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CHAPITRE VI
PEUPLES ET VILLES.

À côté de la peinture des individus se forme aussi l’art de juger et de peindre des populations entières. Pendant le moyen âge on avait vu dans tout l’Occident des villes, des races et des peuples se poursuivre réciproquement de moqueries et de plaisanteries qui renfermaient généralement un grain de vérité caché sous une forte dose d’exagération. Mais ce sont les Italiens qui de tout temps se sont distingués par leur talent à saisir les différences qui, sous le rapport intellectuel, existaient entre leurs villes et leurs provinces ; leur patriotisme local, qui était aussi grand ou plus grand que chez n’importe quel peuple du moyen âge, a eu de bonne heure un côté littéraire ; de bonne heure aussi il s’est rattaché à l’idée de la gloire ; la topographie naît comme un parallèle de la biographie (t. I, p. 184). Pendant que chaque ville importante commençait à célébrer son passé en prose et en vers[1], on vit aussi surgir des écri-

  1. C’est ce qui eut lieu parfois de très-bonne heure ; on en voit un exemple dans les villes lombardes dès le douzième siècle. Comp. Landulfus senior, Ricobaldus et (dans Murat., X) le remarquable anonyme De Laudibus Papiæ, du quatorzième siècle — Ensuite (dans Murat., l, 6) Liber de situ urbis Mediol. Quelques citations et remarques sur certaines histoires locales de I’Italie d’alors se trouvent dans O. Lorenz, Sources de l’histoire de l’Allemagne au moyen âge depuis le treizième siècle, Berlin, 1877, II, p. 243 ss. ; pour-