Page:Arnauld et Nicole - Logique de Port-Royal, Belin, 1878.djvu/239

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Ces fausses disjonctions sont une des sources les plus communes des faux raisonnements des hommes.


Des syllogismes copulatifs.


Ces syllogismes ne sont que d’une sorte, qui est quand on prend une proposition copulative niante, dont ensuite on établit une partie pour ôter l’autre.

Un homme n’est pas tout ensemble serviteur de Dieu et idolâtre de son argent ;

Or, l’avare est idolâtre de son argent :

Donc il n’est pas serviteur de Dieu.

Car cette sorte de syllogisme ne conclut point nécessairement, quand on ôte une partie pour mettre l’autre, comme on peut voir par ce raisonnement tiré de la même proposition :

Un homme n’est pas tout ensemble serviteur de Dieu et idolâtre de l’argent ;

Or les prodigues ne sont point idolâtres de l’argent :

Donc ils sont serviteurs de Dieu.


CHAPITRE XIII

Des syllogismes dont la conclusion est conditionnelle.


On a fait voir qu’un syllogisme parfait ne peut avoir moins de trois propositions ; mais cela n’est vrai que quand on conclut absolument, et non quand on ne le fait que conditionnellement, parce qu’alors la seule proposition conditionnelle peut enfermer une des prémisses outre la conclusion, et même toutes les deux.

Exemple : si je veux prouver que la lune est un corps raboteux, et non poli comme un miroir, ainsi qu’Aristote se l’est imaginé, je ne puis le conclure absolument qu’en trois propositions.

Tout corps qui réfléchit la lumière de toutes parts est raboteux ;

Or, la lune réfléchit la lumière de toutes parts :

Donc la lune est un corps raboteux.

Mais je n’ai besoin que de deux propositions pour la conclure conditionnellement en cette manière :

Tout corps qui réfléchit la lumière de toutes parts est raboteux ;

Donc si la lune réfléchit la lumière de toutes parts, c’est un corps raboteux.

Et je puis même renfermer ce raisonnement en une seule proposition, ainsi :

Si tout corps qui réfléchit la lumière de toutes parts est raboteux, et que