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SOUVENIRS

sente ni le recommande à personne, et comme il a pu s’aviser que je le suspectais de charlatanerie, il est à croire que je ne le reverrai pas souvent.

Écoutons maintenant MM. de Ségur, de Miromesnil, de Vergennes et de la Borde ; voici dans quels termes ils écrivaient au Préteur de Strasbourg, M. de Kinglin. « Nous avons vu M. le Comte Alexandre de Cagliostro, dont la figure exprime le génie, dont les yeux de feu lisent au fond des âmes, qui sait toutes les langues de l’Europe et de l’Asie, et dont l’éloquence étonne, entraîne et subjugue, même dans celles qu’il parle le moins bien. Nous avons vu ce digne et vénérable mortel, au milieu d’une salle immense, courir avec empressement de pauvre en pauvre, panser leurs plaies dégoûtantes, adoucir leurs maux, les consoler par l’espérance, leur dispenser ses remèdes héroïques, les combler de bienfaits, enfin les accabler de ses dons, sans autre but que celui de secourir l’humanité souffrante. Ce spectacle enchanteur se renouvelle à Strasbourg trois fois chaque semaine, et plus de quinze mille malades lui doivent l’existence. Mme la Comtesse de Cagliostro, belle et modeste personne, aussi bienfaisante que son époux, l’assiste continuellement dans ces actes d’une humanité transcendante[1].

Afin d’avoir une idée de l’instruction solide et

  1. Laure Feliziani, courtisane génoise, morte en 1794 dans le refuge de Sainte-Apoline, à Rome. Elle avait été condamnée à finir ses jours en prison par arrêt du Saint-Office, comme ayant pris part aux crimes de Cagliostro dans plusieurs affaires de magie, sacrilége et franc-maçonnerie.
    (Note de l’Auteur.)