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VIII


La colonisation du Canada français est une épopée illustrée par les plus vaillants, quoique les plus obscurs courages, où un héroïsme de tous les instants n’a eu d’autre témoin que le Dieu qui veille aux destinées des nations et, pour les rendre plus fécondes, multiplie, dès l’origine, les sacrifices et les épreuves.

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Pendant près d’un siècle, on a laissé le champ libre à tous les abus, et les plus criantes injustices ont été commises envers les colons, sans que ceux-ci pussent avoir aucun recours contre leurs ennemis, ni même faire reconnaître leurs droits les plus indiscutables. Ainsi, pour ne citer qu’un exemple entre vingt, les exploiteurs des forêts se prétendaient les propriétaires absolus de tout le bois existant sur les lots acquis par les colons, sous prétexte que ces lots étaient compris dans l’étendue de leurs concessions. Leurs efforts redoublés pour repousser les colons et pour accaparer le domaine public étaient une des formes de l’hostilité à peine déguisée à la race franco-canadienne. Les marchands de bois feignaient de considérer le colon comme un accapareur inopportun du patrimoine national. Ils le représentaient comme tel et même comme un destructeur aveugle du bois, n’ayant d’autre but que de réaliser quelques dollars avec ce bois abattu sur un lot qu’il n’avait aucune intention de défricher. Ils avaient entassé contre lui calomnies sur calomnies, et avaient réussi de la sorte, en généra-