Page:Armagnac - Quinze Jours de campagne, 1889.djvu/165

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

contrecarrer leurs plans, l’armée française semblait leur en faciliter l’exécution.

La bataille avait été, eu égard au nombre des troupes engagées, l’une des plus meurtrières du siècle. Un seul régiment allemand perdit 1785 hommes, dont 552 morts. Le total des pertes était pour les Allemands de 15 970 hommes dont 4421 morts, pour nous de 16 859 hommes dont 1367 morts seulement et 5472 disparus.

Le 18, le maréchal Bazaine, dirigeant de nouveau l’armée sur la route de Verdun, rencontra les Allemands aux environs de Gravelotte et de Saint-Privat. Là eut lieu une lutte effroyable. Les Allemands, qui avaient eu le temps de masser leurs troupes, attaquèrent, avec 250 000 hommes et 700 canons, les 150 000 hommes de l’armée française. Le maréchal Canrobert, qui défendait Saint-Privat avec le 6e corps, fut entouré par 80 000 ennemis. Il tint jusqu’à 8 heures du soir. Enfin, écrasé sous le nombre, sans réserves, sans espoir d’être secouru, malgré les demandes les plus pressantes, il abandonna Saint-Privat. Sa retraite fut protégée par la garde, qui n’avait pas pris part au combat et était demeurée l’arme au bras à quelques kilomètres du champ de bataille, où gisaient 32 000 hommes tués ou blessés.

Le maréchal Bazaine ne parut pas sur le champ de bataille. Il donna négligemment ses ordres du haut des forts de Metz, refusant, malgré les plus pressantes instances du général Bourbaki, de laisser engager la garde, s’obstinant à considérer comme un engagement sans conséquence cette grande bataille, où nos troupes montrèrent tant de solidité, tant d’entrain, une si héroïque bravoure et qui, conduite avec énergie et ténacité, pouvait nous ouvrir la route de Paris.