Page:Champfleury - Grandes Figures d’hier et d’aujourd’hui, 1861.djvu/193

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GÉRARD DE NERVAL 46î> au char de M. Dumas; mais surtout il aimait à mettre sa plume au service de Théophile Gautier. Ce fut une camaraderie qui semblait ne devoir jamais s’éteindre; tous deux firent longtemps en collaboration le feuil- leton de la Presse, signé G. G., pour faire pendant au fameux J. J. du Journal des Débats. Un livre fut même annoncé sur les couvertures romantiques du libraire Renduel : Aventures d’un gentilhomme périgourdin, par Th. Gautier et Gérard Labrunie, qui ne parut jamais. C’est la seule fois que Gérard signa de son nom véritable. Il m’a expliqué pourquoi il avait pris un pseudonyme : son père, médecin, occupait une place assez importante sous la Restauration , et le jeune homme, qui sentait poindre en lui des idées politiques libérales, qu’il expri- ma en vers dans la manière de M. Casimir Delavigne, ne voulait pas qu’on reprochât au père les idées du fils. D’où le nom de Nerval, qui sent la Restauration, et que Gérard a su rendre possible par son talent. Un critique a voulu voir dans le nom de Nerval une sorte de pronostic funèbre de la fin déplorable de l’hu- moriste. Dans Nerval il trouve une sorte d’anagramme de Noir-Val. C’est en pareil cas que la théorie des noms doit se dresser dans toute sa rigidité contre ces fantaisies. Le pseudonyme de Nerval est très-significatif : il est his- torique et fait penser aux noms des héros de roman de la Restauration , date des débuts littéraires de Gé- rard, à qui j’en veux presque d’avoir sacrifié à certains préjugés de famille en quittant le franc nom de La- brunie. Aussi tous ses amis l’appelaient-ils Gérard, et quoique l’absence du mot monsieur indique trop la ca- maraderie littéraire, l’humoriste était-il traité, par les