Page:Anatole France - La Révolte des anges.djvu/229

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dieux, de démiurges, de démons, tels que Mithra, Thamous, la bonne Isis, Euboulos, méditaient de s’emparer du monde pacifié. De tous ces esprits, Iahveh semblait le moins préparé à la victoire. Son ignorance, sa cruauté, son faste, son luxe asiatique, son mépris des lois, son affectation à se rendre invisible, devaient offenser ces Hellènes, ces Latins, qui avaient reçu les leçons de Dionysos et des Muses. Il sentit lui-même qu’il n’était pas capable de gagner les cœurs des hommes libres et des esprits polis, et il usa de ruse. Pour séduire les âmes, il imagina une fable qui, sans être aussi ingénieuse que les mythes, dont nous avons orné l’esprit de nos disciples antiques, pouvait toucher les intelligences débiles, qui, partout, se trouvent en foule épaisse. Il proclama que les hommes, ayant tous commis un crime envers lui, un crime héréditaire, en portaient la peine dans leur vie présente et dans leur vie future (car les mortels s’imaginent follement que leur existence se prolonge dans les enfers) et l’astucieux Iahveh fît connaître qu’il avait envoyé son propre fils sur la terre pour racheter de son