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Page:Anatole France - La Révolte des anges.djvu/206

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du diamant ou l’épée flamboyante déchirent leur corps subtil, ils sentent une douleur plus cruelle que n’en peuvent éprouver les hommes, car leur chair est plus exquise, et si quelque organe essentiel est détruit, ils tombent inertes, se décomposent lentement, se résolvent en nébuleuses et flottent insensibles, épars, durant de longs âges, dans l’éther froid. Et quand enfin ils reprennent l’esprit avec la forme, ils ne retrouvent pas toute la mémoire de leur vie passée. Ainsi qu’il est naturel, les anges craignent la souffrance, et les plus braves d’entre eux se troublent à la pensée de perdre la lumière et le doux souvenir. S’il en était autrement, la race angélique ne connaîtrait ni la beauté de la lutte ni la gloire du sacrifice. Ceux qui combattirent dans l’Empyrée, avant le commencement des temps, pour ou contre le Dieu des Armées, se seraient livrés sans honneur à de feintes batailles, et je ne pourrais pas vous dire, enfants, avec un juste orgueil : « J’étais là. »

» Lucifer donna le signal du combat et s’y jeta le premier. Nous fondîmes sur l’ennemi, croyant le détruire aussitôt et emporter d’un