Page:Catherine de Sienne - Le Dialogue, Hurtaud, 1913, II.djvu/99

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ni pour Moi, ni pour ton prochain. Tu n’aimes que toi ! Tu n’as que cet amour égoïste et sensuel ; et, cet amour est un poison, pour toi et pour les autres. Tu es, toi-même, le loup infernal ! C’est ton amour déréglé qui les dévore tes brebis ! Ton avidité ne convoite que cette proie ! Que t’importe donc, que le démon invisible emporte les âmes, quand tu es, toi, le démon visible qui les livre à l’enfer ! Les biens de l’Église ne servent qu’à te vêtir et à t’engraisser toi-même, avec les autres démons de ta compagnie, comme aussi à entretenir des animaux, ces beaux chevaux, que tu ne possèdes que pour ton plaisir déréglé, et sans aucune nécessité. C’est la nécessité seule, pourtant, et non ton propre plaisir, qui peut te permettre ce train de maison. Que les hommes du monde cherchent cette jouissance, soit ; mais tes plaisirs, à toi1 devraient être d’assister les pauvres, de visiter les malades, de subvenir à leurs besoins spirituels et temporels. C’est pour cela, et pour cela seul, que je t’ai fait mon ministre, que je t’ai confié une si haute dignité. Mais, après que tu es devenu semblable aux bêtes, tu te complais au milieu des bêtes. Aveugle que tu es ! Si tu pouvais voir les supplices qui t’attendent si tu ne changes pas de vie, tu n’agirais pas ainsi, tu n’aurais que douleur de ta conduite passée, et dès à présent tu commencerais à mieux vivre.

Tu le vois, ma très chère fille, combien n’ai-je pas raison de me plaindre de ces malheureux ! Quelle ne fut pas ma générosité envers eux, et quelle n’est pas leur ingratitude envers moi !