Page:Boutroux - L’idéal scientifique des mathématiques.djvu/165

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Si l’on voulait faire une étude approfondie des rapports de la Mathématique et de la Logique, il faudrait commencer par définir rigoureusement ce que l’on entend par ces deux mots. Or, ce n’est pas là chose aisée et c’est pourquoi la question qui nous préoccupe a donné lieu, si souvent, à des malentendus.

Comment obtenir, en effet, une définition générale des Mathématiques ? Pour y parvenir, on devrait, semble-t-il, rapprocher toutes les théories qui relèvent de cette science, et chercher à en dégager les caractères communs. Mais, outre que l’on se mettra difficilement d’accord sur l’importance relative des divers caractères observés, qui ne voit qu’une définition ainsi donnée a posteriori sera presque certainement trop étroite ? Sous le nom de Mathématique, en effet, nous comprenons non seulement toutes les théories déjà construites par les mathématiciens mais aussi toutes celles qu’ils étudieront dans l’avenir. Et, pour le savant moderne en quête de découvertes nouvelles, la question principale est précisément de savoir comment on pourra s’écarter des routes déjà frayées sans cependant détourner la Mathématique de sa destination finale.

La plupart des penseurs qui ont étudié les fondements de l’Analyse définissent cette science par son objet. Parce que l’Analyse opère d’ordinaire sur des quantités algébriques continues, et parce que la notion de quantité continue paraît équivalente à celle de grandeur géométrique, on dira, par exemple, que l’Analyse est la science des relations spatiales. Louis Couturat semblablement — se fondant sur les tentatives effectuées par certains logiciens anglais pour ramener la notion de nombre irrationnel (quantité algébrique) à la notion d’ordre — définissait la Mathématique, en 1904, comme « la science formelle des relations d’ordre ». Et il écri-