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LA VIE DE FAMILLE

lesquels il m’a aidé à combiner mes mouvements dans ce pays, à faire un choix parmi les invitations qui m’ont été adressées, etc., etc. En nous séparant, il m’a exhorté avec son fin sourire à me servir, en toute occasion, d’un peu de tact inné, — c’est précisément ce qui me manque, — pour savoir ce que je dois faire ou non. Je crois avoir suivi ce conseil sur-le-champ en refusant un jeune homme qui me proposait de grimper avec lui dans un clocher très-élevé. Rien ne me frappe comme l’ardeur, le penchant juvénile, je dirai presque enfantin, de ce peuple pour les entreprises. Il ne redoute rien, et croit tout possible. Mais — je suis trop vieille pour grimper dans les clochers avec les jeunes gens.

Après le départ de mes amis, M. Putnam s’est emparé de moi pour me conduire à sa villa de Staten-Island. Notre voiture eut de la peine à se frayer une route vers le port, à travers la foule des véhicules de toutes sortes qui encombraient les rues. J’admirai l’adresse avec laquelle leurs conducteurs s’évitent, tournent les difficultés, et dénouent sans fâcheuses aventures ces véritables nœuds gordiens composés de charrettes, etc. C’est remarquable, mais non pas amusant. J’étais dans l’attente continuelle de voir entrer la tête des chevaux par la portière ou d’être brisée en même temps que notre voiture ; cependant tout alla bien, et nous atteignîmes le bateau à vapeur. La traversée fut très-agréable sur les eaux calmes de ce vaste port, où les embarcations de toutes grandeurs vont, viennent, passent, entre les navires à voiles. — Quelle vie !

Dans la villa de M. Putnam, sur les hauteurs de Staten-Island, j’ai vu une maîtresse de maison délicieusement jolie, vive, aimable, trois jolis enfants, et le soir une foule de voisins. Je leur ai joué des polonaises et des chansons