Aller au contenu

Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 8.djvu/31

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
XVII
NOTICE.

Jacob en signalait un troisième, en ces termes, dans un des derniers numéros du Bulletin du bouquiniste[1]. « Je ne me pardonnerai jamais, hélas ! d’avoir détaché d’un exemplaire in-4o de l’Imitation, relié en maroquin rouge, le feuillet de garde offrant une dédicace signée, lequel feuillet fut vendu vingt et quelques francs à la vente des autographes de M. de Soleinne. C’est un crime dont je m’accuse et que les bibliophiles n’absoudront pas[2]. »

Bien qu’en retouchant son œuvre, notre poëte se soit sans cesse préoccupé de se tenir de plus en plus près du texte latin, il se reprochait toujours davantage d’en être si éloigné. Ce regret l’a décidé à donner à l’édition de 1656 le titre suivant : « L’Imitation de Iésvs-Christ, traduite et paraphrasée en vers françois par P. Corneille, » de telle sorte que, par un singulier scrupule, ce mot paraphrasée paraît précisément pour la première fois au moment où une exactitude plus attentive semblait le rendre moins nécessaire.

Le succès de l’Imitation fut immense ; Fontenelle et Charpentier nous l’ont déjà appris[3] ; Gabriel Gueret n’est pas moins explicite à cet égard, et, à l’en croire, son témoignage, comme celui de Charpentier, n’est que la reproduction fidèle des paroles mêmes de Corneille : « Il a cru, dit-il[4], que la muse chrétienne siéroit mieux à son âge et qu’elle ne lui seroit pas infructueuse. Aussi ne s’est-il pas trompé, car je lui ai ouï dire que son Imitation lui avoit plus valu que la meilleure de ses comédies, et qu’il avoit reconnu, par le gain considérable qu’il y a fait, que Dieu n’est jamais ingrat envers ceux qui travaillent pour lui. »

  1. No 171, 1er février 1864, p. 54.
  2. Ce feuillet du reste n’est pas décrit parmi les autographes de M. de Soleinne. On rappelle seulement dans l’Avertissement un exemplaire de l’édition originale du Cid, inscrit sous le n° 1145, tome I, p. 251, sur la garde duquel on lit : À Anne un amy, de l’écriture de Corneille.
  3. Voyez ci-dessus, p. i et ii.
  4. Promenade de Saint-Cloud, dans les Mémoires historiques, critiques et littéraires par feu M. Bruys, 1751, tome II, p. 213 et 214.