Page:Érasme - Éloge de la folie, trad de Nolhac, 1964.djvu/128

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tairement, chacun dans la mesure de ses forces, au bien commun, de s’y donner de bonne foi, d’apprendre à la fois sans arrogance ce qu’on ignore et d’enseigner sans jalousie ce que l’on sait ! S’il en est qui sont trop illettrés pour enseigner comme il faut ou trop orgueilleux pour apprendre quelque chose, laissons-les tranquilles, puisqu’ils sont peu nombreux, et occupons-nous des bons esprits ou du moins de ceux qui donnent bon espoir. J’ai montré jadis mes notes encore informes, encore chaudes de la forge comme on dit, à des personnes fort intègres, à de très grands théologiens, à de très savants évêques : ils reconnaissaient que ces ébauches telles quelles les avaient éclairés de beaucoup de lumière pour la connaissance des saintes Écritures.


XXXIII. — Je savais que Laurent Valla, comme tu le dis, s’était avant nous occupé de ce travail, puisque c’est moi qui ai publié le premier ses annotations, et j’ai vu les commentaires de Jacques Le Febvre sur les Lettres de Paul. Plût au ciel qu’ils eussent travaillé de façon à rendre notre travail inutile ! Je tiens certes Valla pour un homme digne des plus grands éloges, plus rhéteur que théologien, qui s’est employé dans son travail sur les saintes Écritures à comparer le grec et le latin, alors qu’il ne manque pas de théologiens, qui n’ont jamais lu d’un bout à l’autre et dans le détail l’ensemble du Testament ; mais je ne suis pas de son avis en maints endroits, surtout en ce qui touche à la partie théologique. Jacques Le Febvre avait en main ses commentaires quand nous préparions notre ouvrage, et il est fâcheux que même dans nos entretiens des plus familiers nous n’ayons jamais eu l’idée l’un et l’autre de parler de notre projet. Je n’ai pas connu ce qui l’occupait avant l’impression de son ouvrage. J’applaudis vivement à son effort ; mais nous ne sommes pas non plus de son avis en maints endroits, et avec regret, puisque avec un tel ami nous aurions voulu être d’accord en tout, si on ne devait pas tenir compte plus de la vérité que d’un ami, surtout à l’égard des saintes Écritures. Mais je ne vois pas bien pourquoi tu m’opposes ces deux auteurs. Est-ce pour me détourner d’un travail que tu considères comme accompli ? Il apparaîtra que même après de si grands hommes ce n’est point sans raison que j’ai entrepris cette tâche. Veux-tu dire que les théologiens n’approuvent pas leur travail ? Je ne vois vrai-