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seule considération de ces deux idées ne suffit pas pour faire juger si l’on doit affirmer ou nier l’une de l’autre, il a besoin de recourir à une troisième idée, et cette troisième idée s’appelle moyen.

» Le moyen étant une fois comparé avec l’attribut de la conclusion (ce qui ne peut être qu’en affirmant ou niant), fait la proposition qu’on appelle majeure, à cause que cet attribut de la conclusion s’appelle grand terme.

» Et, étant une autre fois comparé avec le sujet de la conclusion, il faut celle qu’on appelle mineure, à cause que le sujet de la conclusion s’appelle petite terme.

» Et puis vient la conclusion, qui est la proposition même qu’on avait à prouver, et qui, avant que d’être prouvée, s’appelait question.

CHAPITRE III. — Règles générales des syllogismes.

» Règle I. Le moyen ne peut être pris deux fois particulièrement ; mais il doit être pris au moins une fois universellement.

» Car, devant unir ou désunir les deux termes de la conclusion, il est clair qu’il ne peut le faire s’il est pris pour deux parties différentes d’un même tout, parce que ce ne sera pas peut-être la même partie qui sera unie ou désunie de ces deux termes.

» Règle II.Les termes de la conclusion ne peuvent point être pris plus universellement dans la conclusion que dans les prémisses.

» Règle III. On ne peut rien conclure de deux propositions négatives.

» De ce que les Espagnols ne sont pas Turcs, et de ce que les Turcs ne sont pas chrétiens, il ne s’ensuit pas que les Espagnols ne soient pas chrétiens, aussi que le Chinois le soient, quoiqu’ils ne soient pas plus Turcs que les Espagnols.

» Règle VI. De deux propositions particulières il ne s’ensuit rien.

» Car si elles sont toutes deux affirmatives, le moyen y sera pris deux fois particulièrement.

CHAPITRE IV. — Des figures et des modes des syllogismes en général ; qu’il ne peut y avoir que quatre figures.

» On peut dire en général qu’il y a autant de sortes de syllogismes qu’il peut y avoir de différentes manières de disposer, en gardant ces règles, les trois propositions d’un syllogisme et les trois termes dont elles sont composées.

» La disposition des trois propositions selon leur quatre différences, A, E, I, O, s’appelle mode.

» Et la disposition des trois termes, c’est-à-dire du moyen avec les deux termes de la conclusion s’appelle figure.

» Ou le moyen est sujet en la majeure et attribut en la mineure, ce qui fait la première figure ;

» Ou il est attribut en la majeure et en la mineure, ce qui fait la deuxième figure ;

» Ou il est sujet en l’une et en l’autre, ce qui fait la troisième figure ;

» Ou il est enfin attribut dans la majeure et sujet en la mineure, ce qui peut faire une quatrième figure.

CHAPITRE X. — Principe général par lequel, sans aucune réduction aux figures et aux modes, on peut juger de la bonté ou du défaut de tout syllogisme.

» Nous avons vu comme on peut juger si les arguments sont concluants