquelles sera positif que de racines pour lesquelles sera négatif.

Cela revient à dire qu’il y aura précisément autant de solutions périodiques stables que de solutions instables, en donnant à ce mot le même sens que dans le no 59.

Ainsi, à chaque système de valeurs de et de correspondront au moins une solution périodique stable et une solution périodique instable et précisément autant de solutions stables que de solutions instables, pourvu que soit suffisamment petit.

Je n’examinerai pas ici comment ces résultats s’étendraient au cas où l’équation (12) aurait des racines multiples.

Voici comment il faudrait continuer le calcul.

Imaginons que l’on ait déterminé complètement les quantités

et les fonctions

et que l’on connaisse les fonctions et à une constante près. Supposons qu’on se propose ensuite de calculer d’achever la détermination des fonctions et et de déterminer ensuite les fonctions et à une constante près.

En égalant les puissances semblables de dans les équations (4), on obtient des équations de la forme suivante, analogues aux équations (7) et (8),

(13)

Les deux membres de ces équations (12) sont des fonctions périodiques de Égalons la valeur moyenne de ces deux membres. Si nous désignons par la valeur moyenne d’une fonction périodique quelconque si nous observons que, si est périodique, on a

si nous rappelons que, étant connu à une constante près, et

sont des quantités connues, nous obtiendrons les équations suivantes :

(14)

Ces équations (14) vont nous servir à calculer et et par conséquent à achever la détermination des fonctions et qui ne sont encore connues qu’à une constante près.

Si l’on additionne les équations (i4) après les avoir respectivement multipliées par

on trouve

ce qui détermine

Si dans les équations (14) on remplace par la valeur ainsi trouvée, on a, pour déterminer les six inconnues et six équations linéaires dont cinq seulement sont indépendantes.

Cela posé, on déterminera par la condition que soit nul pour conformément à l’hypothèse faite plus haut, et les cinq équations (14) restées indépendantes permettront de calculer les cinq autres inconnues.

Les équations (13) nous permettront ensuite de calculer et et, par conséquent, de déterminer les fonctions et à une constante près ; et ainsi de suite.

Solutions dégénérescentes.

80.Reprenons les équations (1) du numéro précédent

(1)

Nous avons supposé qu’il existait une solution périodique de période

posant ensuite

nous avons formé les équations aux variations

(2)

Ces équations, ayant en général quatre exposants caractéristiques différents de 0, admettront quatre solutions particulières de la forme

et étant périodiques. Nous avons appris à former ces intégrales.

Mais les équations (2) auront, en outre, deux exposants caractéristiques nuls : elles admettront donc deux solutions particulières de la forme

(3)

étant périodiques de même période que et

Comment doit-on s’y prendre pour former ces solutions (3) ?

Nous avons vu au no 42 que les équations (1) admettent une solution périodique

(4)
de période
qui se réduit à
pour

Les fonctions et sont développables suivant les puissances croissantes de

Posons maintenant

d’où

Si nous substituons cette valeur à la place de dans les équations (4), il viendra

Les fonctions et seront encore développables suivant les puissances de et de mais elles seront périodiques en et la période sera constante et égale à elles seront donc développables suivant les sinus et cosinus des multiples de

Si est une constante quelconque

est encore une solution des équations (1), puisque le temps n’entre pas explicitement dans ces équations. Cette solution contient deux constantes arbitraires et

Le no 54 nous fournit le moyen d’en déduire deux solutions des équations aux variations (2).

Ces solutions s’écrivent

et

Après la différentiation il faut faire

Or il vient

d’où
et pour

D’autre part,

ou, pour

Les solutions cherchées des équations (2) sont donc

et
avec

Je dis que les fonctions sont périodiques en de période En effet, et sont périodiques de période en cette période étant indépendante de les dérivées

(5)

seront également périodiques en Mais, pour si donc on fait après la différentiation ces quatre dérivées (5), c’est-à-dire les quatre fonctions seront périodiques en C.Q.F.D.

Ces quatre fonctions seront, comme et dont elles sont les dérivées, développables suivant les puissances croissantes et positives de (je rappelle que et dans le numéro précédent, étaient développables suivant les puissances non de mais de ).

Pour se réduit à une constante donc s’annule. Donc est divisible par de même que dans le numéro précédent était divisible par

Au contraire n’est pas divisible par

Dans un Mémoire que j’ai publié dans les Acta mathematica, t. XIII, p. 157, je suis amené à considérer des équations analogues aux équations (2) et deux solutions particulières de ces équations

J’appelle un des exposants caractéristiques, de telle sorte que est développable suivant les puissances impaires de et que est lui-même développable suivant les puissances de et est divisible par

Je suppose que l’on remplace par cette valeur, de sorte que toutes nos fonctions se trouvent développées suivant les puissances de J’annonce ensuite que et sont divisibles par En effet comme nous venons de le voir, est divisible par et par

D’autre part, nous avons manifestement

puisqu’il faut multiplier par la solution que je viens d’étudier

pour obtenir la solution considérée dans les Acta mathematica

J’ai cru devoir faire cette remarque parce qu’un lecteur inattentif aurait pu ne pas prendre garde à ce facteur et croire à une contradiction entre le résultat énoncé dans les Acta et ceux que je viens de démontrer.

Séparateur

  1. C’est ainsi, par exemple, que le premier élément de la ième colonne sera égal à pourvu que