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BULLETIN DU COMITÉ

décrire exactement la nature, et de définir un certain nombre de faits économiques peu et mal connus en France. Quel avenir est réservé à ce commerce ? Quel rôle y jouera le chemin de fer transsibérien ? Quels chemins de fer nouveaux pourront être créés ? Quelle est la valeur économique de la Mandchourie elle-même ? Autant de problèmes dont nous essaierons de déterminer les éléments et d’indiquer les solutions. Il suffisait aujourd’hui de signaler ces faits primordiaux :

1) Prédominance de l’exportation russe dans tout l’Ouest ;

2) Sur la route de Kiakhta à Kalgan, exportation chinoise dominante, soit en Sibérie, soit chez les Mongols ;

3) En Mandchourie deux faits dominants et certains : a) exportation des produits soungariens dans les provinces russes ; b) transit forcé à travers les possessions russes des marchandises chinoises ou européennes à destination de la Mandchourie. Les ports sibériens sont les véritables ports de la Mandchourie.

Nous possédons maintenant les données essentielles pour comprendre les faits actuels : nous pourrons les suivre au jour le jour.

ASIE FRANÇAISE

Le Budget de l’Indo-Chine pour 1901.

Quand ces lignes paraitront, le budget général de l’Indo-Chine pour 1901 sera exécuté pour un quart environ. Dans ces conditions, il est peut-être un peu tard, pourrait-on penser, pour s’en occuper. Et cependant, quel document pourrait mieux que celui-là nous faire connaître, au début de ces études, les ressources de l’Indo-Chine et sa situation financière ? En France, il est assez rare que l’étude d’un projet de budget, du moins dans ses grandes lignes, apporte de bien grandes clartés sur la politique générale du gouvernement et sur la prospérité du pays. Il n’en est pas de même aux colonies, et quand il s’agit surtout de colonies en période de croissance, de pays dont la situation économique se modifie d’année en année, les variations du budget sont parfois telles que l’œil le moins exercé ne peut manquer d’y reconnaître l’effet de telle ou telle mesure administrative et comme la marque personnelle de l’homme qui les a conçus.

En ce qui concerne plus spécialement l’Indo-Chine, l’étude du budget offre, avons-nous dit, un intérêt particulier. Elle permet en effet de se rendre compte des résultats obtenus par l’œuvre fiscale de ces dernières années. Que produisent donc ces taxes de consommation, ces régies, dont l’établissement a soulevé les critiques que l’on sait ? comment ces revenus sont-ils dépensés ? quels services improductifs ou utiles assurent-ils ? à quelle politique l’administration actuelle entend-elle les employer ?

Pour être absolument complète, une étude du budget de l’Indo-Chine en 1901 devrait embrasser les budgets locaux de la Cochinchine, de l’Annam, du Cambodge, du Laos et du Tonkin. Mais cette étude comparative nous entraînerait trop loin et nous nous bornerons à passer rapidement en revue les chapitres principaux du budget général de la colonie.

Le budget général de l’Indo-Chine — dans lequel les prévisions de dépenses s’élevaient en 1899 à 17.617.500 piastres 42.282.000 francs)[1] et en 1900 à 20.796.000 piastres 49.910.400 francs) — a été équilibré pour 1901 de la manière suivante :

Recettes 22.998.000 p. (65.195.200 fr.)
Dépenses. 22.982.000 p. (55.156.800 fr.)

Le budget général de l’Indo-Chine est alimenté presque exclusivement par les revenus indirects perçus dans l’ensemble de la colonie. Sur 22.998.000 p. de recettes en 1901, on suppose que l’enregistrement, les domaines et le timbre fourniront 807.000 piastres, les douanes 5.910.000 p. ; les contributions indirectes proprement dites et les régies, qui constituent la principale source de richesse du Trésor, figurent aux recettes prévues pour 1901 pour 15.060.000 piastres. Si nous décomposons ce dernier chiffre, nous trouvons que c’est la régie de l’opium qui fournit les plus gros revenus 6.400.000 piastres. La régie des sels, dont il a été si souvent question depuis sa création, figure pour 2.100.000 piastres ; quant aux droits de consommation sur les alcools européens (100.000 piastres), les alcools indigènes (3.300.000 piastres, les tabacs, les huiles minérales, les allumettes, les noix d’arec, ils forment ensemble un bloc de 4.450.000 piastres.

Quand on passe à l’examen de la section des dépenses, on aperçoit à première vue quelques chapitres très importants : services militaires, douanes, travaux publics, dettes remboursables par annuités, qui absorbent la majeure partie des ressources de la colonie. L’Indo-Chine est la seule de nos colonies qui paye une partie de ses dépenses militaires. Le budget général pourvoit à l’entretien des troupes indigènes (tirailleurs annamites, tonkinois, cambodgiens, chinois, escadron de chasseurs annamites, peloton de cavaliers de remonte), de certains services maritimes, du service de santé et de la gendarmerie. Il en résulte, pour les finances indo-chinoises, une charge de 1.677.000 p., soit 11.224.000 francs. Viennent ensuite suivant l’ordre d’importance des dépenses : l’administration des douanes et régies (4.572.000 p.) que l’on pourrait grouper avec le service de l’enregistrement, du timbre, sous la rubrique : services chargés du recouvrement des impôts. On ne peut pas apprécier la dépense qu’ils occasionnent suivant son chiffre absolu, mais bien suivant la proportion qui existe entre cette dépense et le revenu des impôts que ces services administrent.

  1. Dans le projet de budget de 1901, la piastre a été comptée à 2 fr. 40.