Page:Boutroux - L’idéal scientifique des mathématiques.djvu/65

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Platon et d’Eudoxe[1]. Et, si l’on excepte quelques auteurs secondaires, comme Diophante — qui sont des calculateurs[2] autant que des théoriciens — on ne voit pas que ces savants, là même où ils ont innové, aient rompu avec les traditions et avec l’idéal de leurs prédécesseurs.

Le traité d’Euclide, on le sait, n’est pour une large part qu’une reproduction ou une adaptation d’ouvrages antérieurs, et le couronnement de ce traité, comme celui de la géométrie platonicienne, est la théorie des polyèdres réguliers, objet du livre XII des Éléments. « Euclide — écrit Proclus[3] — était Platonicien d’opinion ; aussi s’est-il proposé comme but final de ses Éléments la construction des figures appelées platoniciennes ».

Apollonius (iiie siècle), auteur du Traité des coniques, fut à Alexandrie l’élève de l’école euclidienne et, comme tel, héritier, lui aussi, des traditions anciennes[4]. Il

  1. L’école d’Eudoxe de Cnide, qui eut une très grande influence sur le développement des mathématiques, était, comme on sait, exactement contemporaine de celle de Platon et en relation étroite avec celle-ci.
  2. Cf. infra, p. 87.
  3. D’après Geminus, trad. Paul Tannery, apud la Géométrie grecque, p. 67.
  4. D’après l’un des récents commentateurs d’Apollonius, T.-L. Heath (Apollonius of Perga, Cambridge, 1896, p. 37 et suiv.), l’auteur du Traité des coniques adopte « la forme d’exposition, les conceptions et la terminologie » de l’école euclidienne. Les différents livres du traité d’Apollonius sont précédés de préfaces qui indiquent en quelques mots le but poursuivi par l’auteur et l’intérêt qu’il attribue aux théories dont il fait l’exposé (Cf. Heath, loc. cit., p. 18 et suiv.). Or on voit par ces préfaces qu’Apollonius entend être le continuateur direct des géomètres qui ont, avant lui, étudié les sections coniques. Les questions qu’il introduit sont celles que ses prédécesseurs ont « laissées de côté » ou qu’ils n’ont « touchées