Page:Buies - La Province de Québec, 1900.djvu/87

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

l’isolement, contre le découragement qu’amenait l’impuissance apparente de la résignation, de la lutte soutenue tous les jours, sans qu’il se montrât une lueur à l’horizon, une légère étincelle d’espoir en des temps meilleurs.


II


Cette œuvre semblait devoir être condamnée et mourir dans son embryon. À peine naissante, incapable de se soutenir, sans appui, sans protection et sans secours, non seulement elle manquait d’appui, de secours et de protection, mais tous se déclaraient contre elle, la nature qui ne donne rien sans qu’on lui fasse violence, les gouvernements qui avaient bien d’autres soucis et qui ne croyaient pas à la colonisation, les compagnies puissantes qui faisaient le commerce des fourrures, les exploiteurs des forêts qui voyaient dans les colons autant d’ennemis, tandis que ceux-ci étaient précisément leurs alliés les plus précieux, et enfin les députations, qui se faisaient les instruments dociles des marchands de bois, afin de s’assurer leurs bonnes grâces et leur appui dans les luttes électorales.




La colonisation semblait donc vouée à mort et aurait été en effet étouffée dès ses premiers vagissements, étouffée par ceux-là même qui devaient entourer son berceau de toutes les sollicitudes. À peine naissante, cette œuvre, qui est une condition indispensable de vie et de croissance pour le peuple canadien, allait périr misérablement. Le défricheur, le colon,