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LA VIE DE FAMILLE
Le 22 mars.

Hier, je suis allée à « l’Académie des femmes » de Brooklyn, maison d’éducation pour cinq cents jeunes filles, où elles étudient et passent les degrés comme les jeunes gens. J’ai admiré l’ordonnance de cette institution, son musée, sa bibliothèque, etc. La tenue de ces jeunes filles est fort bonne. J’ai entendu leurs compositions en vers et en prose ; elles m’ont plu, ainsi que leurs jeunes maîtresses. J’ai entendu également un chant avec lequel on m’a déjà saluée deux ou trois fois dans ce pays, à ma grande confusion ; car les paroles, dans lesquelles je ne puis pas découvrir une étincelle de saine raison, me sont attribuées, et la musique à Jenny Lind. « C’est imprimé. » Ce chant commence ainsi : « Je rêve, je rêve à ma patrie ! » Ces grands établissements en faveur des jeunes filles répandent incontestablement beaucoup de connaissances spéciales, donnent de l’assurance, etc. ; mais sont-ils avantageux pour ce que la femme a de meilleur ? j’en doute, et j’ai ouï dire que des femmes sérieuses, même parmi les jeunes, en doutent aussi et même le nient. Ils peuvent être bons comme établissements transitoires, pour introduire les femmes dans le domaine des sciences, dont elles ont été exclues jusqu’ici. (On loue généralement leur aptitude et leurs progrès dans les mathématiques, l’algèbre, la physique.) Mais il est évident pour moi que ces études, ces classes qu’elles suivent, leur font beaucoup négliger les vertus et les grâces du foyer domestique. La jeune fille, dans son ardeur pour apprendre sa leçon, rudoie sa mère, regarde son père d’un air fâché, s’ils osent l’interrompre ; son ambition est excitée aux dépens de son cœur. On attache trop de prix à