Page:Armagnac - Quinze Jours de campagne, 1889.djvu/101

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avant de la gare, avaient pris pour les cris des Prussiens en marche les injures bruyantes qu’échangeaient quelques ivrognes en train de se disputer avec fracas sur la route de Donchery. Ils étaient revenus au grand galop, avaient fait lever les ponts derrière eux et communiqué à tous l’effroi qu’ils avaient éprouvé. Et cependant, malgré ces inquiétudes terribles, malgré ces alertes, le relâchement dans les habitudes militaires en était venu à un point incroyable. Tandis que nous traversions les vastes prairies qui séparent Remilly de Douzy, le commandant des mobiles de Sedan, qui avait été envoyé en expédition dans ce dernier village, reçut l’ordre de rentrer immédiatement dans la place. II s’en approcha avec son bataillon par le faubourg de Balan et arriva sans difficulté jusqu’à la porte de la ville. Il lui fallut plus d’une demi-heure pour arriver à appeler l’attention des sentinelles et plus d’une heure pour se faire ouvrir les portes. Un détachement ennemi eût pu s’approcher sans risque des remparts, y placer des échelles et s’emparer par un coup de main d’une ville que gardaient des soldats endormis.

Le 31 août, l’Empereur adressa à l’armée une proclamation, la dernière, qui fut reçue avec une complète indifférence ou critiquée avec amertume.

« Soldats, disait-il, les débuts de la guerre n’ayant pas été heureux, j’ai voulu, en faisant abstraction de toute préoccupation personnelle, donner le commandement des armées aux maréchaux que désignait plus particulièrement l’opinion publique.

« Jusqu’ici le succès n’a pas couronné vos efforts ; néanmoins j’apprends que l’armée du maréchal Bazaine s’est refaite sous les murs de Metz, et celle du maréchal de Mac-Mahon n’a été que légèrement