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Page:Correspondance littéraire, philosophique et critique, éd. Garnier, tome 1.djvu/402

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NOUVELLES LITTÉRAIRES

statue composée de tous les métaux, des terres et des pierres les plus précieuses et les plus viles, et la porta à Ituriel. « Casserez-vous, dit-il, cette statue, parce que tout n’y est pas or ni diamant ? » Ituriel entendit à demi-mot ; il résolut de ne pas même songer à corriger Persépolis et de laisser aller le monde comme il va. Car, dit-il, si tout n’est pas bien, tout est passable.

Ce n’est pas le Catilina de M. de Voltaire que l’on donnera d’abord sur notre théâtre, comme on l’avait résolu. Les comédiens étudient actuellement son Électre, sujet qui a été si bien manié autrefois par M. de Crébillon. Cette fureur de remanier tous les objets dont s’étaient emparés d’autres écrivains vient de donner naissance à l’épigramme suivante, qui est de Piron :

Cet écrivain sec et vorace
Veut, pour remplir seul le Parnasse,
Anéantir tous les auteurs
Et poëtes et prosateurs.
Sur la troupe entière main basse,
Pour aucun d’eux pardon ni grâce ;
Tel le plus fou des empereurs
Décapitait avec audace
Tous les Hercules des sculpteurs
Pour mettre sa tête en leur place.

— Nous venons de recevoir de Berlin une brochure intitulée Essai de philosophie morale[1]. Le but de M. de Maupertuis est de prouver qu’on ne peut être heureux que par la religion, et par la religion chrétienne. Ce paradoxe ne fait point fortune. Il y a de l’esprit et de la méthode dans cet ouvrage, dont le style est dur et la manière extrêmement sèche. Il n’y a qu’un chapitre qui m’ait paru agréable, c’est celui des stoïciens.

— Je viens de lire un ouvrage nouveau intitulé Essai sur l’intérêt des nations en général et sur l’homme en particulier[2]. C’est proprement un recueil de trois espèces de dissertations, sur les passions, sur les bonnes ou les mauvaises qualités, et sur les devoirs. Je n’ai guère rien vu de plus sec, de plus superficiel et de plus mal écrit. Ce livre ne paraît pas depuis huit jours, et il est déjà oublié.

  1. Berlin, 1749, et Londres, 1750, in-12.
  2. Par le marquis M.-R. de Montalembert. Paris, 1750, in-8o.