Page:Arnauld et Nicole - Logique de Port-Royal, Belin, 1878.djvu/259

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cidentelle de la mort d’un homme que sa chaleur aura fait mourir, parce qu’il était mal disposé.

Le père est cause prochaine de son fils.

L’aïeul n’en est que la cause éloignée.

La mère est une cause productive.

La nourrice n’est qu’une cause conservante.

Le père est une cause univoque à l’égard de ses enfants, parce qu’ils lui sont semblables en nature.

Dieu n’est qu’une cause équivoque à l’égard des créatures, parce qu’elles ne sont pas de la nature de Dieu.

Un ouvrier est la cause principale de son ouvrage ; ses instruments n’en sont que la cause instrumentale.

L’air qui entre dans les orgues est une cause universelle de l’harmonie des orgues ;

La disposition particulière de chaque tuyau, et celui qui en joue, en sont les causes particulières qui déterminent l’universelle.

Le soleil est une cause naturelle.

L’homme, une cause intellectuelle à l’égard de ce qu’il fait avec jugement.

Le feu qui brûle du bois est une cause nécessaire.

Un homme qui marche est une cause libre.

Le soleil, éclairant une chambre, est la cause propre de sa clarté ; l’ouverture de la fenêtre n’est qu’une cause ou condition, sans laquelle l’effet ne se ferait pas, conditio sine qua non.

Le feu, brûlant une maison, est la cause physique de l’embrasement ; l’homme qui y a mis le feu en est la cause morale.

On rapporte encore à la cause efficiente la cause exemplaire, qui est le modèle que l’on se propose en faisant un ouvrage, comme le dessin d’un bâtiment par lequel un architecte se conduit[1] ; ou généralement ce qui est cause de l’être objectif de notre idée, ou de quelque autre image que ce soit, comme le roi Louis XIV est la cause exemplaire de son portrait.

La cause matérielle[2] est ce dont les choses sont formées, comme l’or est la matière d’un vase d’or ; ce qui convient ou ne convient pas à la matière convient ou ne convient pas aux choses qui en sont composées.

  1. C’est cette cause que Platon appelait l’idée, τὸ εἶδος, que ses successeurs appelaient le modèle, τὸ παραδεϊγμα. Les autres causes s’y réduisent selon les platoniciens. « His quintam Plato adjicit, » dit Sénèque, « exemplar, quam ipse ideam vocat, hoc est enim ad quod respiciens artifex id quod destinabat, efficit. » Lettre, XLV.
  2. Aristote l’appelait τὴν ὕλην.