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DE LA MARQUISE DE CRÉQUY.

mal, tandis que leur cousine de Lamballe s’était fait asseoir sur une cheminée, où elle faisait des cris comme un paon juché sur un mur. Ce qui’nous divertissait le plus, mon fils et moi, c’était d’abord l’idée de cette belle recherche et cette exquise délicatesse de Mme de Mazarin, qui n’avait pas voulu que des danseuses fussent admises à figurer chez elle devant les jeunes princesses ni qu’elles s’y trouvassent au plain-pied sur le même sol que nous, à moins d’en être séparées par une glace sans tain, tandis que, pour éviter un pareil inconvénient, c’était avec des bestiaux et un chien de basse-cour que nous nous trouvions en privauté si familière. Mais ce qui nous faisait le plus rire, c’étaient les singulières injures et les étranges reproches que M. de Morfontaine adressait à cette jeune vache, qu’il allait apostropher en disant qu’elle était une effrontée, une insolente, une hypocrite, et qu’au lieu de la reconduire à Chilly, comme elle s’en flattait sans aucun doute, on allait l’envoyer, pieds et poings liés, à la boucherie banale de Mme la Duchesse, à Brie-Comte-Robert !

Il fallut abandonner la place à toutes ces bêtes éblouies et ahuries, et l’on s’en alla souper tant bien que mal. Il se trouva que les rôtis de la deuxième table avaient été renversés sur l’escalier, de sorte que votre père fut obligé de souper avec des ragoûts.

Quelques jours après la réception de cette lettre où l’intendant de Soissons me parlait d’aller couronner sa Rosière, j’en reçus une autre de la Csse Soucy, sous-gouvernante des Enfans de France, qui me proposait d’aller présenter à Versailles Mme sa fille, la Comtesse de Créquy, laquelle ne voulait s’a-