de la terre la croyance de l’existence des dieux, a rempli les villes d’autels, a institué les cérémonies religieuses, ces pompes augustes partout en usage aujourd’hui, et qui précèdent toutes les entreprises importantes ? Quelle est aussi l’origine de ces sombres terreurs dont les mortels sont pénétrés, qui tous les jours élèvent de nouveaux temples sur toute la face de la terre et instituent des fêtes en l’honneur des immortels ? C’est ce qu’il n’est pas difficile d’expliquer.
Dès ces premiers temps, les hommes voyaient, même en veillant, des simulacres surnaturels, que l’illusion du sommeil exagérait encore à leur imagination. D’un autre côté, les hommes, en remarquant l’ordre constant et régulier du ciel et le retour périodique des saisons, ne pouvaient pénétrer les causes de ces phénomènes ; ils n’avaient d’autre ressource que d’attribuer tous ces effets aux dieux, et d’en faire les arbitres souverains de la nature. Ils placèrent la demeure et le palais des immortels dans les cieux, parce que c’est là que le soleil et la lune paraissent faire leur révolution, parce que de là nous viennent le jour et la nuit, et les flambeaux errants qui brillent dans les ténèbres, les feux volants, les nuages, la rosée, les pluies, la neige, les vents, la foudre, la grêle et le tonnerre rapide au murmure menaçant. Hommes infortunés d’avoir attribué tous ces effets à la divinité et de l’avoir armée d’un courroux inflexible ! Que de gémissements il leur en a dès lors coûté ! Que de plaies ils nous ont faites ! Quelle source de larmes ils ont ouverte à nos descendants !
La piété ne consiste pas à se tourner souvent, la tête voilée, devant une pierre, à fréquenter tous les temples, à se prosterner contre terre, à élever ses mains vers les statues des dieux, à inonder les autels du sang des animaux, à enchaîner les vœux aux vœux, mais bien plutôt à regarder tous les événements d’un œil tranquille. En effet, quand on contemple au-dessus de sa tête ces immenses voûtes du monde et ces étoiles qui brillent dans l’azur éthéré, quand on réfléchit sur le cours réglé du soleil et de la lune, alors une inquiétude que les autres maux de la vie semblaient avoir étouffée se réveille tout à coup au fond des cœurs ; on se demande s’il n’y aurait pas quelque divinité toute-puissante qui mût à son gré ces globes éclatants. L’ignorance des causes rend l’esprit perplexe et vacillant : on recherche si