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fonctionnaires mal rétribués, étouffe le commerce et transforme ces provinces en foyers de corruption.

Beaucoup de Portugais le comprennent et le déplorent, mais se disent impuissants à remédier au mal. De même que l’était le marquis Sa de Bandeira, le vicomte Duprat est plus sage que la majorité de ses compatriotes. Si les conseils de ces hommes éminents, si les avis de l’amiral Andradé, gouverneur général de l’Angola, et ceux de quelques autres pouvaient prévaloir, il y aurait un grand pas de fait vers la civilisation de l’Afrique[1].

Le gouvernement portugais a récemment accordé à une compagnie l’autorisation d’établir des bateaux à vapeur sur le Zambèse ; si le projet s’exécute avec activité, on entendra bientôt parler de ses résultats.

Beaucoup de gens diront peut-être que les droits des chefs indigènes doivent être respectés et que nous n’avons pas à intervenir dans les affaires du pays. Je doute, leur répondrai-je, qu’il y ait au centre de l’Afrique une seule province dont les habitants ne se rallieraient pas avec joie à un gouvernement régulier, différent de celui qu’ils subissent. Les chefs n’ont pas d’autre règle que leurs caprices, d’autres lois que des coutumes barbares ; au moindre signe d’un despote en état d’ivresse, la mort ou la mutilation est infligée à de nombreuses victimes.

Les nègres prennent volontiers pour séjour les lieux où ils sont relativement en sûreté contre les razzias incessantes de leurs ennemis. Ainsi, la résidence d’un traitant devient souvent le noyau d’une agglomération considérable d’indigènes. Ceux-ci, ayant secoué le joug de leurs propres chefs, tombent bientôt sous la domination des étrangers ; et dans les projets qui auront pour but de créer, au centre de l’Afrique, des établissements soit religieux, scientifiques ou commerciaux, on ne devra pas oublier que les directeurs de ces établissements auront bientôt à remplir les fonctions de magistrats.

Si les grandes voies fluviales du Congo et du Zambèse sont utilisées par le commerce, elles devront être placées sous le contrôle de puissantes compagnies ayant, comme autrefois la Compagnie des Indes, le droit de nommer des fonctionnaires

  1. Ces avis sont près de triompher ; on écrit de Lisbonne, à la date du 28 octobre : « La commission chargée par le gouvernement de réformer les tarifs des douanes des Indes portugaises, a décidé d’autoriser le libre cabotage des navires étrangers sur la côte de Guinée. » (Note du traducteur.)