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DANS LE NOUVEAU-MONDE.

stellations se lèvent maintenant sur ma tête ; je leur souhaite la bien venue. Au milieu de l’obscurité une barque s’approcha du bateau à la rame, elle contenait plusieurs noirs et un blanc qui, après avoir pris congé amicalement des esclaves, vint à bord, et une voix sortie de la barque lui cria : « Ne vous oubliez pas trop longtemps là-bas, Massa ! — Non, non, » répliqua celui-ci. Nous n’arrivâmes qu’à onze heures et demie à Savannah. Je me rendis en voiture avec mademoiselle Plumb, sa sœur et leur médecin au plus grand hôtel de la ville, Pulasky-House, appelé ainsi en souvenir d’un guerrier polonais qui a pris part à la guerre de l’indépendance américaine, et y est mort. Son monument, joli obélisque en marbre blanc, est sur la place devant l’hôtel et entouré d’arbres magnifiques.

Le lendemain à sept heures du matin j’étais sur le chemin de fer de Mâcon, — long et très-fatigant voyage d’une journée, surtout par la chaleur avec la fumée et la poussière qui remplissaient les waggons. La route passait à travers une contrée maigre et sablonneuse couverte de forêts de pins et presque sans habitations, excepté aux stations du chemin de fer, où l’on commençait à élever des maisonnettes, à faire le commerce, à cultiver ce maigre sol. À plusieurs de ces stations, je descendis pour botaniser dans la forêt, et trouvai plusieurs orchidées jaunes. La partie plaisante du voyage fut un gros monsieur à l’air jovial, en casquette, et redingote grise, qui ressemblait assez de sa personne à un sac de farine sur lequel aurait été placée une tête mobile. Il parlait politique, exhalait sa colère contre feu Tom Jefferson (le président auteur de la Déclaration de l’indépendance américaine), lui donnait à haute voix les plus vilains surnoms, en se tournant vers un militaire grand, sec, d’un extérieur noble, assis sur