la comprennent. Ce que nous avons senti ici-bas, comme beauté, un jour nous apparaîtra comme vérité.
Quand le Créateur relégua l’homme, loin de sa face, dans la mortalité, et lui prescrivit de trouver, par le rude sentier du monde des sens, un tardif retour à la lumière ; quand tous les êtres célestes détournèrent de lui leurs regards : elle seule, humaine, s’enferma généreusement, avec le banni délaissé, dans la mortalité. Elle plane ici-bas, abaissant son vol, autour de son favori, près du monde sensible, et, par une illusion charmante, lui peint l’Élysée sur les murs de sa prison.
Quand l’humanité, dans son enfance, reposait encore dans les tendres bras de cette nourrice, alors la sainte fureur du meurtre n’attisait point de flamme ; nulle part alors ne fumait un sang innocent. Le cœur qu’elle mène à sa douce lisière dédaigne la servile direction des devoirs ; son sentier lumineux, serpentant seulement par de plus beaux détours, descend dans la radieuse carrière de la moralité. Ceux qui vivent sous sa chaste loi, nul penchant vil ne les tente, nul arrêt du sort ne les fait pâlir : comme soumis à une sainte puissance, ils recouvrent la vie pure des esprits, le droit précieux de la liberté.
Heureux ceux qu’elle a voués à son culte… les plus purs entre des millions !… dans le sein desquels elle a daigné placer son trône, par la bouche de qui elle commande souverainement, qu’elle a choisis pour nourrir le feu sacré sur ses autels éternellement enflammés, ceux à qui seuls elle apparaît sans voile, qu’elle réunit autour d’elle dans une douce alliance ! Réjouissez-vous de ce degré d’honneur où vous a placés l’ordre suprême ! Vous fûtes, pour monter au monde des esprits, le premier degré de l’humanité !
Avant que vous eussiez apporté dans le monde l’harmonieuse symétrie, à laquelle tous les êtres obéissent avec joie… la création apparaissait à l’homme encore sauvage, comme un édifice immense enveloppé du crêpe sombre de la nuit : il voyait tout près autour de lui, à la lueur de pâles rayons,