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DE LA MARQUISE DE CRÉQUY.

à se dévouer au soulagement de l’humanité souffrante, et pourtant leur divin maître leur en a donné l’exemple avec le précepte ; comment voudrait-on que la philosophie hermétique, qui ne saurait fournir aucun précepte analogue à celui des chrétiens, eût l’autorité que ses adeptes ont entrepris de lui faire supposer ?

Vous sacrifiez votre repos, c’est-à-dire votre santé, sans compter votre temps et votre argent, pour opérer des œuvres de miséricorde, ou, si vous l’aimez mieux, des actes de bienfaisance, ai-je dit à M. de Cagliostro ; mais si vous n’agissez pas en vue du bon Dieu, je n’y conçois rien. Je comprends des philosophes qui fassent des largesses en public et par ostentation d’humanité, je comprends aussi qu’il y ait des gens sans religion qui fassent l’aumône pour se délivrer des sollicitations d’un mendiant et pour éviter ce mouvement nerveux qu’on éprouve souvent à voir souffrir ; mais aller rechercher des pauvres et des malades, aller se mettre en quête des souffreteux et des malheureux humains qui ne souffrent pas sous vos yeux, pour épancher sur eux un océan de libéralités continuelles, et ceci quand on n’est pas chrétien, par simple compassion philosophique et pour la gloire de la théorie de Paracelse, voilà, Monsieur, ce que je ne comprendrai jamais, et permettez-moi de vous dire que je n’y crois pas.

Tout ce que je puis vous dire en faveur de M. Cagliostro, c’est qu’il a bien de l’esprit, et de plusieurs sortes. Dieu veuille que vous n’ayez jamais à vous repentir de votre confiance en lui. Il ne faut pas, mon bon cousin, vous attendre à ce que je le pré-