Page:Aristote - Poétique et Rhétorique, trad. Ruelle.djvu/115

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des raisonnements tirés de loin. Or nous délibérons sur des questions qui comportent deux solutions diverses : car personne ne délibère sur des faits qui ne peuvent avoir été, être, ou devoir être autrement qu’ils ne sont présentés ; auquel cas, il n’y a rien à faire qu’à reconnaître qu’ils sont ainsi.

XIII. Il y a lieu, au contraire, de former des syllogismes ou des conclusions, soit d’après des arguments réduits antérieurement en syllogismes, soit par des propositions non réduites en syllogismes, mais qui ont besoin de l’être en raison de leur caractère improbable. Il arrive nécessairement que, parmi ces dernières, l’une n’est pas facile à suivre, en raison de son long développement (on suppose le cas où le juge est d’un esprit simple), et que les autres ne sont pas persuasives, comme n’étant pas puisées dans des faits reconnus ou probables. Il est donc nécessaire que l’on ait recours à l’enthymème et à l’exemple, dans les questions susceptibles de solutions multiples et diverses ; — à l’exemple comme induction, et à l’enthymème comme syllogisme, — composés de termes peu nombreux et souvent moins nombreux que ceux qui constituent le syllogisme[1]. En effet, si quelqu’un de ces termes est connu, il ne faut pas l’énoncer ; l’auditeur lui-même le supplée. Si, par exemple, on veut faire entendre que Dorieus[2] a vaincu dans un concours « avec couronne », il suffit de dire qu’il a gagné le prix aux jeux olympiques, et il n’est pas nécessaire d’ajouter que les jeux olympiques sont un concours avec couronne, car tout le monde le sait.

XIV. Il y a peu de propositions nécessaires parmi

  1. Le syllogisme proprement dit, celui de la dialectique.
  2. Athlète célèbre, fils du Diagoras de Rhodes que Pindare a célébré (ol. VII), a été mentionné lui-même par Thucydide (III, 8).