Page:Anatole France - La Révolte des anges.djvu/71

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s’émouvoir. Dès lors, M. des Aubels soupçonna véhémentement M. Sariette d’être l’auteur des larcins qu’il dénonçait avec horreur ; et il pensa tout de suite rechercher les complices du crime. Quant aux mobiles, il ne s’en inquiétait pas : on trouve toujours des mobiles. M. des Aubels offrit à M. René d’Esparvieu de faire surveiller discrètement l’hôtel par un agent de la Préfecture.

— Je vous ferai donner, dit-il, Mignon. C’est un excellent serviteur, attentif et prudent.

Le lendemain matin, dès six heures, Mignon se promenait devant l’hôtel d’Esparvieu. La tête dans les épaules, portant des accroche-cœur qu’on voyait sous les bords étroits de son chapeau melon, l’œil de profil, une moustache énorme, d’un noir mat, des mains, des pieds gigantesques, d’un aspect enfin mémorable, il allait régulièrement du plus proche des grands piliers à têtes de bélier, qui décorent l’hôtel de la Sordière, jusqu’à l’extrémité de la rue Garancière, vers le chevet de l’église Saint-Sulpice et le dôme de la chapelle de la Vierge. Dès lors, on ne put ni sortir de l’hôtel d’Esparvieu ni y entrer sans se sentir épié