Page:Catherine de Sienne - Le Dialogue, Hurtaud, 1913, I.djvu/130

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exclu les paroles, mais j’ai dit que je voulais peu de paroles, pour te faire comprendre que tout acte extérieur était fini ; c’est pour cela que je les ai traitées de peu ; mais elles ne laissent pas que de me plaire quand on y cherche un instrument, non le principe de la vertu.

Personne donc ne se doit laisser aller à juger que celui qui s’applique avec ardeur à mortifier son corps par de grandes pénitences, est plus parfait que celui qui en fait moins ; car, comme je l’ai dit, ce n’est pas en cela que consiste la vertu ni le mérite. Bien mauvaise alors serait la condition de celui qui, pour une cause légitime, ne pourrait accomplir ces œuvres et ces actes de pénitence ! Mais la vertu est toute entière dans la charité, éclairée de la lumière de la vraie discrétion. Sans la charité, elle est sans valeur. Cet amour, la discrétion me le donne sans fin et sans mesure, parce que je suis la souveraine et éternelle Vérité. Elle n’impose donc ni loi ni bornes à l’amour dont elle m’aime, mais elle le mesure à bon droit, suivant l’ordre de la charité, à l’égard du prochain. C’est un amour ordonné que la lumière de la discrétion — laquelle, ai-je dit, procède de la charité — accorde au prochain. C’est dans l’ordre de la charité de ne pas se faire tort à soi-même par le péché, pour rendre service au prochain. Quand il suffirait d’un seul péché pour délivrer de l’enfer le monde entier, ou pour produire une action de grande importance, ce ne serait pas d’une charité ordonnée avec discrétion de le commettre ; une semblable charité