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mémoires d’un communard

meurant rue des Grands-Degrés, nous nous y rendons pour l’éveiller.

Il se lève et vient avec nous ; d’autres gardes du 59e nous rejoignent. Je me rends chez ma mère où logent une dizaine d’amis. Tous s’arment et se joignent à notre petite troupe. Nous voilà une vingtaine de citoyens résolus : nous nous dirigeons alors vers l’église. Des sentinelles sont placées aux portes et nous tirons la sonnette de nuit du sacristain.

Ce dernier ouvre, mais un peu effrayé en apercevant des gens armés, il s’écrie :

— Que me voulez-vous ?

— Peu de chose : conduisez-nous au clocher, afin que nous sonnions le tocsin.

— Mais, messieurs…

— Il n’y a pas de mais… Allons, dépêchons, car nous n’avons pas le temps de parlementer.

Le sacristain, comprenant que le mieux était de faire comme nous le désirions, s’engage dans le clocher, se met de bonne grâce à la besogne et nous indique la manière de s’y prendre pour sonner vigoureusement.

A toute volée, les cloches de Saint-Nicolas-du-Chardonnet se mettent à appeler les citoyens aux armes pour la défense de Paris et de la République.

Cela remplaça très avantageusement l’Angelus du matin.

Laissant quelques hommes avec le lieutenant Beaufils, qui devait rallier le plus de monde possible, je me rends au domicile du citoyen Jourde, un de nos délégués au Comité central, habitant rue Saint-Victor, tout près de l’église Saint-Nicolas-du-Chardonnet.

Celui-ci est encore au lit ; je lui fais connaître ce qui se passe, nos divers efforts pour organiser la résistance. Il paraît fort ennuyé, mais s’habille et part rue Basfroi (?), où siège le Comité central.

Je me dirige, accompagné des citoyens demeurés dans la rue, vers l’église Saint-Marcel, dont le tocsin s’évertue à répondre à celui de Saint-Nicolas-du-Chardonnet.

Un certain nombre de gardes nationaux s’étaient rassemblés autour de l’église, et ils nous saluèrent de leurs vivats. Parmi eux se trouvaient Ledroyt, Bestetti et