ceux qui étaient sous la Loi et de nous rendre ses enfants adoptifs[1] ; » l’Apôtre devait montrer aussi que les Gentils, qui n’étaient pas asservis à cette Loi, n’en étaient pas moins les enfants adoptifs de Dieu : c’est ce qu’il fait en rappelant que le Saint-Esprit leur a été donné comme aux Juifs. Aussi, quand saint Pierre voulut se défendre lui-même, devant les Juifs devenus chrétiens, pour avoir donné le baptême au centurion Corneille sans qu’il fût circoncis, il dit qu’il n’avait pu refuser de répandre l’eau sainte sur des hommes qui manifestement avaient reçu le Saint-Esprit[2]. C’est également cette imposante preuve que saint Paul a déjà fait valoir quand il a dit précédemment : « Je veux seulement vous adresser cette question : Est-ce par les œuvres de la Loi que vous avez reçu l’Esprit ou par l’audition de la foi ? » et quand il a ajouté un peu après : « Celui donc qui vous communique son Esprit et qui opère en vous des miracles, le fait-il par les œuvres de la Loi ou par l’audition de la foi[3] ? » C’est ici le même raisonnement : « Parce que vous êtes ses enfants, dit-il, Dieu a envoyé dans vos cœurs l’Esprit de son Fils, criant : Abba ; Père. »
32. Dieu fait tout servir à ses desseins, les démons mêmes[4]. – Ce qui prouve avec la dernière évidence que l’Apôtre parle ici aux Gentils convertis, à qui d’ailleurs son Épître est adressée, c’est ce qui suit. « Ainsi donc, dit-il, nul n’est plus serviteur, mais fils ; » ce qui rappelle les paroles précédentes : « Tant que l’héritier est enfant, il ne diffère point d’un serviteur. – Mais si on est fils, on est aussi héritier par Dieu ; » autrement, par la miséricorde de Dieu et non par suite des promesses faites aux patriarches, dont on ne descend point corporellement comme les Juifs, tout enfant que l’on soit d’Abraham par l’imitation de sa foi, dont on a mérité la grâce parla miséricorde du Seigneur.« Autrefois, à la vérité, ignorant Dieu ; vous étiez asservis à ceux qui par leur nature ne « sont pas des dieux. » Évidemment ce n’est pas aux Juifs, c’est aux Gentils qu’il s’adresse ici ; de plus il ne dit pas : nous étions asservis, mais : « Vous étiez asservis. » N’est-il donc pas assez probable, au moins maintenant, qu’aux Gentils encore il rappelait précédemment qu’ils avaient été asservis aux éléments de ce monde comme à des tuteurs et à des curateurs[5] ? Car ces éléments du monde ne sont point des dieux par leur nature, « ni au ciel, ni sur la terre, comme il y a beaucoup de dieux et beaucoup de seigneurs ; quoique pour nous il n’y ait qu’un seul Dieu, savoir le Père, de qui viennent toutes choses, nous surtout qui demeurons en lui ; et qu’un seul Seigneur, savoir Jésus-Christ, par qui toutes choses viennent, et nous spécialement[6]. » En disant : « Vous étiez asservis à ceux qui par leur nature ne sont pas des dieux » l’Apôtre rappelle clairement que par nature il n’y a qu’un seul Dieu véritable, celui en qui tout cœur fidèle et catholique voit la Trinité. Quant à ceux qui par leur nature ne sont pas dès dieux, si l’Apôtre les a appelés des tuteurs et des curateurs, c’est que parmi toutes les créatures, soit parmi celles qui restent dans la vérité pour glorifier Dieu, soit parmi celles qui n’y sont pas restées et qui ont cherché plutôt leur propre gloire, il n’en est aucune qui de gré ou de force ne seconde les desseins de la divine Providence ; avec cette différence que si la créature sert Dieu avec bonne volonté, elle sera l’instrument de sa bonté, au lieu que si elle s’y refuse, elle sera l’instrument de sa justice.D'ailleurs si les anges prévaricateurs, aussi bien que leur chef, n’étaient point entre les mains de la divine Providence comme des tuteurs et des curateurs, le Seigneur ne nommerait pas le diable le magistrat de ce siècle, et la puissance des Apôtres eux-mêmes ne, l’emploierait pas à corriger les coupables. Saint Paul dit néanmoins : « Je les ai livrés à Satan, pour leur apprendre à ne plus blasphémer[7] ; » il ne dirait pas non plus ailleurs, en vue de procurer le salut des pécheurs : « Pour moi, absent de corps, il est vrai, mais présent en esprit, j’ai déjà décidé, comme si j’étais là, et après vous avoir réunis avec mon esprit au nom de Jésus-Christ Notre-Seigneur, et par l’autorité même de Jésus-Christ Notre-Seigneur, de livrer à Satan, pour la mort de son corps, l’auteur d’un pareil attentat, afin que son âme soit sauvée au jour du Seigneur Jésus[8]. » Du reste un magistrat ne fait que ce que lui permet l’empereur établi alors ; ainsi les tuteurs et les curateurs de ce monde n’agissent jamais qu’avec la permission du Seigneur. Rien ne lui échappe, comme tant de choses échappent à un homme ; en rien non plus sa puissance ne lui fait défaut ; de sorte que ces tuteurs et.cescurateurs
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