Page:Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 11, 1867.djvu/453

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où ils s’humilient, s’enorgueillissent parce qu’ils ont des sentiments de fierté. Par exemple, il vous vient un de vos frères ou même de vos esclaves, vous le recevez, vous lui lavez les pieds, et aussitôt pleins d’orgueil, nous avons fait, dites-vous, ce que personne ne fait, nous avons rempli un devoir d’humilité. Mais comment donc pourrait-on rester humble ? Qu’on se souvienne du précepte de Jésus-Christ : « Quand vous aurez fait toutes les choses qui vous sont commandées, dites : « Nous sommes des serviteurs inutiles ». (Lc. 17,10) Écoutez encore l’apôtre, qui a été le précepteur de tout le genre humain : « Pour moi » ; dit-il, « je ne me persuade pas d’avoir atteint le but ». (Phil. 3,13) Celui qui a la ferme croyance que, quoi qu’il ait fait, il n’a rien fait de remarquable, celui qui ne pense jamais qu’il soit arrivé au but, celui-là seul peut être humble de cœur. L’humilité a enorgueilli beaucoup de personnes : ne souffrons pas qu’elle produise le même effet sur nous. Vous avez montré de l’humilité dans telle circonstance ? Ne vous en faites pas gloire, sinon vous perdrez tout le fruit de votre action. Tel était le pharisien : il se glorifiait de donner aux pauvres la dîme de ses biens, et il la donnait en pure perte. Il n’en fut pas de même du publicain. Écoutez saint Paul : il dit encore : « Je ne me sens coupable de rien, mais pour cela je ne suis pas, justifié », (1Cor. 4,4) Voyez-vous comment, bien loin de se surfaire, il se rabaisse et s’humilie de toutes les manières, et cela, lorsqu’il, avait atteint le faîte de la vertu ?
Et ces trois jeunes gens, qui étaient environnés de flammes au milieu de, la fournaise, que disaient-ils ? « Nous avons péché et nous avons partagé l’iniquité de nos pères ». (Dan. 3,29) C’est là ce qu’on peut appeler avoir un cœur contrit. Aussi pouvaient-ils dire : « Mais que la contrition de notre cœur et l’humilité de notre esprit nous fassent trouver grâce ». Ainsi, après avoir été jetés : dans la fournaise, ils se montrèrent humbles : et même plus humbles qu’avant. Car lorsqu’ils eurent vu le miracle qui s’accomplit en leur faveur, la pensée qu’ils étaient indignes d’être sauvés, les conduisit à l’humilité. N’est-ce pas, en effet, lorsque nous avons la persuasion d’avoir reçu, de grands bienfaits, sans les ; mériter, que nous nous sentons le plus contristés ? Et cependant quel bienfait ont-ils reçu dont ils fussent indignes ? Ils se sont livrés eux-mêmes pour être jetés dans la fournaise, ils ont été emmenés captifs à Babylone pour les péchés des autres, car pour eux ils étaient encore très-jeunes, et toutefois ils ne murmuraient pas, ils ne s’irritaient pas, ils ne disaient pas : Quel avantage avons-nous donc à servir le Seigneur ? A quoi nous a-t-il servi de l’adorer ? Celui-ci est impie, et il a été fait notre maître. Nous sommes châtiés par un idolâtre au milieu d’idolâtres ; nous avons été emmenés en captivité ; nous avons perdu notre patrie, notre liberté, tous les biens dg nos pères ; nous avons été faits prisonniers et esclaves, et nous servons, un roi barbare, Ils n’ont rien dit de semblable, et que disent-ils donc ? « Nous avons péché, nous avons vécu dans l’iniquité ». Ensuite, lorsqu’ils prient, ce n’est pas pour eux, c’est pour les antres. « Tu nous as livrés » disent-ils, « à un roi très-cruel et très-méchant ». Voyez encore Daniel ; jeté dans la fosse aux lions, il dit : « Dieu s’est souvenu de moi ». (Dan. 14,37) Comment ne s’en serait-il pas souvenu, ô Daniel, puisque tu l’as glorifié devant le roi en disant : « Ce secret m’a été révélé, non point par quelque sagesse qui soit en moi ? » (Dan. 2,30) Aussi lorsque tu étais jeté dans la fosse aux lions pour n’avoir pas voulu obéir à un ordre impie, comment ne se serait-il pas souvenu de toi ? Il s’en est souvenu en effet, et pour cela même. N’as-tu donc pas été livré aux lions à cause de lui ? – C’est vrai, dit-il, mais j’ai, de grandes dettes envers le Seigneur.
Si Daniel parle ainsi après avoir fait preuve de tant de vertu, nous autres, que dirons-nous donc ? Mais écoutez encore David : « Que s’il tue dit : Je ne prends point de plaisir en toi ; me voici, qu’il fasse de moi ce qu’il lui semblera bon » (2Sa. 15,25) ; et cependant il aurait pu rapporter mille bonnes actions qu’il avait faites. Héli dit aussi : « C’est l’Éternel, qu’il fasse ce qui lui semblera bon ». (1Sa. 1, 3, 18)
4. Les esclaves de Dieu doivent montrer leur sagesse en s’en rapportant à lui pour toutes, choses, non seulement lorsqu’ils reçoivent ; des bienfaits, mais même au milieu des châtiments et des supplices. En effet, nous permettons aux maures de frapper leurs serviteurs, car nous savons qu’ils les épargneront, puisqu’ils leur appartiennent : ne serait-il donc pas absurde de croire quo Dieu nous