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SOUVENIRS

occupé que par la Comtesse-Douairière de Breteuil-Charmeaux, mon autre tante, laquelle était la sœur aînée de la Baronne, et née de Froulay tout aussi bien que sa sœur et moi. Celle-ci ne partageait son bel appartement avec personne, et trouvait que les Breteuil n’en faisaient jamais assez pour elle. Les troisième étage était habité par le Commandeur de Breteuil-Chantecler, lequel donnait à loger à l’Évêque de Rennes (Messire Auguste de Breteuil-Fontenay), lorsque celui-ci croyait avoir affaire à Paris, ce qui ne manquait pas d’arriver souvent. Enfin les cinq enfans de ma tante la Baronne occupaient le quatrième étage ; et ma cousine Émilie, qui devint ensuite la Marquise du Châtelet, fut obligée de me céder son appartement qui donnait sur les Tuileries. On la relégua dans trois petites chambres qui s’ouvraient sur le cul-de-sac Dauphin, ce qu’elle ne m’a jamais pardonné, soit dit en passant. Vous voyez que je me trouvais transplantée tout au plein milieu de cette famille de Breteuil, et quand la recommandation de mon père me revenait à l’esprit, il me semblait que j’étais dans un buisson d’épines. Cependant je m’observai si bien sur le chapitre de la noblesse de robe, que j’en pris une sorte d’habitude inébranlable. C’est de là que m’est arrivée la bonne coutume de ne jamais rien dire sur ces familles du second ordre avant d’avoir eu la précaution de regarder autour de moi, comme on fait pour les cheveux roux et les bossus.

M. de Breteuil était un vieux robin qui ne parlait jamais que de son père, le Contrôleur-Général, à qui l’on avait toujours dit — Monseigneur. — Mais,