Page:Avezac-Lavigne - Diderot et la Société du baron d’Holbach, 1875.djvu/156

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De plus, Hume démontra que, malgré tous les obstacles artificiels, l’argent restait toujours, au bout d’un certain temps, dans un rapport déterminé avec le développement agricole et manufacturier de la population[1].

Les économistes français étendirent au blé ce théorème de Hume, et firent voir qu’il tendait toujours à s’établir, entre la production et la répartition du blé et les autres fonctions économiques, un équilibre, ou ordre naturel, qu’il fallait bien se garder de contrarier, sous peine des plus grands dangers. Ce point capital des idées de Quesnay et de Turgot a été clairement exposé par Condorcet[2]. Mais cette vue, quoique très-réelle au fond, avait le défaut de faire abstraction du temps. C’est la confiance absolue qu’ils avaient dans cet équilibre spontané, qui a conduit les économistes à la détestable formule : laissez faire, laissez passer.

Par cet exposé des idées contenues dans les principaux ouvrages de Hume, on peut se rendre compte de la considération qu’il dut trouver au sein de la société où se trouvaient réunis les esprits les plus capables de bien sentir leur profondeur et leur originalité.

À l’arrivée de Rousseau à Paris, Diderot écrivait à son amie[3] : « Il y a trois jours que Rousseau est

  1. Voir à ce sujet le beau travail de M. P. Laffitte, dans la Politique positive, page 115.
  2. Du Commerce du blé.
  3. Le 20 décembre 1765. Diderot paraît avoir fait faire auprès de Rousseau des démarches en vue d’une réconciliation ;