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DE LA MARQUISE DE CRÉQUY.

fils de M. Girardin, l’intendant de marine à Toulon. J’aurai l’occasion de vous reparler de celui-ci, qui fut blessé grièvement, et notez que c’était pour la possession d’un chat d’Angola qu’ils s’étaient battus à l’épée. M. le Régent se les fit amener pour les chapitrer avant de les destituer et de les faire emprisonner, et, vu le beau sujet de la dispute, il leur dit qu’ils n’auraient dû s’attaquer qu’avec les ongles. Le tribunal de la Connétablie ne s’était pas soucié d’intervenir dans leur affaire, sous prétexte que l’un de ces deux assaillons n’était pas gentilhomme et qu’il aurait pu décliner la juridiction des juges du point-d’honneur ; ce qui n’était guère à supposer et ce qui fit penser que la judiciaire des Maréchaux de France avait pu se rouiller par le défaut d’exercice.

M. de Richelieu, qui se mourait d’envie de chercher noise au Comte Emmanuel de Bavière (à propos d’une chattemitte), et qui trouva que la conduite de M. le Régent n’était pas décourageante, M. de Richelieu, vous dirai-je, alla s’établir en grand équipage sur la route de Paris à Chantilly, par où devait déboucher M. de Bavière ; et, comme il avait eu soin de faire encombrer et barrer la route par ses voitures, il en résulta des querelles entre les valets. Les maîtres descendent ; on se parle avec hauteur ; on se provoque, et voilà nos deux rivaux l’épée à ta main[1].

  1. Emmanuel, Comte de Bavière et du Saint-Empire, Grand d’Espagne de la première classe, Colonel-propriétaire, au service de France, du régiment Royal-Bavière, à la tête duquel il fut tué d’un coup de canon à la bataille de Laufelt en 1742. Il était