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Page:Chateaubriand - Œuvres complètes, éd. Garnier, 1861, tome 4.djvu/368

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40e. — page 22.

Et jamais ma mère, déjà tombée sous vos coups, ne fut orgueilleuse de ma naissance !

Allusion à l’aventure de Niobé.


41e. — page 22.

Comment ! dit Cymodocée… est-ce que tu n’es pas le chasseur Endymion ?

Cette rencontre d’Eudore et de Cymodocée a paru généralement faire plaisir. Ceux qui l’ont critiquée ont trouvé que Cymodocée parloit trop pour une jeune Grecque, et ils ont prétendu que cela péchoit contre la vérité des mœurs. J’ai une réponse bien simple à faire : c’est Homère qui est le coupable. Nausicaa parle bien plus longuement à Ulysse que Cymodocée à Eudore. Les discours de Nausicaa sont même si longs, qu’ils occuperoient trop de place ici, et je suis obligé de renvoyer le lecteur à l’original. (Voyez l’Odyssée, liv. vi.) Ces longs bavardages, si j’ose proférer ce blasphème, ces répétitions, ces circonlocutions hors du sujet, sont un des caractères du style homérique. Je devois les imiter, surtout au moment de la rencontre de mes deux principaux personnages, pour faire contraster la prolixité païenne avec le laconisme du langage chrétien. Quant à l’anachronisme de mœurs, je me suis expliqué dans la remarque iiie. Si j’avois besoin de quelque autre autorité après celle d’Homère, je la trouverois dans les tragiques grecs. Iphigénie, dans l’Iphigénie en Aulide, confie ses douleurs au chœur, composé des femmes de Chalcis, qu’elle n’a jamais vues ; elle veut avoir l’éloquence d’Orphée, pour toucher Agamemnon ; elle s’adresse aux forêts de la Phrygie, aux montagnes d’Ida ; elle parle des eaux limpides, des prés fleuris où croissent la rose et l’hyacinthe ; elle entasse cent autres lieux communs de poésie étrangers au sujet. Électre, dans Les Choéphores d’Eschyle, reconnoît promptement Oreste ; mais quels interminables discours ne tient-elle point à son frère, étranger, inconnu d’elle, dans Sophocle et Euripide ! Nos grands poëtes ont si peu songé à cette prétendue invraisemblance de mœurs, qu’en imitant les anciens ils ont toujours fait parler très-longuement les jeunes princesses. J’ai tort de réfuter sérieusement ce qu’on n’a pu donner pour une critique sérieuse.


42e. — page 23.

Je suis fille d’Homère aux chants immortels.

Cela n’est pas plus extraordinaire que d’entendre Nausicaa conter sa généalogie et l’histoire de son père et de sa mère à Ulysse, qu’elle a trouvé tout