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DE LA MARQUISE DE CRÉQUY.

étendu sur le pavé de l’armurie sans connaissance, mais sans aucune blessure, et celle que j’avais cru recevoir n’était qu’une fascination. Le concierge et l’ermite ne me firent aucune question, mais ils me conseillèrent de quitter le château le plus tôt possible

« Je partis de Têtefoulques pour retourner en Espagne, et j’arrivai à Bayonne le vendredi suivant. Au milieu de la nuit, je fus réveillé en sursaut par le même Foulques Taillefer, qui me tendait la pointe de son épée. Je fis le signe de la croix, et le spectre parut s’évanouir en fumée, mais je n’en sentis pas moins le même coup d’épée que j’avais cru recevoir dans l’armurie ; il me sembla que j’étais baigné dans mon sang ; je voulus appeler et sortir de mon lit pour aller chercher du secours, mais l’un et l’autre me furent impossibles, et cette angoisse me dura jusqu’au premier chant du coq. Alors je me rendormis mais le lendemain j’étais malade et dans un état digne de pitié. J’ai eu la même vision tous les vendredis. Les actes de dévotion n’ont pu m’en délivrer, et c’est un reste d’espoir dans la miséricorde divine qui me soutient encore et me fait supporter une situation si lamentable. »

Les folles idées de M. de Caylus n’étaient pas de la même nature que celles de M. de Lima, et comme il était classé parmi les superstitieux impies, il était, à mon avis, beaucoup plus déraisonnable que le Grand-Prieur. On a raconté très diversement la dernière aventure de M. de Caylus et les circon-