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Page:Boutroux - L’idéal scientifique des mathématiques.djvu/146

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sont de pures fictions introduites pour des raisons de commodité, ou du moins représentant des grandeurs et combinaisons de grandeurs sur lesquelles l’algèbre classique n’aurait pas de prise.

Comme exemple d’expression de la première sorte, nous pouvons citer le déterminant[1], dont Leibniz[2] avait déjà entrevu la définition, et qui fut introduit en algèbre par Gabriel Cramer en 1750[3]. Il n’y a, dans le déterminant, d’autre élément nouveau qu’un certain symbolisme particulièrement heureux. Ce symbolisme ne rend pas seulement les calculs faciles et rapides ; il permet aussi de deviner, avant que les calculs soient achevés, certains caractères intéressants des résultats. La raison en est que le symbole du déterminant met et maintient en évidence la composition des nombres qu’il sert à représenter. De même que l’algèbre élémentaire n’effectue pas, d’ordinaire, les opérations simples (additions, multiplications ou divisions), afin d’avoir à sa disposition des expressions immédiatement démontables[4], de même la théorie des déterminants a affaire à certains groupements remarquables d’opérations simples qu’il vaut mieux ne pas résoudre en leurs parties, parce que c’est la structure de ces groupements qui nous

  1. Rappelons que le déterminant du second ordre a b
    c d
    est défini comme étant égal à adbc ; le déterminant du troisième ordre a b c
    d e f
    g h k
    est défini comme étant égal à
    a . e f
    h k
    b . d f
    g k
    + c . d e
    g h
    ,

    et ainsi de suite.

  2. Cf. une lettre de Leibniz à l’Hospital (Acta Eruditorum, Leipzig, 1700).
  3. Dans l’Introduction à l’Analyse des lignes courbes, Genève, 1750.
  4. Cf. supra, chap. II, § 1.