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mémoires d’un communard

de l’Observatoire, nous songeâmes à la possibilité de nous emparer du chef de brigade et de son état-major, que nous savions logés dans le palais, et ce grâce aux renseignements qui nous avaient été fournis par les officiers du 21e bataillon de la garde nationale. Possédant le mot d’ordre et de ralliement, nous pénétrons sans obstacle dans le jardin. Un bataillon de chasseurs à pied se trouve à notre droite ; à gauche, campe un régiment de ligne. A chaque instant nous sommes arrêtés par les sentinelles ; enfin, nous voilà parvenus à la petite grille qui sépare le palais du grand jardin. Nous apercevons les feux de bivouac de la batterie d’artillerie, placée en arrière et à la droite du palais, vu de la rue de Vaugirard.

11 s’agit maintenant de franchir la grille, puis la porte qui se trouve en face. Nous enjambons la première et nous frappons doucement à la seconde. Un domestique, à moitié endormi, l’entr’ouvre ; nous entrons en le poussant et en l’invitant à ne pas crier. Il comprend assez facilement notre mimique.

Jusqu’ici, tout marche à merveille, mais le moindre incident peut tout perdre.

— Où se trouve le général ? demandons-nous au domestique.

— Le général ? Pourquoi ? Que lui voulez-vous ? bégaie-t-il.

— Cela n’est pas votre affaire ; il faut que nous parlions au général. Mais surtout pas de bruit, sinon ! Le brave garçon saisit de mieux en mieux, et nous mène, tout tremblant, devant une tapisserie qui masque une porte à deux battants.

Un bruit de voix se fait entendre. Chacun de nous se prépare, c’est l’instant décisif. Pendant que deux des nôtres surveillent le domestique, qui se refuse à jouer les « chevalier d’Assas », j’entr’ouvre la porte avec la plus grande précaution.

Cinq officiers se tiennent debout devant une vasle carte d’état-major étendue devant eux et sur laquelle ils plantent de petits drapeaux tricolores. La porte s’ouvre alors toute grande et nous faisons irruption dans la pièce.

Surpris, les officiers font le geste de vouloir se défen-