Page:Anatole France - La Révolte des anges.djvu/233

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ches. Cette coupole recouvrait une statue de l’Amour, taillant son arc, ouvrage d’un sculpteur athénien. L’enfant semblait respirer ; la joie jaillissait de ses lèvres ; tous ses membres étaient harmonieux et souples. J’honorais cette image du plus puissant des dieux, et j’enseignais aux villageois à lui porter en offrande une coupe couronnée de verveine et pleine d’un vin de deux années.

» Un jour que j’étais assis à ma coutume aux pieds du Dieu, méditant des préceptes et des chansons, un homme inconnu, farouche, la barbe inculte, s’approcha du temple, franchit d’un bond les degrés de marbre et, plein d’une allégresse féroce :

» — Péris, cria-t-il, empoisonneur des âmes, et puissent avec toi périr la joie et la beauté.

» Il dit et tire de sa ceinture une hache qu’il lève sur le Dieu. J’arrête son bras, je le renverse et le foule à la corne de mes pieds.

» — Démon, me cria-t-il avec un noir courage, laisse-moi renverser cette idole et tu pourras me tuer après.

» Je n’exauçai point son atroce prière ; mais pressai de tout mon poids sa poitrine, qui cra-