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OUVRAGES COMPOSÉS AVANT L’ÉPISCOPAT.

Ce livre commence ainsi : « Avec l’aide de la miséricorde divine. »


CHAPITRE XVI.

actes contre fortunat, manichéen. — un livre.


1. Dans le même temps, durant ma prêtrise, j’ai discuté contre un certain Fortunat, prêtre manichéen, qui avait vécu longtemps à Hippone et y avait séduit tant de personnes, que ce séjour lui était devenu très-agréable à cause de ses adeptes. Cette discussion fut recueillie au moment même par des sténographes, comme s’il s’agissait de faits mémorables ; car la relation porte la date du jour et l’indication du Consulat. C’est cette discussion que nous avons pris soin de réunir en un livre. On y traite la question de l’origine du mal. J’affirmais que le mal vient pour l’homme du libre arbitre de sa volonté ; et lui, s’efforçait d’établir que la nature du mal est coéternelle à Dieu. Le jour suivant il finit par avouer qu’il ne trouvait plus rien à nous répondre. Toutefois il ne se fit pas catholique, mais du moins il quitta Hippone.

2. Ce que j’ai dit en ce livre : que «l’âme est faite par Dieu, comme toutes les autres choses qui ont été faites par lui ; et qu’entre tout ce que le Dieu tout-puissant a fait, elle occupe le rang principal[1] ; » ne se doit prendre que dans le sens général qui s’applique à toute créature raisonnable, bien qu’il soit difficile, ainsi que je l’ai dit, de trouver dans les saintes Écritures le nom d’âme appliqué aux Anges. De même ailleurs : « Je dis qu’il n’y a pas de péché si on ne pèche pas jar sa propre volonté[2]. » J’ai voulu entendre ici le péché qui n’est pas en même temps la peine du péché ; car j’ai expliqué dans cette discussion même ce qu’il faut dire de cette peine[3]. J’ai dit encore : « Afin que cette même chair, qui nous a torturés de ses peines quand nous demeurions dans le péché, nous soit soumise dans la résurrection, et qu’elle ne nous tourmente d’aucune souffrance pour nous empêcher de garder la loi et les préceptes divins[4]. » Il ne faudrait pas comprendre ces paroles en ce sens que dans le royaume de Dieu, où nous posséderons nos corps incorruptibles et immortels, nous ayons à emprunter aux divines Écritures la loi et les préceptes ; mais dans ce sens que la loi éternelle sera là, parfaitement observée, et que nous trouverons les deux préceptes de l’amour de Dieu et du prochain non dans la lecture, mais dans la charité parfaite et éternelle.

Cet ouvrage commence ainsi : « Le cinq des calendes de septembre, les très-illustres Arcadius, Auguste pour la deuxième fois, et Rufin étant consuls. »


CHAPITRE XVII.

de la foi et du symbole. — un livre.


Vers la même époque, par l’ordre et en présence des évêques qui célébraient à Hippone un concile plénier de toute l’Afrique, je fis, étant prêtre, une conférence sur la foi et sur le symbole. C’est cette conférence dont j’ai formé un livre, sur les instances pressantes de quelques-uns de nos plus chers et intimes amis. J’y disserte sur ces grands sujets, en m’attachant plus aux choses elles-mêmes qu’à l’arrangement des mots que l’on donne à retenir à ceux qui demandent le baptême. Parlant dans ce livre de la résurrection de la chair, je dis : « Selon la foi chrétienne, qui est infaillible, le corps ressuscitera. Cette vérité paraît incroyable à qui ne fait attention qu’à la chair en son état actuel, et ne considère pas ce qu’elle doit être dans son état futur : dans ce temps d’angélique changement, il n’y aura plus de chair et de sang, il n’y aura plus qu’un corps[5]. » Ajoutez tout ce que j’ai enseigné sur la commutation des corps terrestres en corps célestes, selon ce que dit l’Apôtre : « La chair et le sang ne posséderont pas le royaume de Dieu. » Si l’on comprenait mes paroles en ce sens que le corps terrestre tel que nous l’avons sera changé par la résurrection en un corps céleste, de telle façon qu’il n’ait ni ses membres ni la substance de sa chair actuelle, ce serait une erreur, et il la faudrait corriger. Car nous savons que le corps de Notre-Seigneur, après sa résurrection, a été non-seulement montré aux regards avec les mêmes membres, mais s’est livré au toucher, et que lui-même confirmait la réalité de sa chair par ces paroles : « Voyez et touchez : un esprit n’a pas de chair et d’os comme vous voyez que j’en ai[6]. » D’où il suit que l’Apôtre n’a pas nié que la substance de la chair ne se retrouvât au royaume de Dieu ; il a voulu seulement, par ce nom de chair et de

  1. Disc. I, n. 13.
  2. Disc. II, n. 21.
  3. Disc. I, n. 15
  4. Disc. II, n. 22.
  5. C. X, n. 23.
  6. Luc, XXIV, 39.