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vases, relevant leurs nasses, visitant leurs filets ou regardant passer nos bateaux.

Nous arrivâmes ensuite à de petites falaises composées de granit, de porphyre, de grès et d’argile délitée, falaises où le battement des vagues avait produit de nombreux éboulements, creusé de nombreuses cavernes ; puis nous entrâmes dans le Lougouvou. Nos barques y furent amarrées à l’abri d’autres falaises plus rocailleuses, formées par une ligne de grandes montagnes.

La crainte qu’avaient mes rameurs d’affronter un peu de vent et de houle nous fit rester là tout un jour. Les hippopotames, les crocodiles, les singes étaient nombreux, et si j’avais pu marcher, cette halle n’aurait pas été ennuyeuse ; mais j’avais les pieds et les jambes couverts de furoncles, ce qui m’empêchait de quitter le bateau.

En sortant du Lougouvou, nous longeâmes des murailles presque verticales, formées de grès et de marbre noir rayé de blanc ; puis, sur une longue étendue, de grands lits qui nous parurent être de la houille ; quand mes gens de Bagamoyo virent ce point de la falaise, ils s’écrièrent tous : Makoa marikébou (charbon de vaisseau). Le filon principal, situé au sommet de courbes rocheuses de même inclinaison, tandis que les courbes d’inclinaison contraires avaient disparu, offrait une épaisseur de quinze à dix-huit pieds.

Il me fut impossible d’avoir un fragment de cette houille, mais plus tard on me fit présent d’un échantillon qui venait d’Itahoua, province située sous la même latitude, à peu de distance du bord occidental du lac. Ce charbon, sans nul doute, est légèrement bitumineux.

Après avoir croisé plusieurs cours d’eau, plusieurs torrents, nous atteignîmes l’embouchure du Makanyadzi, où se terminent les falaises dont il vient d’être question. Mes guides m’apprirent qu’il y avait là du miel en quantité considérable, mais qu’il était sous la protection d’un méchant esprit, d’où il résultait qu’on ne pouvait pas en prendre sans s’exposer à quelque malheur, et aucun de mes gens ne voulut en aller recueillir.

Au moment où nous abordions, je remarquai dans l’herbe le dos écailleux d’un crocodile. Saisissant mon raïfle, j’envoyai au monstre deux balles qui le tuèrent sur le coup ; ce n’était qu’un jeune d’une longueur d’environ quatre pieds.

Les hippopotames nous tinrent éveillés toute la nuit par leurs