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MAURIN DES MAURES

Enfin, ce qu’il attendait arriva. Et ce fut un bruit sorti de lui-même, et d’une telle importance que l’ombre de Rabelais et celle de Sancho en durent tressaillir de gaieté. Quand cela fut fini, Pastouré, toujours immobile et tenant toujours son lièvre au-dessus de sa tête car, jusque-là, un faux mouvement aurait pu compromettre l’heureuse arrivée de l’événement qui se préparait en lui, reprit tranquillement d’une voix calme et haute :

— Si c’est un coup de canon, il n’est pas raté, celui-là ! Et si c’est une parole, elle est bougrement bien dite. Dans bien des cas, il ne devrait y avoir de paroles que celles-là, — pourquoi le monde ne s’en mérite pas davantage. Mais vous verriez qu’on se mettrait encore dans son tort, car les gens apercevraient le sens caché de ces imprudentes paroles, et on les paierait avec le reste.

Il se tut, puis au bout d’un petit moment il ajouta :

— Et si cela sort d’un canon, c’est ce canon-là qu’il faudrait pouvoir tourner contre l’armée des imbéciles et des méchants qui ne s’en méritent pas mieux ; mais, vaï, pauvre Parlo-Soulet, de quelque manière que tu parles, tu fais entendre paroles perdues… tu… p… dans le désert !

N’ayant plus rien à ajouter d’aucune manière, il abaissa ses longs bras et arrangea son lièvre sur son échine.