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Page:Augustin - Œuvres complètes, éd. Raulx, tome IX.djvu/368

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sa vérité te couvrira d’un bouclier ». Parce que tu as compté sur lui et que tu as mis en lui tout ton espoir, voici, dit le Prophète : quoi donc ? « Tu n’auras point à craindre des frayeurs de la nuit, ni de la flèche qui vole tu pendant le jour, ni le mal qui se glisse dans tu les ténèbres, ni la ruine et le démon de midi[1] ». Quel est celui qui ne craindra point ? Celui qui ne compte point sur lui, mais sur le Christ. Quant à ceux qui présument d’eux-mêmes, bien qu’ils aient espéré s’asseoir à côté du Christ, pour juger, bien qu’ils se soient promis d’être à sa droite, et d’entendre ces paroles : « Venez, bénis de mon Père, et recevez le royaume qui vous est tu préparé dès l’origine du monde[2] » ; voilà qu’est venu le démon de midi, c’est-à-dire que le feu de la persécution s’est allumé dans sa violence, et sous le coup de l’effroi, ils sont déçus dans leur espérance de juger ; c’est d’eux qu’il est dit : « Mille tomberont à côté de vous ». D’autres seront déçus dans l’espoir d’une récompense de leurs bons offices, et c’est d’eux qu’il est dit : « Dix mille tomberont à votre droite ». « Quant à vous », qui êtes la tête et le corps, la ruine et le démon de midi « n’approchera point de vous », parce que le Seigneur connaît ceux qui lui appartiennent[3].
11. « Toutefois, vous jetterez les yeux autour de vous, et vous verrez ce qu’on rendra aux pécheurs[4] ». Qu’est-ce à dire ? Pourquoi cette expression « toutefois ? » Parce que les impies ont pu accabler vos serviteurs de leur orgueil, parce qu’ils ont pu persécuter vos serviteurs. Après avoir persécuté vos serviteurs, doivent-ils donc demeurer impunis ? Non, assurément. Quoique vous l’ayez permis, Seigneur, et que vos saints aient mérité par là leurs couronnes : « Toutefois, vous jetterez les yeux autour de vous, et vous verrez le sort des impies ». Ils recueilleront alors le mal qu’ils ont voulu, et non le bien que, sans le savoir, ils ont procuré. Il nous faut maintenant les yeux de la foi, pour voir qu’ils s’élèvent dans le temps pour pleurer dans l’éternité, et que si Dieu leur laisse pour un temps le pouvoir contre ses serviteurs, il leur dira un jour : « Allez au feu éternel, qui est préparé au diable et à ses anges[5] ». Mais pour peu que l’on ait ces yeux de la foi dont il est dit : « Vous verrez de vos yeux » ; il n’est pas sans importance de voir l’impie florissant sur la terre, de tenir les yeux sur lui, afin de considérer par la foi ce qu’il souffrira enfin, s’il ne se corrige point : car ceux qui veulent tonner maintenant sont ensuite foudroyés. « Toutefois vous jetterez les yeux, et vous verrez le sort des impies ».
12. « Car c’est vous, Seigneur, qui êtes mon espérance ». Voilà qu’il en vient à ce qui l’a préservé de sa ruine et du démon de midi : « C’est que vous êtes, Seigneur, mon espérance, vous avez placé très haut votre demeure[6] ». Qu’est-ce à dire que votre séjour est dans les hauteurs ? Il en est beaucoup qui cherchent en Dieu un abri contre les troubles du temps. Or, il est fort élevé, il est dans le secret, cet asile de Dieu, qui nous abritera contre la colère à venir. Il est intérieur cet asile que vous avez établi très haut. « De vous n’approcheront point les maux, et le fléau n’abordera point votre tabernacle, « Car Dieu a donné à ses anges ordre de vous garder dans toutes vos voies, Ils vous porteront dans leurs mains, de peur que vous ne vous heurtiez contre la pierre ». Telles sont les paroles dont se servit le diable pour tenter Notre-Seigneur Jésus-Christ. Mais parce qu’il faut les considérer avec plus d’attention, remettons-les à demain, puisque demain je dois vous parler encore. Nous reprendrons cet endroit du psaume, afin de vous éviter l’ennui : en trop abrégeant, dans ces difficultés, nous ne pourrions nous faire comprendre.

  1. Ps. 90,2-6
  2. Mt. 25,31
  3. 2 Tim. 2,19
  4. Ps. 90,8
  5. Mt. 25,41
  6. Ps. 90,9